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Archives LVE. 1993, Demandez le programme, SVP !

Il y a 30 ans, l’économie et le social constituaient-ils une priorité pour la classe politique ?
La réponse peut-être avec le gouvernement d’alternance, arrivé cinq ans plus tard.

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Il semble bien que le pays soit à la veille (ou presque) d’avoir un nouveau gouvernement. Suite à l’allocution de S.M. le Roi lors de la séance inaugurale de l’actuelle législature, on apprend que les leaders de la Koutla et de l’Entente devraient être reçus par le Souverain ce vendredi à Ifrane. Il est probable qu’à l’issue de ces consultations royales, un nouveau Premier ministre soit nommé dans les prochains jours ou semaines. Mais sur quel programme ?

En effet, ce n’est certainement pas faire un procès d’intention aux partis politiques nationaux que de consta – ter que leur démarche programmatique, à la veille même de la formation d’un nouveau gouvernement, est particulièrement pauvre, si ce n’est totalement inexistante !

Ce constat, tout un chacun peut aisément le faire, alors que les organisations partisanes et la presse dite d’opinion accordent un intérêt tout relatif à la présentation chiffrée et élaborée des projets d’action dans le cadre d’une structure exécutive.
Bien que les informations se multiplient sur les graves contre-performances de notre économie, affectée par la sécheresse et le déficit hydrique, assommée par les répercussions d’une crise sévère en Europe, communautaire principalement, les partis politiques, qu’ils soient ou non constitués en «Bloc» ou en «Entente», font montre d’une réelle indigence au plan de l’analyse d’une situation économique dont les répercussions sociales sont préoccupantes.

Que constate-t-on donc en ces jours où, normalement, ces partis devraient «plancher» afin de présenter à S.M. le Roi et au pays (à travers le Parlement) des données concrètes, exhaustives, précises et détaillées sur leur programme d’action gouvernementale ? Seuls dominent et s’étalent, dans la presse quotidienne et périodique, le jeu politicien, les commentaires et analyses sur les alliances et mésalliances, les calculs et pronostics sur les chances des uns et des autres d’aller au gouvernement. Mais pour y faire quoi ? Là est la véritable question qui ne semble guère interpeller les politiques. Ainsi, dans certains milieux proches de la Koutla, où, semble-t-il, le réflexe «opposition» joue encore pleinement, on peut entendre qu’il n’appartient pas à ces partis de proposer une alternative réellement et concrètement établie sur le plan programmatique.

Seul prime l’aspect politique. Le changement sera d’abord au plan formel, symbolique. «Une fois au gouvernement, on verra bien», entend-on ainsi dire !

À l’opposé, au sein de l’Entente, c’est le même vacuum que l’on constate, avec, circonstances aggravantes, le fait que les partis qui la composent ont occupé des responsabilités gouvernementales sans interruption depuis près de 16 années ! Mais, visiblement, il ne leur appartient pas de proposer ou d’étudier un programme. On leur demandait seulement de voter au Parlement, celui que l’Exécutif présentait aux parlementaires ! Aujourd’hui, ils se retrouvent donc devant un cruel dilemme, car, même s’ils peuvent espérer obtenir une majorité au sein de l’appareil législatif, ils n’ont toujours pas encore les structures adéquates pour élaborer et présenter les grandes lignes de leurs ambitions et prétentions.Ces remarques, sans doute dénuées de toute complaisance, sont à comparer avec la démarche de secteurs autres qui, sans une implication directe dans le jeu politique, n’en essayent pas moins de présenter critiques et propositions constructives (…).

On peut lire, çà et là, et de temps à autre, des critiques générales, des propositions généreuses et amples, des vœux et souhaits pieux. Mais pas de programme point ! Même la Koutla, qui affirme être en possession d’un programme, serait bien en peine de présenter publiquement un document autre que l’épaisse compilation de propositions qui sont, en réalité, des orientations générales et non un inventaire précis des moyens d’action (et leur financement) dans tous les secteurs d’activité nationale ! Alors que le patronat se lamente et espère que la situation s’améliorera avec le changement de gouvernement, on voit mal ce que les politiques pourraient proposer aux opérateurs économiques qui, pour retrouver confiance, ont besoin de données sérieuses!

Fahd Yata