Idées
VEFA, prenez vos précautions !
soit vous payez l’intégralité du prix demandé, immédiatement, soit le promoteur considère que vous vous êtes désisté et il retiendra alors 10% du prix total de vente, soit exactement le montant que vous avez réglé lors de la réservation ! Le piège s’est renfermé sur l’innocent citoyen qui pensait acquérir l’appartement de ses rêves

En ce début d’année 2015, un bon conseil, à garder en mémoire en permanence : si jamais votre route venait à croiser celle de certains promoteurs immobiliers, méfiez-vous. Et si l’envie vous prend d’acheter un bien immobilier, adressez-vous plutôt à des agences spécialisées ayant pignon sur rue depuis longtemps. Il faut aussi faire beaucoup attention au moment de signer un contrat VEFA (Vente en l’état futur d’achèvement) à cause des mauvaises surprises que cela peut réserver. Le plus souvent, on entre dans un engrenage par la même voie: lors d’un salon de l’immobilier, on craque devant les si belles photos de promotion ; ici c’est un appartement sur marina, ailleurs une villa sur golf où l’on voit s’épanouir et sourire une famille heureuse, le tout sous fond de ciel bleu. Le commercial de service s’empresse de vous ferrer, vous le client incrédule qui est mis à l’écart dans un douillet petit espace aménagé en bureau. Enivré par la volubilité du vendeur, vous finissez par signer un compromis de vente pour un appartement à 2 800 000,00 DH et un chèque de réservation d’un montant équivalent à 10% du prix d’achat, soit 280 000,00 DH. C’est le début de vos problèmes !
Un mois plus tard, vous recevez un courrier sympathique du promoteur, vous invitant à régler la deuxième tranche, soit 540 000,00 DH. Vous vous dites alors qu’il s’agit d’une erreur, et d’ailleurs, contacté par vos soins, le service commercial confirme (oralement) que, probablement l’ordinateur a buggé, pas de quoi s’inquiéter….. Sauf que 15 jours plus tard, le second courrier du promoteur est bien plus agressif, utilisant même des mots qui fâchent, comme résiliation, procédure judiciaire ou annulation de vente. Du coup, vous décidez d’aller en justice car le bien vendu n’est toujours pas disponible ; vous estimez que l’échéancier prévu n’a pas été respecté, et que, de toutes les façons le compromis signé est nul au regard de la V.E.F.A, puisqu’il n’a pas été rédigé par un notaire ou un avocat, comme stipulé par la loi. Vous demandez donc l’annulation du compromis et la restitution des avances consenties. En face, le vendeur vous demande de payer immédiatement l’intégralité du prix de vente sous peine d’annulation du compromis.
Contrairement à toutes les attentes, le tribunal rejeta vos requêtes et donna raison au promoteur défaillant. Les attendus du jugement sont proprement renversants : le juge a estimé que c’est l’acheteur qui est dans son tort car, dit-il, le compromis de vente signé n’entre pas dans le cadre de la loi VEFA. Et de donner l’explication suivante, légèrement tirée par les cheveux. D’abord, il ne s’agit que d’un compromis de vente, et non d’un contrat de vente (la VEFA traitant, elle , des contrats de vente). Ensuite l’acte de signature et le versement des avances ont été réalisés lors d’un salon de promotion et sur la base de photos publicitaires. Or ces dernières n’engagent nullement le vendeur, d’une part, et, d’autre part, le projet n’était pas encore sorti de terre. Or la VEFA ne s’applique pas si le projet n’a pas débuté, ce qui est le cas. Donc, circulez: soit vous payez l’intégralité du prix demandé, immédiatement, soit le promoteur considère que vous vous êtes désisté et il retiendra alors 10% du prix total de vente, soit exactement le montant que vous avez réglé lors de la réservation ! Le piège s’est renfermé sur l’innocent citoyen qui pensait acquérir l’appartement de ses rêves. Le plus grave étant que les tribunaux entérinent l’arnaque : pour la Cour, il s’agit d’un simple contrat de vente immobilière, ni plus ni moins. Vous estimez être dans votre bon droit puisque le vendeur a failli a ses obligations ; mais la Cour estime que c’est vous qui êtes défaillant puisque vous n’avez pas réglé l’intégralité du prix convenu. Dans cette affaire, le juge a eu tout faux : la Loi n’a pas été appliquée et la justice n’a pas été correctement rendue. La loi, en l’occurrence, était censée protéger le petit contre le puissant, mais au final, c’est le pot de fer qui l’emporte sur le pot de terre avec la bénédiction du tribunal.
Et donc pour finir, ce petit rappel: VEFA, prenez vos précautions ! n
