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Pour des renseignements efficaces

L’avocat est résolu à  comprendre ce qui se passe, et il s’adresse directement au président du tribunal, lequel tombe des nues en apprenant ce cas, et résume la situation en un mot : le respect, cher maître. Et d’ajouter benoîtement : aucun des fonctionnaires n’a eu le courage de vous expliquer que votre présence était superflue, cher maître. Le casier judiciaire (de par sa confidentialité) ne se remet qu’à  l’intéressé en personne, et jamais à  une tierce personne, fût-elle avocat, comme vous

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Fadel Boucetta 2014 05 26 2014 06 16

Pour des besoins administratifs, on peut avoir besoin d’un extrait de casier judiciaire, ou fiche anthropométrique. B.N. a chargé son avocat de lui procurer ce document afin d’avoir un visa pour les USA. Le juriste se présente au tribunal de première instance et se rend au parquet pour déposer la demande. Premier écueil : le pôle civil (qui comprend aussi des procureurs) se trouve dans l’enceinte du tribunal de Casa-Anfa, en face de la wilaya, proche des citoyens. Mais là, l’avocat apprend que le service des fichiers a été délocalisé à Ain-Sebaâ, au sein du pôle pénal, ce qui semble logique, mais peu pratique pour les justiciables car situé, lui, aux antipodes, c’est-à-dire loin du centre-ville.

Qu’à cela ne tienne, l’avocat s’y rend, et on lui dresse alors la liste des documents à fournir : certificat de résidence, photocopie de la CIN et extrait d’acte de naissance. Il faut savoir que ce document (le casier judiciaire) n’est délivré que par le tribunal du lieu de naissance. Ce qui n’est guère pratique car bien des citoyens émigrent loin de leur ville natale pour des besoins professionnels, familiaux ou autres ; on imagine le processus à suivre pour un natif d’Agadir, et qui vit à… Nador.

Peu de temps après, muni des documents requis, l’avocat revient au tribunal, mais curieusement aucun service n’accepte de prendre sa demande en considération : là, c’est un greffier qui exige, en sus des documents présentés, une attestation de travail (on se demande bien pourquoi !) ; ailleurs c’est une secrétaire qui l’informe que ce document est accessible en ligne ; puis un autre greffier affirme nettement que cela est impossible… Bref, il y a comme un cafouillage et les informations sont contradictoires selon les interlocuteurs !
Finalement un fonctionnaire expliquera au juriste que le certificat requis est assez sensible et qu’une enquête sommaire (mais réelle) doit être effectuée dans les archives avant de délivrer quoi que ce soit. C’est l’affaire de quelques jours, lui assure-t-on. Sauf que, une fois ce délai écoulé, rien ne semble réglé. Les fonctionnaires essayent à chaque fois de gagner du temps et donnent la réelle impression de patauger. On ne sait s’ils ont reçu des consignes, et dans ce cas quelles consignes? Pourquoi un document aussi simple (bien que sensible) semble créer un problème de taille ? Et le bon B.N. commence à s’impatienter puis, franchement, à s’inquiéter, alors que son rendez-vous avec le service des visas au consulat des Etats-Unis approche à grands pas. Il s’interroge, et son avocat avec lui: aurait-il commis dans une autre vie un délit ou un crime qui figurerait actuellement sur son casier judiciaire ? Ce qui n’explique pas pour autant la lenteur prise par la procédure. Aurait-il un homonyme, connu pour ses méfaits, justifiant de telles mesures de prudence ? L’avocat est résolu à comprendre ce qui se passe, et il s’adresse directement au président du tribunal, lequel tombe des nues en apprenant ce cas, et résume la situation en un mot : le respect, cher Maître. Et d’ajouter benoîtement : aucun des fonctionnaires n’a eu le courage de vous expliquer que votre présence était superflue, cher Maître. Le casier judiciaire (de par sa confidentialité) ne se remet qu’à l’intéressé en personne, et jamais à une tierce personne, fût-elle avocat, comme vous. Et plutôt que de vous dire sommairement «allez-vous en», ils ont inventé à chaque fois des prétextes fallacieux. Envoyez votre client demain, et son histoire sera réglée en un clin d’œil.

Ce qui fut fait, mais une simple information affichée au mur aurait permis à chacun d’être informé et d’éviter des déplacements inutiles!