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Idées

Droits et devoirs

Que les citoyens automobilistes se rassurent: ils ont des droits… mais il faut aussi leur rappeler qu’ils ont des devoirs. Et l’un d’entre eux consiste notamment à payer sans tarder les amendes résultant d’infractions au code de la route.

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chronique Fadel Boucetta

Une rumeur inquiétante circulait cette semaine, jetant le trouble et l’effroi parmi les automobilistes du Royaume. Selon elle, les conducteurs faisant l’objet de contrôles ponctuels de la part des policiers pourraient, sans avertissement préalable, se retrouver incarcérés, suite à des amendes transactionnelles non réglées au Trésor; amendes de toutes catégories, précisons-le, que ce soit pour un mauvais stationnement, un dépassement dangereux sur une nationale, un excès de vitesse sur l’autoroute… Sachant que bien des conducteurs sont en délicatesse avec la loi à ce sujet, il y avait effectivement de quoi inquiéter les foules. Ainsi donc, un quidam de Casablanca, en vacances à Agadir avec femme et enfants, pourrait inopinément se retrouver emprisonné sans autre forme de procès, si le policier qui contrôle ses papiers constate qu’une amende de 300 DH n’a pas été payée à temps? Bigre, c’est alarmant, et, suite à cette information, votre humble serviteur s’est rendu sur le site web mis en place par les autorités et dédié à ce sujet. Ici, deux remarques s’imposent: la première consiste à saluer les responsables gouvernementaux d’avoir eu l’idée de créer ce site afin de faciliter les démarches des citoyens, désireux de régler leurs amendes. La seconde serait d’émettre le vœu pieux que ce site soit un jour fonctionnel, et remplisse la tâche pour laquelle il est prévu ; parce que jusqu’à ce jour, cela demeure une coquille vide, en tout cas non branchée sur les différents réseaux concernés. Après moult manœuvres, plusieurs essais et de nombreuses tentatives, je n’ai pas réussi à me connecter, au motif saugrenu : «CIN non valide !»… Le document officiel qui identifie chaque citoyen de ce pays, émis par l’imposant ministère de l’intérieur, n’est donc pas reconnu par les services du ministère du transport ? Anguille sous roche, ou juste un peu de laisser-aller ? Ceci dit, j’ai trouvé quand même sur ce site une information intéressante : flashé (à l’insu de mon plein gré) par un radar, j’ai découvert que j’étais redevable au Trésor public d’une somme de 300 DH. En honnête citoyen, je me suis rendu sur le site de la Trésorerie Générale du Royaume pour régler mon dû. Enfin, du moins l’intention y était, car sur ce site, à mon grand désappointement, aucun règlement ne fut possible, au motif, cette fois, que la carte bancaire utilisée (pourtant valide jusqu’en 2019) était refusée par le système… Ah, la modernité !
Donc, récapitulons, comme a bien dû se résoudre à le faire le chef du parquet général, Me Abdennabaoui, qui a précisé les éléments suivants: le Maroc est un pays de droit, et les libertés publiques, garanties par la

Constitution, sont respectées scrupuleusement. L’incarcération ou la privation de liberté sont des décisions qui ne se prennent pas à la légère, et l’on ne saurait embastiller tous ceux qui doivent quelques centaines de dirhams au Trésor Public. Non seulement les prisons du pays ne suffiraient pas, mais il faudrait en construire d’autres. Par contre, tout conducteur faisant l’objet d’une amende recevra un courrier d’information, lui enjoignant de régler sa dette dans un délai de trente jours. S’il ne s’exécute pas, il sera convoqué par le commissariat de son quartier, où on lui rappellera l’obligation de régler le Trésor. Si malgré tout cela le citoyen n’obtempère pas, alors il sera inscrit sur la liste des personnes recherchées (validée régulièrement par le parquet), et pourra alors être interpellé lors de tout contrôle fortuit, afin d’être présenté au parquet. Que l’on se rassure : la peine de mort n’est pas une option envisageable. Mais le citoyen fera quand même l’objet d’une garde-à-vue (toujours désagréable) de quelques heures, le temps que les policiers accomplissent le travail administratif (vérification des identités, des documents du véhicule…). Que les citoyens automobilistes se rassurent donc : ils ont des droits… mais il faut aussi leur rappeler qu’ils ont des devoirs. Et l’un d’entre eux consiste notamment à payer sans tarder les amendes résultant d’infractions au code de la route.