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Argent

Marché obligataire : Le Trésor maintient son confort

Le Trésor subit beaucoup moins de pression que l’année dernière, tant en termes de financement que de remboursement. Ce qui lui vaut une aisance dans sa politique de recours au marché intérieur. Les taux reviennent alors à des niveaux bas, sans grande volatilité.

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Un calme total règne sur le marché des bons du Trésor. Un Trésor qui enchaîne les levées, une séance après l’autre, sur les différentes maturités de la courbe, avec des taux plutôt stables, voire en baisse.
Les investisseurs sont satisfaits des taux de rendement proposés par le Trésor. On est loin de la période de distorsion créée entre les deux parties. Ce bras de fer qui avait produit un décalage entre les taux réels et les taux servis, une indifférence des investisseurs vis-à-vis de la partie longue de la courbe…, et on en passe.
À la dernière séance d’adjudication, les taux ayant pour maturité 2 ans se sont établis à 3,25%, ceux sur 5 ans à 3,4% et sur 10 ans à 3,74%. Les taux sur le marché secondaire n’en sont pas très éloignés, avec des niveaux variant entre 3,10% sur le court terme et 3,72% sur le long terme.
En fait, «le Trésor subit beaucoup moins de pression que l’année dernière, tant en termes de financement que de remboursement. Ses levées et tombées sont conformes à son calendrier», estime un analyste taux. Pour les levées, il a même dépassé son objectif pendant le mois de janvier. Alors qu’il avait prévu de recourir au marché primaire des adjudications pour un montant variant entre 14 et 14,5 milliards de dirhams, il a fini par lever 19,6 milliards, dépassant ainsi son objectif de 38%. En février, il a affiché une levée mensuelle globale de 12,3 milliards de dirhams, représentant 93% de son besoin annoncé.
Pour leur part, les tombées, pour ces deux derniers mois, se sont situées à 6,5 milliards et 8,5 milliards de dirhams respectivement. Celles de mars sont estimées à environ 12 milliards de dirhams, pour un besoin de financement annoncé entre 12 et 13 milliards de dirhams. De quoi mettre le Trésor dans une situation confortable. De plus, il a organisé pour la première fois, en cette année, une opération d’échange de titres, pour un montant de 5,5 milliards de dirhams.

70 milliards de financements extérieurs
S’il y a un autre élément qui rassure les investisseurs dans l’évolution des taux, c’est bien «l’orientation actuelle vers les financements extérieurs avec un record prévu par la Loi de finances à 70 milliards de dirhams, après un tirage de 45 milliards en 2023». «Cela d’un côté. De l’autre, le Trésor continue d’afficher un excédent important de ses trésoreries, constituant un matelas de sécurité pour le financement de son besoin mensuel moyen en 2024, estimé à 7 milliards de dirhams», indique AttijariGlobal Research. En plus de tout cela, l’État a entamé les opérations de cession de ses participations dans des sociétés marocaines. Il a déjà empoché 1,6 milliard de dirhams, en cédant la Société d’aménagement et de développement de Mazagan.
Sur le plan économique, rien ne présage un changement structurel (pour l’heure). «Les finances publiques se portent plutôt bien et l’inflation est toujours en baisse. À 2,4% en janvier, on s’approche de la cible de Bank Al-Maghrib de 2%», explique un directeur d’une salle des marchés. Et d’ajouter : «Si aucun élément ne vient perturber le courant des choses, les deux à trois prochains mois, BAM pourrait même initier une baisse des taux». Autrement, c’est le statu quo. D’ailleurs, c’est le même son de cloche chez les professionnels contactés : le maintien du taux directeur à son niveau actuel jusqu’en juin prochain, au moins.

Attention à l’effet décompensation
Un élément supplémentaire qui pourrait plaider pour le maintien des taux est la décompensation progressive du gaz qui prendra effet à partir du mois d’avril de cette année. «Bank Al-Maghrib devra évaluer l’impact de cette mesure sur les prix à la consommation des produits alimentaires, ainsi que sur le comportement des citoyens avant de décider de l’orientation de sa politique monétaire». Bien que l’impact attendu devrait être minime, selon les pronostics, des distorsions pourraient se produire, renversant les acquis cumulés depuis quelques mois.
Il faut savoir que le contexte national n’est pas le seul qui prime, aux yeux des investisseurs. Le comportement des taux directeurs des banques centrales étrangères est également scruté. D’ailleurs, un analyste taux affirme qu’une fois un changement est opéré au niveau des politiques monétaires aux États-Unis ou en Europe, son effet est intégré immédiatement sur la courbe des taux obligataires au Maroc. C’est pour cette raison que la courbe des taux n’évolue pas vraiment à la hausse ou à la baisse le jour de l’annonce d’une modification du taux directeur au Maroc.
Dans ces conditions, les premiers bénéficiaires de cette situation sont bien les OPCVM obligataires, surtout ceux assortis d’une échéance moyenne à longue. Au 8 mars dernier, l’actif net de cette catégorie de fonds s’est apprécié de 6% depuis le début de l’année à près de 295 milliards de dirhams. Les fonds monétaires ne sont pas en reste avec une croissance de 9%, soit un actif net de 91 milliards.


Effet d’éviction vers le marché actions ?
Pas si sûr. Maintenant que le contexte global s’est plus ou moins calmé après plusieurs mois d’ébullition, l’on penserait que les investisseurs délestent le marché des taux au profit du marché actions. Ce n’est pas vraiment le cas. «Les positions sont faites et chacun tient sa place», ironise ce directeur. Il n’y a plus de va-et-vient entre l’obligataire et l’action à la recherche du rendement. Ce qui prime actuellement c’est l’aversion au risque et l’horizon de placement… Back to basics. D’ailleurs, même la Bourse de Casablanca offre un rendement intéressant, avec une performance annuelle de 6% au 12 mars. Il faut dire aussi que les séances sont animées par les publications des résultats annuels des sociétés cotées qui confirment, pour la plupart et jusqu’à ce jour, la bonne tenue de la santé commerciale et financière des sociétés cotées, toutes choses égales par ailleurs.