SUIVEZ-NOUS

Affaires

L’activité des avocats d’affaires redémarre

Les projets énergétiques ont redonné du souffle à  la profession. Les structures marocaines contrôlent 75% du marché. Le monopole du contentieux leur permet de tenir face aux cabinets étrangers.

Publié le


Mis à jour le

avocats activite 2014 10 21

Les cabinets d’avocats et de conseil en droit des affaires se remettent petit à petit de la crise dans laquelle ils sont plongés depuis 2008. Selon des témoignages concordants, l’activité a commencé à reprendre en 2013. «La mise en place d’infrastructures nouvelles met en confiance les investisseurs et, in fine, il y a plus de dossiers à traiter pour nous. Les projets énergétiques, notamment les nouvelles stations thermales et solaires, ont contribué fortement à cette nouvelle dynamique», témoigne Amine Hajji, avocat au barreau de Casablanca.
Cette nouvelle dynamique, certains cabinets l’ont anticipée. «Ce n’est pas un effet de mode qui nous a poussés à investir dans le marché marocain, nous avons eu très tôt conscience que le Maroc sera  un hub et nous avons toujours eu une confiance très forte en l’économie marocaine. Même s’il nous est arrivé d’afficher un taux de croissance en diminution due à la conjoncture économique mondiale, cette confiance n’est pas altérée», clame-t-on chez UGGC & associés (installé depuis décembre 2002). Ceux qui ont pris le train en marche ne veulent pas se laisser larguer: «Nous suivons nos clients là où ils vont», assure le management du cabinet espagnol Garrigues. L’installation de trois des majors anglais, en l’occurrence Norton Rose, Allen & Overy  et Clifford Chance, prouve également que le marché est porteur.

Pour le moment, les cabinets marocains sont loin de baisser les bras devant les étrangers, et ce, grâce à une activité de plus en plus diversifiée. «Cela va de la Corporate gouvernance (droit des sociétés) aux contrats de distribution, en passant par le droit de la propriété intellectuelle, l’énergie ou encore le droit bancaire et financier», précise Me Hajji. Selon un avocat ayant requis l’anonymat, ils contrôlent 75% d’un marché de 600 MDH par an.

Malgré la concurrence des cabinets étrangers sur les gros dossiers et dans les domaines pointus, les acteurs locaux ont un avantage leur permettant de ne pas trop souffrir. Pour plaider devant les juridictions marocaines, il faut être marocain. Ils gardent donc le monopole du contentieux, qui est quand même une partie non négligeable de la pratique du droit des affaires. On trouve cependant des associations entre enseignes marocaines et françaises permettant de franchir cette barrière. Une sorte de sous-traitance en somme. Certains praticiens marocains restent sceptiques quant à ces pratiques et considèrent que cela engendre une dissolution de la responsabilité de l’avocat vis-à-vis de son client.

Des vides juridiques à combler

Le développement de la pratique du droit des affaires demeure, malgré cette fulgurante évolution et cette soudaine concurrence qui tire la qualité des services vers le haut, entravé par le déficit de juges bien formés alors que les contrats sont complexes. L’arbitrage, une solution ? Selon Me Hajji, «le domaine est encore extrêmement limité pour qu’on puisse parler d’alternative, car ce n’est pas seulement le risque de mauvaise appréhension des juges qui pose problème». En d’autres termes, les praticiens participent aussi au mauvais fonctionnement de la justice. Du fait des frontières poreuses entre certains corps de métiers, il en arrive que des avocats qui plaident en droit des affaires font aussi du conseil juridique pour leurs clients, chose qui n’est pas, bien entendu, du goût des spécialistes. D’un autre côté, ce sont les notaires qui disputent aux conseillers juridiques certaines de leurs prérogatives – une partie du différend est réglée par l’intervention du législateur par la promulgation de la loi 18.00, qui a donné aux notaires (avec les avocats agréés près la Cour suprême et les adouls) le monopole de rédaction des actes de copropriété. Passer outre la déontologie pour gagner des marchés, c’est donc ce que font certains praticiens du droit. Mais comme le résultat final est l’unique preuve de la compétence, il y aura forcément de l’écrémage.