Pouvoirs
RNI : les réformateurs exigent un retour à la délégation des pouvoirs pour Salaheddine Mezouar
Mustapha Mansouri avait signé un accord le 7 octobre mais s’est rétracté une semaine plus tard.
Les réformateurs veulent convoquer une réunion du Conseil national pour restructurer le parti.
Un comité de réconciliation constitué pour tenter de trouver un terrain d’entente.

Où va donc le RNI ? A l’heure où nous mettions sous presse, mercredi 21 octobre, la tension qui règne au sein du parti depuis plusieurs semaines n’était toujours pas retombée. On se rappelle qu’elle avait atteint son pic, le 14 octobre, au lendemain de l’élection du président de la deuxième Chambre, quand M.Mansouri avait de manière inattendue fait marche arrière par rapport à un accord qu’il avait passé une semaine auparavant. Lequel pacte conférait, par écrit, à Salaheddine Mezouar la tâche de supervision des instances du parti et de la préparation d’une prochaine réunion du bureau exécutif. M. Mezouar agissant donc, en vertu de ses nouveaux pouvoirs, convoquait le mardi 13 octobre les membres dudit bureau à une réunion. Au même moment, surprise, M. Mansouri envoyait lui aussi une convocation en insistant sur le fait que seul lui, LE président, était habilité à le faire. La tension avait atteint son comble, quand, le 15 octobre, le même Mansouri, cité par une dépêche de l’agence AFP, avait évoqué «la possibilité d’un retrait du RNI du gouvernement». Une déclaration qui a encore jeté de l’huile sur le feu. Pour le front des réformateurs, une telle attitude relève tout simplement de l’irresponsabilité.
Les revirements de M. Mansouri
Deux jours plus tard, coup de théâtre : Mansouri fait une seconde sortie mais, cette fois-ci, à travers une dépêche de la MAP, pour démentir catégoriquement les propos qui lui ont été attribués par la dépêche de l’AFP. «Je crois qu’il y a eu une erreur. Seul le Conseil national pourrait donner une telle orientation, pas le président. C’est quand même une décision très importante. Le président ne peut pas la prendre à lui seul», explique M. Mansouri à La Vie éco. Entre-temps, l’incident semble avoir été suffisamment pris au sérieux pour que le PAM réaffirme depuis l’opposition «sa position constante» vis-à-vis du gouvernement El Fassi et rappelle son soutien au programme gouvernemental…Une déclaration que certains observateurs ont interprétée comme étant un signal aussi bien à la majorité qu’au RNI.
S’agit-il effectivement d’une erreur de retranscription de la part du journaliste de l’AFP ? Ou bien M.Mansouri a-t-il bien tenu ces propos et a dû se rétracter pour rectifier le tir ? En tout cas, les volte-face du président du RNI deviennent de plus en plus fréquentes. C’est le cas de son accord passé le 7 octobre avec les réformateurs et qu’il a «résilié» de manière unilatérale et qui constitue aujourd’hui l’un des points auxquels s’attachent les membres du clan Mezouar.
«Il s’agit d’un contrat qui a été signé devant les membres du bureau exécutif qui l’ont agréé. Ce document précise que M. Mezouar et le comité supervisent le parti et préparent le Conseil national. M. Mansouri a rompu ce contrat de manière unilatérale et sans en référer à la structure concernée», indique ce membre du camp réformateur. Une position réitérée lundi face à un comité de réconciliation qui, depuis le 14 octobre, tente de trouver un terrain d’entente entre les deux camps.
En face, le président et les siens ne semblaient pas près de céder. En raison des engagements de M. Mansouri, également président de la Chambre des représentants, ce dernier ne devait toutefois clarifier sa position au Comité de réconciliation que mercredi après-midi. Prévue mardi soir à Skhirate, la réunion des groupes parlementaires du parti, où les représentants et les conseillers du RNI devaient se retrouver pour discuter des stratégies à adopter sous l’hémicycle, n’aura pas permis de réduire la tension.
Jusqu’où iront les deux camps dans leur confrontation
Désormais, dans la cacophonie ambiante, seule une structure semble désormais à même de départager les deux camps : le Conseil national. Véritable Parlement du parti, il était prévu depuis des années de le réunir fin 2009. Il ne reste théoriquement qu’à rassembler le comité exécutif du parti pour fixer la date exacte de la rencontre -probablement en décembre. Reste que, depuis la tentative ratée de réunir le comité exécutif du parti mercredi 14 octobre, rien ne laissait présager que l’organe en question prendrait cette décision de sitôt. Les partisans de la réforme seront-ils obligés de réunir les deux tiers des signatures des 810 membres du Conseil national pour pouvoir le convoquer sans avoir besoin du feu vert de Mustapha El Mansouri ? Ils n’auront peut-être pas besoin d’aller jusque-là. En effet, du côté du comité de réconciliation, composé d’anciens du parti comme Mohamed Boudlal, Abdelaziz Alaoui Hafidi mais aussi Mohamed Aujar, Bachir Badella ou Kheiri Belkheir, certains menacent désormais de prendre des décisions radicales si aucun terrain d’entente n’est trouvé entre les deux camps.
«Nous allons essayer de trouver une solution qui convienne aux deux parties, sinon nous allons fixer la date de la réunion du Conseil national et en déterminer l’ordre du jour. Et à ce moment-là, nous inviterons le comité exécutif à le confirmer», indique M. Bouhlal, membre du comité de réconciliation.
Mais là encore, les avis divergent quant à la marge de manœuvre du Conseil national. Du côté des réformateurs qui se mobilisent pour recueillir le soutien des membres dudit conseil, cette structure, qui a élu M. Mansouri à la tête du parti en 2007, est à même de le destituer et de lui désigner un remplaçant.
C’est ce qu’on appelle dans le jargon juridique, le principe du parallélisme des formes. En face, les partisans de Mansouri soulignent que les statuts du parti, réformés à l’occasion du IVe congrès, ne prévoyant pas de cas où le président devrait être démis de ses fonctions avant l’épuisement de son mandat, il serait nécessaire de convoquer un nouveau congrès pour introduire ces dispositions dans les statuts du parti, et, là seulement, désigner un nouveau président. Un processus qui risque de prendre quasiment autant de temps que si l’on choisissait de laisser M. Mansouri parvenir à la fin de son mandat.
Jusqu’où iront les deux camps dans leur confrontation ? Une seule chose est sûre pour le moment, la bataille promet d’être longue. Mercredi 21, en tout cas, les deux parties campaient sur leurs positions. Du côté des réformateurs, particulièrement, on tenait à expliquer que l’enjeu ne réside pas dans la destitution ou non de Mansouri mais dans la restructuration profonde du parti pour en faire un parti fort, pourquoi pas le premier aux élections 2012. Seulement voilà, bien qu’il bénéficie du soutien des anciens du parti, le mouvement souffre du fait que ses figures de proue, ministres du parti, ne sont pas tous des membres élus du comité exécutif.
En face, Mansouri reste, aux yeux de la loi, le président élu du parti. Au rythme où vont les choses, le RNI aura-t-il le temps de bien se préparer pour les législatives de 2012 ?
