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Retraite : Vivre sa deuxième vie grâce aux associations

Des structures associatives accompagnent les retraités pour leur éviter la solitude et leur permettre de tisser des liens sociaux. Certaines se concentrent sur la défense de leurs droits.

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C’est un fait, nos seniors vivent plus longtemps. Après avoir terminé leur carrière professionnelle, les retraités peuvent entamer une nouvelle phase de leur vie qui peut durer jusqu’à 25 ans. Une période durant laquelle ces hommes et ces femmes qui appartiennent à la génération du 3e âge ont besoin d’être accompagnés. Hélas, la solidarité familiale s’effrite de plus en plus, tandis que les actions étatiques sont quasi inexistantes. Alors, les associations prennent le relais. «Notre objectif est d’accompagner les retraités durant cette tranche de leur vie pour les faire sortir de la solitude et du désœuvrement en leur organisant des sorties, des voyages et surtout les outiller pour faire face aux problèmes du troisième âge», énumère Abdellatif Kassimi, ex-salarié de l’OCP et président de l’Association nationale El Ouifak des retraités du Maroc. Créée en 2010, elle compte désormais 600 membres.

Il y a «les jeunes vieux» et «les grands vieux»
Parmi la quarantaine de structures existantes au Maroc, certaines sont ouvertes aux retraités de tous les secteurs, et d’autres, en revanche, sont propres à certaines entreprises et établissements, à l’image de l’OCP, l’ONE, l’ONCF…
Si l’on dénombre plusieurs associations, on retiendra aussi l’existence de deux types de retraités : il y a ceux appelés «jeunes vieux», dont l’âge est compris entre 60 et 75 ans, qui restent plus ou moins dynamiques et sont aussi autonomes financièrement, et les «grands vieux», âgés de plus de 75ans, souvent inactifs et malades.
Haj Brahim, ancien banquier, fait partie de la première catégorie de retraités, tout en gardant un pied dans le monde professionnel. «J’ai quitté la banque il y a sept ans, mais je n’ai arrêté de travailler que durant deux années. Je suis conseiller auprès d’une entreprise dans le secteur pharmaceutique», indique ce sénior qui «refuse le statut péjoratif de retraité. Je vis une seconde vie active à mon rythme et à ma convenance». D’ailleurs, il encourage ses semblables à lui emboîter le pas. «Je suis membre de l’association ElOuifak pour rencontrer d’autres personnes, échanger et surtout les sensibiliser à l’intérêt de rester actives», lance-t-il. L’association ne veut pas, comme l’explique son président, «se positionner sur un terrain revendicatif pour les droits des retraités». Son objectif est simplement de permettre à ses membres de rester connectés à leur environnement, de les aider à faire face aux problèmes qu’ils rencontrent…
Séminaires et rencontres sont planifiés tout au long de l’année et animés par des gériatres et des psychologues. Ces spécialistes sensibilisent cette population aux problèmes de santé – physique et mentale- liés au troisième âge. «Ces rencontres sont également l’occasion de discuter de sujets tels que la nécessité de préparer sa retraite», témoigne une ancienne enseignante de mathématiques qui, depuis cinq ans maintenant, accompagne une dizaine de femmes dans la région de Settat dans le cadre d’une coopérative. «Une belle aventure que je ne regrette pas du tout. Je suis loin des chiffres et de la rigidité des programmes scolaires. Je baigne dans les saveurs et odeurs des couscous, des huiles et des épices produits par la coopérative», s’enthousiasme-t-elle en précisant que «parfois, je reviens aux mathématiques en donnant des cours de soutien aux enfants des femmes de la coopérative». Son époux, quant à lui, «veut se reposer et profiter de sa retraite».

Ils sont nombreux à compter sur la solidarité familiale !
Cet ancien professeur de physiques refuse catégoriquement de se lier ou prendre des engagements : «Je ne veux pas d’horaires fixes ni de rendez-vous. Zéro contrainte : je lis, fais du sport et, occasionnellement, donne un coup de main à des voisins pour des travaux de bricolage ou des démarches administratives pour ceux qui en ont besoin». De l’avis de plusieurs spécialistes, l’épithète «retraité» est lourd à porter «dans la mesure où les retraités n’osent plus rien entreprendre, se lamentent sur leur sort et regrettent leurs années d’activité. Plusieurs personnes viennent consulter parce qu’elles dépriment et se sentent exclues», alerte Ihsane Berrada, gériatre. Aujourd’hui, vie moderne oblige, la solidarité s’effrite et les personnes âgées en sont probablement les plus affectées. C’est bien là la raison d’être des associations œuvrant pour tisser des liens d’amitié entre les retraités à travers des actions caritatives, des sorties et voyages et soutenir des personnes malades ou rencontrant des difficultés.
Des actions qui sont programmées annuellement par les associations, chapeautées par des comités de direction qui élaborent et valident les événements à organiser. Concrètement, il s’agit d’excursions à l’intérieur du Maroc, ainsi que de voyages à l’étranger. Selon Mohamed Houmer, président de l’Association nationale des retraités des phosphates et dérivés, «ces voyages sont principalement destinés aux retraités qui n’ont pas de moyens». Les offres sont étudiées et accessibles, puisque les associations font le choix de l’agence de voyages sur la base d’un appel d’offres.

Les droits des retraités, une priorité des associations
Au-delà de ce volet récréatif, certaines associations se focalisent sur «la défense des droits des retraités. Nous discutons avec les parties concernées plusieurs dossiers liés à la situation des retraités, et en particulier tout ce qui concerne la préservation des acquis», explique Mohamed Houmer dont l’association, créée en 1999, dispose de sections régionales dans les sites phosphatiers. L’association s’est érigée en intermédiaire entre les retraités et l’OCP «pour discuter de tous les problèmes liés aux pensions, à la couverture médicale ou d’ordre administratif». C’est sur le volet défense des droits sociaux des retraités que se penche également l’association Attaka des retraités de l’ONE créée en 2014. Sous le slogan «Cette association appartient à tout le monde», la structure accompagne et soutient les retraités, leurs veuves et leurs enfants, pour le maintien de leurs divers acquis.
Un travail nécessaire pour la préservation des acquis puisque, à titre d’exemple, l’intégration des caisses internes dans le Régime collectif d’allocations de retraite (RCAR) a parfois connu – en dépit des conventions signées avec les employeurs – quelques changements qui font aujourd’hui l’objet de discussions entre cette institution et les associations.
De façon générale, les associations de retraités assurent suivre de près le contenu du projet de réforme des régimes de retraite. «La réforme est une bonne chose, cependant il y a des mesures comme la révision du taux de cotisation ou encore la fusion des caisses qui entraîneront des changements de taille pour les pensions servies aux futurs retraités», avance Mohamed Houmer. Des mesures que l’association explique, via des rencontres, à ses membres. Cela dit, si l’on se fie aux conclusions d’une étude, réalisée par un organisme bancaire de la place, près de 52% des retraités aujourd’hui comptent sur le soutien de la famille, en raison de la baisse de leurs revenus après le départ à la retraite…