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Partis politiques : Et si on parlait programmes ?

• Hormis le RNI qui est déjà bien avancé sur ce point, aucun parti n’a encore une vision claire du programme qu’il va proposer aux électeurs. Les grandes formations viennent de mettre leurs cadres sur le dossier. La plupart des formations attendront certainement d’en savoir un peu plus sur le nouveau modèle de développement pour se lancer.

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Nous sommes à moins de six mois des prochaines échéances électorales. En toute logique, nos partis auraient déjà dû commencer à parler programmes électoraux. Le terme est au pluriel parce qu’il s’agit d’un programme pour les communes, un autre pour les régions et un troisième à décliner au niveau du gouvernement. C’est dire l’ampleur du chantier qui attend encore les partis. Pas tous, évidemment. Si certaines formations, la plupart, il est permis de l’espérer, se sont déjà mises à l’œuvre, d’autres attendront certainement la dernière minute, à moins que leur priorité ne soit ailleurs. Certains «malins» attendront la diffusion en public du rapport de la Commission spéciale sur le modèle de développement pour pouvoir puiser dedans les grandes lignes de leur programme, relève un observateur de la scène politique. Et ce n’est pas nouveau. Ce n’est pas le cas bien sûr pour les partis qui se respectent et qui ont une véritable empreinte sociale. Ainsi, l’Istiqlal, par exemple, évoque, lors d’une récente sortie de son secrétaire général, son projet de société qui constitue, depuis toujours, l’ossature de ses programmes électoraux, l’égalitarisme. Mais cette fois, Nizar Baraka fait allusion à un «égalitarisme version 2021» construit autour d’une «cohésion sociétale». Et par ce terme, il fait référence à la fois à une cohésion sociale, territoriale et intergénérationnelle. Pour des mesures concrètes que le parti proposera pour ses électeurs, il faut attendre encore un peu. Des commissions dédiées planchent encore sur les différentes rubriques du programme. L’USFP vient d’entamer une tournée régionale menée par une délégation du bureau politique qui l’a conduite dans plusieurs villes. D’après ses sorties, le programme électoral du parti sera déployé autour d’un slogan central : «Pour une nouvelle alternance sociale et démocratique». Sans aller dans les détails, le parti parle d’une «alternance sociale» qui permettra de faire face au chômage, surtout le chômage des jeunes et des diplômés, de garantir le droit d’accès aux soins et le droit de vivre dignement tout en faisant du capital humain le levier principal du développement. Cela dit, pour avoir du concret il faut attendre encore un peu. Le parti a effectivement mis en place une commission chargée d’élaborer les grands axes des thématiques de son programme électoral, mais le résultat de sa réflexion n’est certainement pas pour bientôt.
Le PAM, plus terre à terre, se focalise sur des «solutions socioéconomiques à court et moyen terme». Avec la relance économique, le Maroc entame sa sortie de crise. Ce ne sera évidemment pas facile, vu les effets qui vont encore durer quelque temps. C’est pour cela que le parti a axé sa réflexion sur un programme à deux étapes. Il s’agit dans un premier temps de trouver des solutions à court (2022-23) et à moyen terme (2026) pour redémarrer l’économie du Maroc. Naturellement, dans le programme du parti, il sera question de prévoir des solutions conjoncturelles aux effets de la crise. Et comme le PAM est le premier à avoir lancé un débat public sur la légalisation de la culture du cannabis à des fins industrielles et pharmaceutiques, il ne manquera pas d’intégrer cette donne dans son programme, notamment dans sa déclinaison locale et régionale spécifique aux régions du Nord.
Il y a deux ans le RNI avait réalisé un sondage d’opinion. Une peu plus d’une dizaine de milliers de ses militants et cadres et des citoyens (14 000 personnes en réalité) issus de toutes les régions avaient été invités à s’exprimer sur les priorités auxquelles le parti devrait s’atteler en premier. La santé, l’enseignement et la lutte contre le chômage étaient en tête. Une année plus tard, le même RNI a décidé d’organiser la plus vaste campagne de communication politique jamais réalisée par un parti «100 jours 100 villes». Plus de 35 000 personnes y ont participé. Ils ont estimé qu’à la tête des chantiers sur lesquels les pouvoirs publics devraient plancher figurent la santé, l’enseignement et la lutte contre le chômage. On notera que ce sont les mêmes priorités retenues par l’USFP dans le cadre de l’alternance sociale qu’il propose. L’égalitarisme de l’Istiqlal fait également référence à ces trois priorités.
Pour justifier cette option, le SG du parti évoque une «convergence globale sur un tronc commun des priorités». Lesquelles priorités constituent la base de la social-démocratie, un positionnement politique et idéologique adopté officiellement par le RNI en février 2018. Il y a trois ans, le parti avait annoncé une offre politique «réaliste» et chiffrée, déclinée dans «la voie de la confiance», à déployer jusqu’en 2025. Contrairement à toutes les autres formations politiques, en matière de programme électoral, on peut dire que le RNI s’y est mis très tôt. Et ce n’est pas le seul point qui le distingue de ses congénères, notamment ceux représentés au Parlement. En effet, au lieu de confier cette tâche à une commission dédiée, un collectif d’économistes ou de cadres membres du parti, il est allé, lui, chez les premiers intéressés, les citoyens. Le parti les a invités à exprimer leurs priorités, leurs attentes et aussi leurs propositions. Cette montée d’information lui a servi pour élaborer un programme électoral qui répond exactement aux attentes des citoyens. Pour le reste, il suffit de faire quelques arbitrages et des modélisations pour perfectionner les thématiques du programme et élaborer ses perspectives macroéconomiques.
Pour le PJD, bien que l’on soutienne qu’une équipe de cadres planche sur ce qui sera son programme électoral, il semblerait que ce n’est pas encore une priorité. Le parti a fait bataille, et continue, pour le quotient électoral. Il a mobilisé toutes ses troupes dans ce but et a fait l’impossible pour paraître encore une fois dans le rôle de la victime ou le parti que tout le monde combat. Sauf que, cette fois, les autres formations ont bien lu dans son jeu et ne l’ont pas suivi. Sur ce point, ils ont préféré laisser les institutions faire leur travail. Et c’est la Cour constitutionnelle qui va trancher. En toute logique, celle-ci devrait se prononcer dans les jours qui viennent, le délai de 30 jours fixé par la Constitution expire bientôt. L’autre priorité du parti est, pour le moment, de revoir la manière de désigner ses candidats. C’est d’ailleurs l’objet d’une session de son conseil national prévue ce week-end. L’enjeu est de taille, puisque les partisans du «Non à deux mandats» viennent de donner, encore une fois, de la voix. Pour eux, tous ceux qui ont fait deux mandats parlementaires doivent se retirer et laisser la place aux autres. En plus, ils exigent que le principe du plafonnement à deux des mandats électifs soit inscrit dans les statuts du parti.
Cela dit, même pour ceux qui sont déjà bien avancés dans leur programme, aucun parti ne pourra faire l’impasse sur les chantiers déjà engagés, et qui font d’ailleurs l’unanimité. La relance économique, la protection sociale et médicale universelle et la réduction des disparités sociales et territoriales, entre autres.