Pouvoirs
Parlement : Au boulot, en attendant l’ouverture de la prochaine session !
Les parlementaires ont écourté leurs vacances pour reprendre le travail en commission. Plusieurs textes de lois doivent être prêts pour le vote juste après l’ouverture de la session d’octobre.

La session parlementaire d’automne, et donc la nouvelle année législative, s’ouvre le deuxième vendredi d’octobre. C’est une constante constitutionnelle. Mais rien n’empêche que les parlementaires reprennent du travail bien avant. «La Commission des fiinances aurait pu attendre le démarrage de l’année législative et l’ouverture officielle de la session d’automne pour reprendre ses travaux. Mais nous avons préféré nous remettre le plus tôt à l’œuvre pour étudier les projets de lois qui nous sont soumis», explique Mohamed Chaouki, président de la Commision des finances à la Chambre de représentants. Ce n’est pas fréquent, mais c’est le cas cette année. Deux commissions ont, en effet, repris leurs activités depuis un peu plus d’une semaine. Cela rentre dans le cadre de la coopération entre les pouvoirs législatif et exécutif. En d’autres termes, pour pouvoir mettre en marche sans plus attendre deux réformes profondes, la santé et l’investissement, il faut que le cadre juridique y afférent soit pleinement déployé.
Etre à temps
Pour ce qui est de la réforme de l’investissement, deux projets de lois sont simultanément en cours d’étude en commission. Pour être à temps pour un vote en plénière pouvant intervenir avant le démarrage des débats du projet de Loi de finances, ou en tout cas avant la fin de l’année, la Commission des finances à la première Chambre a repris du travail un peu plus tôt cette année. La reprise du débat général du projet de loi-cadre 03-22 portant nouvelle Charte de l’investissement a eu lieu le 13 septembre. Le lendemain, la commission avait déjà bien avancé dans l’examen détaillé de ce texte. Cette partie du processus va sans doute être bouclée lors de la réunion du 27 septembre. Selon le calendrier qui vient d’être annoncé par la Chambre, ce texte sera voté en commission le 5 octobre. Entre-temps, et cela devrait sans doute accélérer davantage le processus d’adoption de ce texte, les groupes de la majorité au sein de la même Chambre ont organisé, mardi 20 septembre, une journée d’étude consacrée justement à ce projet de loi-cadre. En parallèle, la même commission a entamé l’examen du projet de loi 96-21. Ce texte présenté devant la commission le 20 septembre, est relatif, rappelons-le, aux sociétés anonymes, il édicte les dispositions transitoires relatives à la conversion des actions au porteur en actions nominatives. En gros, ce projet de loi découle de l’engagement du Maroc à s’aligner sur les normes internationales, notamment celles relatives à l’échange de renseignements et l’identification des actionnaires au porteur ainsi que d’assurer la transparence des participations et de lutter contre le blanchiment d’argent et l’évasion fiscale. Pour avoir une idée de ce que ce texte représente, il a été adopté le 23 juin dernier en Conseil de gouvernement. Nous sommes donc devant l’un des rares cas où les deux pouvoirs adoptent une procédure accélérée pour faire aboutir un texte de loi.
On peut en dire autant pour le projet de loi-cadre 06-22 portant réforme du système de la santé. Son processus d’adoption suit également une cadence relativement accélérée. Adopté en Conseil des ministres le 13 juillet, il a été présenté par le ministre de tutelle devant la deuxième Chambre le 3 août. Aujourd’hui le débat général et l’examen détaillé du texte ont été bouclés. Plus encore, et c’est plutôt un cas rare, inédit même, nous avons d’ailleurs eu l’occasion de le préciser, en élaborant ce texte le gouvernement a entrepris en même temps de préparer ses décrets d’application. Nous le savons tous, sans décrets d’application des lois peuvent rester lettres mortes même après avoir parcouru tout le circuit législatif. Ce qui parfois, surtout quand ce n’est pas justifié, risque d’avoir des conséquences très fâcheuses.
Nous en vivons d’ailleurs un exemple. Selon certaines sources proches du dossier, si le gouvernement de tutelle avait préparé et adopté à temps les décrets d’application de la loi 36-15 relative à l’eau, promulguée en août 2016, «on aurait certainement pu faire face de manière moins contraignante à la pénurie en eau». Selon les mêmes sources «à cause d’un différend entre le ministère de tutelle (PJD) et la ministre déléguée chargée de l’eau (PPS) certains décrets, pourtant préparés, n’ont jamais vu le jour».
Délai pour les décrets
Rappelons aussi que c’est une vieille revendication de l’opposition. Aujourd’hui même, parmi les propositions de loi déposées par l’USFP à la première Chambre il y en a une qui porte amendement de la loi organique 065-13 relative à l’organisation et à la conduite des travaux du gouvernement et au statut de ses membres. Ce texte, déposé en décembre dernier, a pour objectif de contraindre, légalement, le gouvernement à publier systématiquement les décrets d’application des lois que le Parlement aura adoptées après un délai, qui sera fixé et connu, après leur promulgation. Il faut dire que l’article 19 de cette loi organique impose déjà au gouvernement de faire accompagner, «à chaque fois que la situation le dicte», les projets de loi par leurs textes d’application.
Bref, dans ce cas précis ce problème ne sera pas posé. Le challenge que s’est fixé le gouvernement est en effet d’achever le chantier de la généralisation de l’AMO avant la fin de l’année. Et cela dépend, en partie, de l’entrée en vigueur de la loi-cadre 06-22.
En parallèle, d’autres commissions ont repris leur agenda habituel, sans forcément attendre l’ouverture de la session parlementaire et de l’année législative. La commission de l’intérieur a entamé, jeudi 22 septembre, l’examen du projet de loi 86-21 relatif aux armes à feu, leurs pièces, composantes, éléments, accessoires et munitions. C’est le préalable, faut-il le souligner, pour l’émergence projetée d’une industrie d’armement dans notre pays. Par ailleurs, la commission des secteurs productifs reprend, elle aussi, à compter de mercredi prochain, le débat du projet de loi 102-21 relatif aux zones industrielles. C’est un texte qui est censé régler définitivement la problématique du foncier industriel. Il fait ainsi partie de l’arsenal relatif au cadre juridique de l’investissement.
Production législative, le gouvernement et l’opposition
Bien mitigé. A en croire l’opposition, le rendement du gouvernement en termes de production de loi est pour le moins médiocre. Un groupe parlementaire de l’opposition estime, par exemple, que la majorité des textes de loi adoptés lors de la première année législative est héritée du gouvernement précédent. Plus encore, «sur les 32 projets de lois adoptés, on compte pas moins de 14 conventions et traités internationaux», estime le groupe parlementaire du parti. En même temps, toutes les propositions de loi qu’il a présentées, soit 17 au total, ont été rejetées par le gouvernement. Il ne peut en être autrement, puisque c’est là un discours de l’opposition. Le tableau n’est pas du tout aussi noir si l’on s’en tient au bilan de l’action gouvernementale tel qu’il a été rendu public au terme de la réunion, le 8 septembre, du Conseil de gouvernement.
Ainsi, l’Exécutif souligne que 30 textes de lois exactement ont été adoptés lors de cette première année législative. Parmi ces textes figurent deux propositions de loi. Pendant cette première année de son mandat, le gouvernement a tenu à activer l’article 23 de la loi 065-13 selon lequel l’Exécutif tient une réunion, chaque mois, pour examiner et statuer sur les propositions de lois des parlementaires. Neuf réunions ont été tenues dans ce sens et le gouvernement s’exprime sur un total de 99 textes de loi déposés par les parlementaires. Par ailleurs, le Chef du gouvernement s’est déplacé sept fois au Parlement pour répondre aux questions de politiques générales posées par les membres des deux Chambres. Il a ainsi répondu à 56 questions portant sur 7 thématiques. Les membres du gouvernement ont répondu, de leur part, à pas moins de 4036 questions écrites et 1 064 questions orales.
