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Pouvoirs

PADS, une parenthèse de 40 ans de contestation

La récente transformation officielle de la FGD en parti politique sonne comme le clap de fin pour le parti d’avant-garde socialiste démocratique.

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À lui seul le PADS symbolise le parcours cahoteux de la gauche dans notre pays. Né dans la contestation, il disparaît dans presque les mêmes conditions. Dans la contestation.
Entre les deux moments, ce sont quarante ans qui se sont écoulés, au cours desquels ce petit parti est passé de la gauche révolutionnaire, puis à l’extrême gauche et plus tard à la gauche tout court ou la gauche institutionnelle par sa participation aux élections de 2007. Et il finit en fusionnant avec d’autres formations dans la constitution de la nouvelle Fédération de la gauche démocratique (FGD). Une fin contestée donc par une partie de ses militants. Cette contestation a été portée devant la justice par l’ancienne dirigeante Hakima Chaoui. C’est le tribunal de première instance de Rabat qui devrait statuer sur ce recours. Les anti-intégration dans la FGD, qui contestent justement ce qu’ils qualifient d’une «intégration forcée», espèrent un improbable jugement en leur faveur pour maintenir sous perfusion, encore pour encore quelque temps, le PADS ou «l’USFP-Commission administrative», selon l’ancienne appellation qu’il avait pris lors de sa scission de l’USFP en 1983. Le parti dépend déjà pour plus de 90% de ses ressources financières des aides publiques (91% selon le dernier rapport de la Cour des comptes qui porte sur l’année 2020). Pour Ali Boutouala, troisième et dernier secrétaire général de l’histoire du parti et le reste des militants, cette décision est on ne peut plus «légitime. Elle a été votée à la majorité lors d’un congrès extraordinaire». De ce fait, le parti cesse d’exister et ses militants vont rejoindre une partie de leurs anciens camarades de l’USFP qui, eux aussi, sont partis, en 2002, former le Conseil national Ittihadi (CNI). Ils rejoignent également d’anciens membres de ce même USFP, dont certains avaient quitté le navire à la même date et se font appeler Alternative progressiste. Tout ce monde se retrouve aujourd’hui sous le même toit, celui de la FGD. Voilà en gros un pan de l’ancienne Commission administrative de l’USFP, le plus haut organe décisionnel du parti, qui, avec une partie du Conseil national, son successeur, et des anciens membres de la jeunesse qui forment aujourd’hui l’ossature d’une nouvelle formation, la FGD.

Un sort unique
C’est donc en 1983 que feu Ahmed Benjelloun et Aberrahmane Benameur, tous les deux avocats de carrière, ont décidé de claquer la porte de l’USFP après un épisode douloureux qui s’est déroulé à l’ancien siège à Rabat-Agdal. L’histoire nous apprend que pour leur toute première session, depuis le congrès de 1978, le Comité central et la Commission administrative nationale se sont réunis en mai 1983 pour prendre la décision de la participation aux élections communales. L’USFP venait de sortir perdant dans le bras de fer avec la monarchie que feu HassanII avait tranché en usant de ses pouvoirs extraconstitutionnels d’Amir Al Mouminine. C’est dans ce contexte que la question de la participation aux élections communales du 10 juin 1983 divisait le parti. C’est pour cela aussi que les partisans de «l’option révolutionnaire», qui se comptaient parmi les membres de ces deux organes, n’ont pas été invités à cette session. Ces derniers, ayant afflué des quatre coins du Royaume, ont décidé quand même de s’inviter aux travaux des deux réunions. Ce qui leur a été refusé par la force. Et ce sont principalement des membres de la jeunesse, dirigée alors par un certain Driss Lachguar, qui se sont chargés de cette mission. C’est à cette date également que l’étoile d’un autre dirigeant, Abdelhadi Khayrate, a commencé à monter. Bref, la suite est connue, siège, confrontations, procès et condamnations. Cet épisode clos, les dissidents ont décidé de se regrouper, sous la coordination de feu Ahmed Benjelloun, dans une structure politique, l’USFP-Commission administrative nationale. Révolutionnaires dans l’âme et adeptes du socialisme scientifique, les membres de ce qui allait devenir, en 1991, le PADS avec le même Ahmed Benjelloun comme secrétaire général, l’ont resté jusqu’en 2007. Après avoir boycotté toutes les élections depuis sa création, le parti a décidé de participer à ces législatives sous les couleurs de l’Alliance de la gauche démocratique (AGD). Avant cette date, ses membres, parmi lesquels on comptait jusqu’à une date relativement récente l’actuel ministre de la Justice et SG du PAM, Abdellatif Ouahbi, mais aussi l’ancien secrétaire général du Conseil national des droits de l’homme (CNDH), Mohammed Sebbar, entre autres figures de proue, s’activaient dans des organisations de la société civile, principalement l’AMDH et les différentes associations des avocats et au sein de la CDT. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts…

Le jour où tout a commencé, selon le PADS

Le Bureau politique a convoqué, secrètement, une réunion de la Commission administrative nationale (CAN), en prenant le soin de ne pas prévenir un grand nombre de ses membres. Le lendemain, 8 mai 1983, il a convoqué le Comité central selon le même procédé, en l’absence des membres véritables de cette instance, à savoir des membres de la Commission administrative, des représentants des Fédérations et de la Jeunesse du parti, ainsi que des membres des autres commissions qui composent le Comité central. Dès que les autres membres du Comité central ont eu vent de cette convocation, ils ont accouru de toutes les régions du pays pour assister à la réunion qui devait se tenir au siège du parti à Rabat-Agdal. Mais lorsque des membres de la CAN et des militants du parti se présentèrent devant l’entrée du local, l’accès leur en a été interdit par un groupe d’éléments armés de gourdins. Arrive alors sur les lieux le président du groupe parlementaire USFP, accompagné d’un responsable de la Sûreté régionale, des forces de police et du gouverneur de Rabat-Salé en personne à la tête de tout ce cortège.
Les membres de la CAN et les représentants des Fédérations renouvellent, une fois encore, leur désir de participer à la réunion du Comité central. A ce moment précis, les forces de police interviennent. Ils ont procédé à un certain nombre d’arrestations, dont Mohamed Bougrine, Abderrahmane Benameur, Ahmed Izzi, Lyazid Barakat, Hamid Souidi… Après quoi, la réunion du Bureau politique s’est enfin tenue sous la protection des autorités.