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Pouvoirs

L’USFP en quête de positionnement

Le parti ne sait plus sur quel pied danser. Il est certes dans l’opposition, mais opte pour un «soutien critique». Difficile en effet de se dire socio-démocrate et s’opposer au choix de l’État social.

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Est bien malin celui qui pourra définir aujourd’hui avec exactitude la position de l’USFP par rapport au gouvernement. Dans la littérature du parti, on reprend un terme bien ancien qui date d’ailleurs du premier gouvernement d’alternance mais qui n’est pas le sien: le «soutien critique».
«Il ne faut pas se faire d’illusion. En l’état actuel des choses, l’USFP ne peut pas se permettre de faire de l’opposition franche. Ce serait suicidaire politiquement de s’opposer aux politiques sociales du gouvernement, alors qu’on a toujours appelé à l’instauration d’un Etat social», commente ce membre du bureau politique. Comment, en effet, faire de l’opposition à une politique de généralisation de la protection sanitaire et sociale, comment s’opposer à ses décisions d’augmentation des salaires et de préservation du pouvoir d’achat, laisse entendre notre source. Cela d’autant plus que «plusieurs mesures qui font partie du programme gouvernemental, nous les avons également dans notre programme électoral. Il y a des actions et des décisions auxquelles nous ne pouvons pas nous opposer. Leur mise en œuvre peut certes être discutable, mais ça s’arrête là », affirme le dirigeant usfpéiste. «Il n’est pas question aujourd’hui de sortir de ce consensus national, de cette mobilisation créée par la prestation de l’équipe nationale au Qatar. Nous n’avons pas l’intention de briser cet élan nation», insiste notre source. Il n’en continue pas moins de se chercher une position. Il ne veut pas trop verser dans la critique populiste du gouvernement, parce que ce n’est plus politiquement rentable et il ne souhaite pas non plus trop s’aligner sur les positions gouvernementales.

OPPOSITION, MAIS…
De mauvaises langues diront que le parti se positionne déjà en perspective d’un éventuel remaniement gouvernemental. Dans cette logique, on estime que l’Exécutif a pris, depuis qu’il a été investi, de très importantes décisions et mis en place des mesures révolutionnaires, mais malheureusement il n’a pas su assez les «vendre» du point de vue politique. Et c’est justement sur ce registre que l’on pourrait inscrire l’apport de l’USFP si, éventuellement, il était invité à rejoindre la majorité. «Nous avons fait le choix politique au sein du Conseil national d’aller à l’opposition. Vous savez sans doute comment cela se passe. Mais aujourd’hui si le besoin s’en fait sentir et si l’USFP est invité à rejoindre le gouvernement, nous allons dire oui», affirme notre source.
De toutes les manières, l’USFP qui a été virulent au début contre le trio des partis de la majorité, les accusant même de mainmise sur les institutions politiques depuis le Parlement jusqu’aux communes les plus éloignées, a même tenté, le temps du débat d’un projet de statut de la première Chambre, un front commun avec les autres formations de l’opposition. Le projet a capoté et, à l’occasion des débats du PLF 23, l’USFP, avec 35 sièges, a déposé ses propres amendements en solo. Bref, au fil des mois, le discours de l’USFP se fait moins virulent.

au bord de la crise cardiaque
Au point où ce sont des formations jusque-là insoupçonnées qui donnent aujourd’hui de la voix au Parlement. Et même lors du débat du PLF, un moment fort de l’année, le parti s’est fait voler la vedette par des avocats, des médecins et autres corporations de professions libérales. L’USFP aurait-il souffert de la perte de beaucoup de ses cadres et ses élites, économistes, universitaires,… qui ont quitté le navire durant ces dix dernières années. Certainement. Le parti a cessé d’être ce qu’il était. C’est d’ailleurs l’ancien premier secrétaire Abdelwahed Radi, actuellement député, qui l’avait lancé un jour, «l’USFP est au bord de la crise cardiaque». Les grands départs l’ont affaibli au fil des années. On le sait, le groupe de Mohamed Sassi, aujourd’hui dans la FDG, et la CDT qui a créé son propre parti, les amis d’Abdelkarim Benatiq qui ont lancé le Parti travailliste, ceux de feu Abdelmajid Bouzoubaa et le Parti socialiste, plus récemment, les amis de feu Ahmed Zaidi et Ali Elyazghi. Ce dernier a tenté, sans vraiment y parvenir, de se constituer une nouvelle formation politique. Entre-temps, l’USFP a commencé à se reprendre, le Parti Socialiste et le PT ont fini par le réintégrer.
Aujourd’hui, sur le plan organisationnel, c’est un parti solide. Il a même pris du poids, cette fois sur le plan électoral, lors du dernier scrutin du 8 septembre, devenant, avec 15 sièges de plus qu’auparavant, la première force de l’opposition. Mais son plus grand faire-valoir, ce sont ses relations internationales demeurées, elles, relativement intactes.

socialiste, une fenêtre sur le monde

Il s’agit d’une fédération ou un groupement de 130 partis socialistes et socio-démocrates de par le monde, dont le présidium est composé de représentants des continents. Lors du dernier congrès, l’Espagne a été portée à la tête de l’organisation et le Maroc, à travers l’USFP, assume l’une des huit vice-présidences. L’USFP fait partie de 40 partis africains membres de l’IS. Pour le Maroc, c’est une tribune pour défendre son image et sa réputation. A cause du conflit artificiel autour du Sahara, le Royaume subit de multiples attaques à l’international plus ou moins virulentes selon les périodes. Un groupement de partis, comme l’IS, dont certains membres sont au gouvernement dans leur pays et d’autres dans l’opposition. En Afrique et en Amérique latine les socio-démocrates sont d’ailleurs majoritaires dans les gouvernements. Et actuellement, on assiste au retour des socio-démocrates dans plusieurs pays d’Europe, les pays nordiques, l’Allemagne, l’Espagne, le Portugal…, des pays qui sont des interlocuteurs privilégiés du Maroc. L’importance de faire partie au haut niveau de cette instance, c’est justement de porter plus haut la voix du Royaume, de faire en sorte qu’elle soit entendue. Il s’agit aussi de clarifier la situation réelle et faire face à la propagande. Ce n’est pas facile, surtout dans certaines instances de cette organisation.