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Pouvoirs

Loi de finances 2009 : le PJD cumule les amendements

Les députés du tandem MP-UC ont présenté 51 amendements. Seuls 9 ont été retenus, contre 12 sur plus de 105 pour le PJD.
Le PJD dénonce l’usage jugé abusif de l’article 51 par le gouvernement.
La majorité plus chanceuse : elle a pu faire passer 15 de ses 19 propositions d’amendements.

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C’est fait. Vendredi 21 novembre, la Loi de finances version 2009 passait enfin le cap de la Chambre des représentants. Voté tard dans la soirée du jeudi 20 novembre, à 49 voix pour et 36 contre pour la première partie, 63 voix pour et 30 contre pour la deuxième, le texte peut enfin être remis à la Chambre des conseillers. Présenté le 22 octobre dernier aux parlementaires, le document a nécessité une soixantaine d’heures de travail au niveau de la commission des finances, réparties en vingt séances. Un travail auquel viennent s’ajouter les négociations dans le cadre des rencontres de concertation organisées entre les composantes de la majorité et celles de l’opposition. Toutefois, à quelques mois seulement des élections communales du 12 juin, le temps presse. A peine achevé ce chantier, les représentants retroussaient de nouveau leurs manches, pour voter, mardi 25 novembre, en commission de l’intérieur, un autre texte clé : le code électoral. Pourtant, il n’est pas si sûr que le dossier de la Loi de finances soit tout à fait clos au niveau de la Chambre des représentants. «Nous allons essayer de présenter un recours auprès du Conseil constitutionnel, car certaines réponses du gouvernement et des alinéas du projet de loi ne sont pas constitutionnels», indique Najib Boulif, membre du groupe parlementaire PJD. A l’origine de ce geste, la référence, dans le projet de loi, à un passage du projet de code de la route, toujours à l’étude au niveau de la commission de l’intérieur, explique le député de Tanger. De même, son parti entend protester contre l’usage, jugé abusif, de l’article 51 de la Constitution et qui aurait été utilisé pour rejeter des propositions d’amendements sans justification «objective et scientifique», souligne-t-il.
Ce dernier souligne, par ailleurs, que son parti, qui a voté contre le projet de Loi de finances, est insatisfait du nombre d’amendements PJD retenus dans le nouveau texte. «Ce n’est même pas 10% des amendements sur lesquels nous avons travaillé toute une année», s’étonne Najib Boulif, qui rappelle que sa formation en a présenté plus de 105, cette année. Pourtant, dans ce domaine, le tableau de chasse du parti de Abdelilah Benkirane est plutôt décent comparé à celui de la concurrence. En effet, des 15 amendements de l’opposition intégrés dans le nouveau texte, une douzaine a été proposée par le parti islamiste, soit presque autant que l’alliance gouvernementale, qui a vu 15 de ses 19 propositions validées.

Une opposition bicéphale
En face, le duo Mouvement populaire – Union constitutionnelle, qui a émis 51 propositions d’amendement, semble avoir été moins chanceux puisque seuls 9 en ont été retenus.
La nouveauté de cette année est que les deux partis MP-UC et le PJD semble avoir été moins poussée que l’année dernière, dans le cadre de la préparation de la Loi de finances 2008 : cette année, les trois partis n’ont pas présenté d’amendements communs. En revanche, leurs demandes ont été similaires. «Nous avons présenté des amendements conjoints avec l’UC. Avec le PJD, nous ne l’avons pas fait, mais nous avons voté aussi bien les nôtres que les leurs, chaque fois qu’ils avaient le même objet», explique Mohand Laenser, secrétaire général du MP. «En tant que partis de l’opposition, nous nous concertons, nous discutons beaucoup. Si nous ne sommes pas allés jusqu’aux amendements communs, c’était un peu pour ne pas se gêner mutuellement», ajoute-t-il, en référence à des «amendements à connotation religieuse». Qu’à cela ne tienne, les trois partis ont bien coopéré entre eux, même s’ils ont tenu à rendre copie séparément, histoire de ne pas avoir à homogénéiser leurs propositions sur toute la ligne.
Pendant ce temps, l’alliance gouvernementale a tenu à présenter un pack unique de propositions, qui, sans surprise, comprend celles du tout récent groupe parlementaire Rassemblement et modernité. «Nous avons apporté nos amendements et nous les avons traités avec les autres groupes de la majorité. Notre groupe a accepté de retirer ceux qui n’ont pas eu la faveur de l’ensemble de la majorité et en a gardé d’autres», explique My Abdelaziz Alaoui Hafidi, président du groupe PAM-RNI.
De même, contrairement à l’année dernière, où, au nom du soutien critique, l’USFP avait présenté des amendements spécifiques, bien que faisant partie de la majorité, l’USFP ne fera pas bande à part pour la Loi de finances 2009. «Pour le moment, nous avons présenté un nombre important d’amendements dans le cadre de la majorité», explique Ahmed Zaïdi, président du groupe parlementaire USFP. Bien entendu, cinq à six réunions auraient été nécessaires aux partis concernés pour accorder leurs violons. Et comme le duo PAM-RNI, l’USFP y aura vu certaines de ses propositions élaguées au passage.
Le ministère des finances a toutefois promis de prendre certaines d’entre elles en compte pour sa prochaine Loi de finances, notamment celles concernant les PME-PMI, explique Saloua Belkeziz Karkri, députée USFP et ex-présidente de l’Association de femmes chefs d’entreprises.

Consensus pour le code électoral
Ainsi, le traitement de la Loi de finances aura entraîné l’apparition d’une ligne de démarcation bien claire entre les partis de la majorité et ceux de l’opposition. Cette tendance sera-t-elle toujours observable pour les autres textes clés que le Parlement devrait bientôt traiter ? A l’heure où nous mettions sous presse (mercredi 26 novembre), cela semblait déjà être le cas pour le Code électoral. Pourtant, alors que du côté du duo PAM-RNI et de l’USFP rien ne laissait entendre que des composantes de la majorité souhaitaient se séparer de cette dernière dans le cadre de cette loi, du côté de l’opposition, le Mouvement populaire et l’UC écartaient l’idée d’une coopération plus poussée avec le PJD, du moins pour le moment. Une position que certains observateurs expliquent par le fait que les deux partis, en l’occurrence le MP et l’UC, caressent toujours l’espoir de voir émerger un quatuor MP, UC, PAM, RNI. Les concertations puis le vote du nouveau code électoral pourraient être l’occasion idéale pour rapprocher les deux blocs. Quand il s’agit de lois qui hypothèquent l’avenir, les partis peuvent plus facilement regrouper leurs forces par-dessus la barrière existante entre opposition et majorité, expliquait Mohamed Abied, secrétaire général de l’UC. «On peut se retrouver bien sûr, puisque le code électoral est l’un des textes qui se prête le mieux à une espèce de consensus. Je prends par exemple la question de la représentation des femmes, les seuils : il est bien évident que ce sont des questions qui gagneraient plus de force, de légitimité à être des propositions de consensus plutôt que des propositions de majorité/opposition», explique M. Laenser qui écarte, toutefois, la possibilité de voir les deux groupes présenter des amendements en commun. Consensus, concertations positives, mais les choses s’arrêteront là, du moins pour l’instant.
En attendant un écho du côté du PAM et du RNI, son parti et celui de Mohamed Abied continuent de renforcer leur coopération. Pendant ce temps, le PJD semble en passe de se retrouver à nouveau isolé, du moins le temps que la loi passe. En effet si la coordination est toujours bienvenue pour les textes économiques, pour ceux à forte connotation politique, comme la loi électorale, les choses se compliquent.