Pouvoirs
Faut-il changer le mode de scrutin au Maroc ?
Scrutin à deux tours, élection directe, élévation du seuil d’éligibilité des partis : trois pistes pour stabiliser les majorités.

«Pourquoi ne pas séparer l’élection du maire de celle du Conseil de la ville ?», propose, de prime abord, le professeur Hassan Chahdi Ouazzani. «Actuellement, explique-t-il, ce sont les membres du conseil qui élisent le maire. Si ce dernier était élu au suffrage direct, il tirerait son autorité des électeurs et le conseil n’aurait plus d’emprise sur lui». Le maire peut, à ce moment, imposer sa propre politique et choisir l’équipe avec qui il peut travailler. «Nous ne sommes pas dans un régime présidentiel. Ce système est à écarter», rétorque Kamal Dissaoui, conseiller USFP de Casablanca. Ce dernier propose, et c’est d’ailleurs la solution préconisée par l’USFP, de considérer toute la ville comme une seule circonscription. Comme pour les législatives, chaque parti présente sa propre liste de candidats et son programme électoral. Avec un seuil adéquat, on pourrait déboucher sur un conseil formé de quatre ou cinq partis. «En s’organisant en pôle on pourrait aboutir à deux blocs, l’un aux commandes et l’autre dans l’opposition». D’ailleurs, explique-t-il, dans le système français «Lyon-Marseille-Paris, pris comme modèle, les élections sont organisées en deux tours. Au deuxième tour, il forment automatiquement deux blocs». Bref, conclut-il, «ce qu’il nous faut, c’est dégager une majorité stable. Mais il semble que ce n’est pas ce qui est voulu».
Omar Hejira, le député d’Oujda, bien qu’en se prononçant lui aussi pour une refonte du système électoral, estime que le mode de scrutin à deux tours ne convient pas à la réalité marocaine. «Le taux de participation est trop faible et personne ne viendra voter au second tour», argue-t-il. Pour lui, il faut d’abord commencer par faire le ménage dans le champ politique.
«Il n’y a aucune raison que des partis n’ayant pas recueilli 1% des voix participent aux élections. Il faut les contraindre à se rassembler», propose-t-il. Avec un seuil assez élevé, estime le député d’Oujda, on arrivera à faire porter un nombre raisonnable de partis à la gestion de nos villes. «D’ailleurs, renchérit-il, l’actuel Parlement nous donne une idée sur la réalité du paysage politique. Il existe huit grands partis. Pour le reste, les parlementaires on été élus à titre personnel, plutôt que comme représentants de partis politiques. 17 députés sur 395 rentrent dans cette catégorie».
Pour revenir à l’origine, le système Paris-Marseille-Lyon, ces trois villes sont divisées en arrondissements, chacun doté d’un conseil d’arrondissement élu au suffrage universel direct.
Ainsi, l’électeur désigne par un seul et même vote les membres du conseil municipal de la ville et ceux du conseil d’arrondissement et le maire est élu par les conseillers municipaux. A cela s’ajoute un mode de scrutin majoritaire à deux tours qui permet de former une majorité stable.
Le régime de l’unité de la ville en vigueur à Casablanca, Rabat, Salé, Marrakech, Fès et Tanger reprend le schéma mais pas l’esprit. Les conseils d’arrondissement sont élus au suffrage direct. Et là s’arrête le rôle du citoyen, puisque ce sont les conseillers d’arrondissement qui élisent les membres du Conseil de la ville qui, à leur tour, élisent le maire et son bureau.
