Pouvoirs
Bonne gouvernance, probité, transparence et reddition des comptes
Une dizaine d’institutions, autorités et conseils ont été institués. Leur mission, veiller sur la bonne gouvernance, l’égalité des chances et l’équité sociale. La corrélation entre responsabilité et reddition des comptes trouve toute sa force dans le nouveau texte.
Le principe de bonne gouvernance et de la corrélation entre responsabilité et reddition des comptes est définitivement inscrit dans le projet de nouvelle Constitution, dans son article premier, plus précisément. «Le constituant est sorti de son mutisme pour institutionnaliser cette question et instaurer des règles et des instances de régulation», observe le constitutionnaliste Younes Berrada.
De prime abord, on retient, note-t-il, que le service public a, d’ores et déjà, des normes, la citoyenneté en tête. Une volonté officielle de rompre avec «la politique du bricolage» en vogue. Une sorte de responsabilisation ayant pour toile de fond «les principes de respect de la loi, de neutralité, de transparence, de probité, et d’intérêt général» (art. 155).
Le projet de texte institue le principe de déclaration de patrimoine et lui consacre tout un article. L’on se rappelle l’adoption et la mise en œuvre, il y a moins de deux ans, d’une loi sur la déclaration de patrimoine qui été à l’origine de joutes mémorables sous la coupole du Parlement. Aujourd’hui, c’est un principe consacré par la Constitution. De ce fait, «toute personne, élue ou désignée, exerçant une charge publique, doit établir, conformément aux modalités fixées par la loi, une déclaration écrite des biens et actifs détenus par elle, directement ou indirectement, dès la prise de fonction, en cours d’activité et à la cessation de celle-ci», stipule l’article 158.
La Cour des comptes veillera au grain et s’assurera du suivi de cette déclaration de patrimoine (art.147). Cette institution voit globalement sa mission précisée. Elle veille entre autres, selon le même article, à la protection des principes et valeurs de la bonne gouvernance, de transparence et de reddition des comptes de l’Etat et des organismes publics. Le texte suprême garantit un service public aux normes de qualité, de transparence, de reddition des comptes et de la responsabilité. Un service organisé sur la base de la continuité des prestations. Principe, faut-il le souligner, que les nombreuses grèves qu’ont connues pratiquement toutes les administrations ces derniers mois viennent mettre à rude épreuve.
Des rapports annuels objet de débat public
Bonne gouvernance et transparence riment également avec la fin de l’économie de rente. Là encore le constituant a tenu à imposer des garde-fous pour parer à tout dérapage. Le crime financier fait ainsi son entrée pour la première fois dans le texte suprême. En effet, «le trafic d’influence et de privilèges, l’abus de position dominante et de monopole, et toutes les autres pratiques contraires aux principes de la concurrence libre et loyale dans les relations économiques, sont sanctionnés par la loi», stipule l’article 36. Le même article précise que «les infractions relatives aux conflits d’intérêts, aux délits d’initié et toute infraction d’ordre financier sont sanctionnées par la loi. Les pouvoirs publics sont tenus de prévenir et réprimer, conformément à la loi, toute forme de délinquance liée à l’activité des administrations et des organismes publics, à l’usage des fonds dont ils disposent, à la passation et à la gestion des marchés publics». L’instance nationale de probité et de lutte contre la corruption aura pour mission de veiller au bon respect de cet article. Elle bénéficiera de l’appui de l’Etat, art.159. De même pour le Conseil supérieur de la concurrence également constitutionnalisé. Ce sont au total une dizaine d’instances, conseils et autorités, qui ont été institutionnalisées par ce projet. Le Conseil économique et social, récemment investi, fin février, mais existant dans le texte depuis 1996, voit, lui, ses attributions élargies au domaine environnemental.
Toutes ces institutions et instances de protection des droits et libertés, de la bonne gouvernance, du développement humain et durable et de la démocratie participative, ces instances de protection et de promotion des droits de l’homme sont tenues de présenter un rapport, au moins une fois par an, devant le Parlement (art. 160). «Ces rapports sont présentés au Parlement et y font l’objet de débat», précise le même article.
Bref, les engagements internationaux du Maroc, aussi bien dans le volet du respect des droits et des libertés que sur le plan économique et social trouvent toute leur expression dans cette dernière partie, au demeurant d’une grande importance, du projet du texte de la future Constitution. La justice et l’équité, la préservation de la dignité, les valeurs de la moralisation et de transparence et le développement humain durable trouvent toute leur expression dans ce texte fondateur d’un nouveau Maroc.
