Carrière
Harcèlement au travail : Avis d’Imam Hafid, Avocat
Dans la pratique, il est très difficile de révéler les actes de harcèlement sexuel et de les prouver.

Le droit marocain encadre le harcèlement sexuel à deux niveaux. Dans le code du travail, l’article 40 considère le harcèlement sexuel comme une faute grave de la part de l’employeur. Dans le code pénal, l’article 503-1 prévoit une peine d’emprisonnement de un (1) à deux (2) ans pour la personne qui abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions pour harceler autrui en usant d’ordres, de menaces, de contraintes ou de tout autre moyen, dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle.
Pour le harcèlement moral, qui a un sens bien plus large que le harcèlement sexuel, il y a un vide juridique dans la mesure où le Maroc n’a pas encore intégré cette notion dans sa législation. Sous d’autres cieux, en France notamment, le harcèlement moral ou le mobbing
est interdit par l’article L.1152-1 du Code du travail qui dispose qu’«aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel».
Ceci étant, la jurisprudence, dans quelques arrêts confirmés par la Cour de cassation marocaine, prend en considération cette notion en considérant le fait d’exercer un harcèlement moral sur le salarié comme une faute grave de l’employeur pouvant justifier le fait que le salarié quitte son emploi. Ce qui est considéré comme un licenciement abusif déguisé. La liste des fautes graves de l’article 40 du code du travail n’étant pas limitative.
Il faut savoir que, dans le cadre des relations de travail, le harcèlement peut être aussi le fait de collègues, de supérieurs hiérarchiques, de membres de la direction ou de clients et se traduit généralement par des remarques suggestives, des demandes de faveurs sexuelles et des invitations compromettantes.
Le harceleur peut également être du même sexe que la victime. Pour le salarié, par exemple, le harcèlement qu’il exerce sur ses collègues constitue aussi une faute grave de sa part qui peut justifier son licenciement disciplinaire.
Malheureusement, dans la pratique, il est très difficile de révéler les actes de harcèlement sexuel et de les prouver. Les femmes travailleuses, en particulier celles dans l’économie informelle et les travailleuses domestiques, sont particulièrement vulnérables à l’exploitation et au harcèlement.
Les travailleurs migrants courent pour leur part des risques plus importants en raison des problèmes auxquels ils sont confrontés pour trouver un emploi, de l’isolement social et de l’incapacité de défendre leurs droits. Dans la plupart des cas, ils ne peuvent s’exprimer correctement dans la langue du pays d’accueil pour protester ou formuler une plainte contre la manière dont ils sont traités.
Mais, même si c’est difficile, la preuve du harcèlement, notamment sexuel, peut être apportée. Pour ce faire, il faut prendre des mesures. A commencer par prendre des notes comprenant la date, l’endroit où les actes ont été commis, y compris ce qui a été dit ou fait, en mentionnant dans la mesure du possible les témoins. Garder vos notes dans un endroit privé et sûr, par exemple à votre domicile. La victime doit garder des traces des courriels et des SMS compromettants. Il faut également en parler à d’autres personnes sur le lieu de travail et vérifier si elles sont confrontées au même problème avec le harceleur.
Bien évidemment, les représentants du personnel sont à l’écoute des salariés. Il ne faut pas hésiter à leur en parler.
