Page 38 - La Vie éco - 19 Mars 2021
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ENERGIES
Alternative
…/… FOCUS
l’énergie solaire et des énergies nouvelles.
La tutelle a demandé au consortium Huit ans après sa création, l’Iresen compte
d’approfondir davantage l’analyse du volet actuellement plus de 17 laboratoires de Plusieurs procédés pour
financement pour faire des propositions recherche implantés dans des universités
concrètes de mécanismes de financement marocaines.
de la biomasse et proposer des modèles ap- Cette source d’énergie abondante et obtenir de l’énergie
propriés qui tiennent compte du contexte abordable a été recommandée par le Souve-
posé «d’élargir le périmètre de l’étude pour tion d’énergie propre au Maroc. Elle vien- propre
rain comme quatrième source de produc-
marocain. Le ministère a également pro-
évaluer le potentiel de valorisation de la dra en renfort aux autres sources d’énergie
biomasse en bio-carburant et identifier renouvelable que sont le solaire, l’éolien
des projets concrets dans ce domaine». Un et l’hydraulique, dans la perspective du
groupe de travail sera chargé de finaliser le relèvement des engagements climatiques
projet de stratégie dans les meilleurs délais. du Royaume à l’horizon 2030, notamment
En attendant l’approfondissement de pour se conformer aux résultats du GIEC
tous ces volets, force est de relever que (Groupement intergouvernemental d’ex-
la biomasse est l’énergie renouvelable la perts sur l’évolution climatique).
plus utilisée au Maroc et dans le monde. L’étude repose sur une évaluation de la
Généralement, moins chère que les com- ressource biomasse avec une analyse des
bustibles fossiles, elle existe au Maroc en flux de matières issues de la gestion des
grandes quantités sous forme de grignons déchets, de l’agriculture et de la sylvicul-
et de noyaux d’olives, de coques de noix, ture, ainsi que les études menées dans ce
de noyaux de fruits, de déchets agroali- domaine. Elle a pour objectif d’apprécier
mentaires ou industriels et de produits de les potentiels théoriques, techniques et
la forêt. Comme toute énergie renouve- économiques de la valorisation énergé-
lable, son bilan CO2 est excellent. En outre tique de la biomasse.
l’utilisation de la biomasse génère de nom- Selon les conclusions de l’étude, le Ma-
breux emplois techniques et ruraux, et roc présente un total en énergie primaire
profite directement à l’économie du terri- estimé à 11,5 millions de mégawatt-heures
toire. Par exemple, au niveau social, le sec- par an (MWh/a), répartis sur trois secteurs
teur pourra permettre à plusieurs couches clés, à savoir les échets verts, l’agriculture, L’énergie biomasse est la forme d’énergie la plus ancienne
de la population de trouver un emploi. La la foresterie et les eaux usées. utilisée par l’homme depuis la découverte du feu à la pré-
première étude sur la biomasse présentée Concrètement, 6,6 millions de MWh/a histoire. Cette énergie permet de fabriquer de l’électricité
en février dernier parlait de 10 000 emplois du potentiel technique national est issu grâce à la chaleur dégagée par la combustion de ces ma-
à l’horizon 2030. Le Maroc a un fort po- du secteur agricole, 1,7 M MWh/a pro- tières (bois, végétaux, déchets agricoles, ordures ménagères
tentiel en termes de biomasse : 75 % des viennent du secteur forestier, 3 M MWh/a organiques) ou du biogaz issu de la fermentation de ces
déchets ménagers des villes et 85 % des du secteur des déchets, tandis que 0,2 M matières, dans des centrales biomasse. Dans la biomasse
détritus des zones rurales sont constitués MWh/a peuvent être générés à partir du par combustion, les déchets sont directement brûlés en
de matières organiques. Cette matière pre- secteur des eaux usées. produisant de la chaleur, de l’électricité ou les deux (cogé-
mière va faciliter la production en quantité Dans le détail, les matières fermentes- nération). Cela concerne le bois, les déchets des industries
plus importante du biogaz obtenu par voie cibles à l’image de l’élevage bovin, l’avicul- de transformation du bois et les déchets végétaux agricoles
de méthanisation. Le centre sera implanté ture et les cultures sous-serres représen- (paille, canne à sucre, arachide, noix de coco...). En France,
dans la région de Fès-Meknès, une zone où tent 12 M MHh/a t/a (tonnes par an), alors par exemple, 10 % de la production d’électricité d’origine
l’agriculture est très développée. que les matières ligneuses comme l’arbori- biomasse provient de la combustion du biogaz.
De nos jours, le défi de la transition éner- culture, les déchets verts, les boues et l’in- S’agissant de la biomasse par méthanisation, c’est un procé-
gétique exige de reconnaître l’agriculture cinération sont évalués à 1,4 millions t/a. dé où les déchets sont d’abord transformés en un biogaz, par
comme une source d’énergie capable de En ce qui concerne la répartition de fermentation grâce à des micro-organismes (bactéries). Le
fournir à la société, en plus des aliments, cette ressource au niveau national, la ré- biogaz est ensuite brûlé. Ce biogaz est proche du gaz naturel
de la bioénergie de substitution aux com- gion Fès-Meknès accapare 1,8 M MWh/a, et majoritairement composé de méthane. Cela concerne les
bustibles fossiles. C’est dans cette optique suivie par les régions de Rabat-Salé-Ké- déchets ménagers, le fumier et lisier d’animaux, les boues de
que l’Iresen a été mis sur pied par le gou- nitra, Marrakech-Safi, Casablanca-Settat stations d’épuration, les papiers et cartons…
vernement marocain en 2011 pour accom- avec 1,3 M MWh/a chacune, tandis que En France, plusieurs centrales produisent de l’électricité
pagner l’État dans la mise en œuvre de sa la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima grâce à la biomasse, essentiellement du bois. Elles sont le
stratégie énergétique nationale. regorge de 1,2 MWh/a. Pour le directeur plus souvent installées au plus près des lieux mêmes de
L’institut soutient la recherche et le dé- général de l’Agence marocaine pour l’effi- stockage des déchets. Le bois est également utilisé pour le
veloppement appliqués dans le secteur de cacité énergétique (AMEE), Said Mouline, chauffage collectif et industriel.
la valorisation énergétique de la biomasse Il est judicieux de relever que l’énergie biomasse n’émet
offre, en plus de limiter la déforestation, la presque pas de polluants et n’a pas d’impact sur l’effet de
particularité de préserver un environne- serre. La quantité de CO2, un gaz à effet de serre, qu’elle
ment propre et de contribuer à la création rejette, correspond à la quantité absorbée par les végétaux
d’emplois. pendant leur croissance. De plus, la valorisation du biogaz en
A cet effet, l’étude avance que l’instal- électricité évite l’émission de méthane, un autre gaz à effet
lation et la fabrication des projets de bio- de serre, dans l’atmosphère. Il représente un potentiel éner-
masse pourraient à long terme générer de gétique très important, en provenance principalement des
7 600 à 10 310 emplois dans les chaînes décharges, mais aussi des boues d’épuration et des déchets
d’approvisionnement en biomasse et favo- urbains et agricoles. Aujourd’hui seulement 1/4 de ce poten-
riser la réduction de 6,2 à 8,5 millions de tiel est réellement utilisé pour la production d’électricité et/
tonnes de CO2 d’émissions de gaz à effet ou de chaleur.
de serre (GES) n N.D.
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