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Société

Un drame à  Sidi Hrazem

Dans son nouveau roman, «Le nu et la coupole», Ahmed Tazi nous promène du côté de Sidi Hrazem où les vacances d’une famille bourgeoise
de Fès vont rapidement tourner
au drame.

Publié le

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Autrefois, quand l’été arrive avec ses journées longues et caniculaires, les habitants des villes et villages de l’intérieur n’avaient qu’une idée en tête : se précipiter dans la rivière la plus proche, le bassin le plus proche. C’était le temps où la nature était généreuse, les saisons pleines et les gens de peu, nombreux. Mais tous pouvaient, à moindres frais, goûter aux joies de baignades revigorantes, à l’ombre de buissons exubérants, de rochers lisses comme des toboggans et d’arbres maltraités par les estivants.
C’est dans ce décor enchanteur que Ahmed Tazi, inspecteur des finances de son état, a choisi de situer l’histoire qu’il nous raconte dans son dernier roman, Le nu et la coupole(*).
La famille Manjour, qui faisait partie des notabilités de Fès, débarqua, cet été-là, au grand complet, dans les thermes de Sidi Hrazem. Le coin était dans son état de nature, l’industrie des eaux minérales n’ayant pas encore investi les lieux. Il y avait là l’aîné du clan, Abbas, son épouse Lalla Zineb, leur fils Khalid et leurs deux filles Nawal et Jalila. Etaient également du voyage le frère cadet Sellam, sa femme Sollange et leur fils Smaïn, et, comme il sied à la bourgeoisie fassie, la petite bonne, Rahma.
Mais la villégiature, bientôt, tourna au drame (on ne vous en dira pas plus).
Avec un art consommé de la description, Ahmed Tazi nous dresse les portraits des membres de la tribu Manjour et, tel Hercule Poirot accusant tour à tour chacun des protagonistes, procède par allusion quant au mobile et à l’auteur du crime.
Economiste de formation, Ahmed Tazi nous surprend à chacun de ses romans, dont Le nu et la coupole est le sixième, par sa capacité à se soustraire à la sécheresse de son métier pour nous livrer des chroniques sociales – et sociétales – de bonne facture. Qu’il s’agisse de La rue du cuivre, Le convoi des chiens, Le jardin andalou, L’oiseau de Dieu, ou encore Les yeux de lalla Fdéla, Ahmed Tazi nous restitue des pans entiers du Maroc de sa jeunesse – et même d’avant sa jeunesse – avec une pointe de nostalgie à peine dissimulée. Comme lorsqu’il se replonge dans l’atmosphère de la médina de Fès et ses dinandiers de talents dans La rue du cuivre, ou lorsqu’il nous décrit l’atmosphère des années 40-50 avec ses joies et ses peines dans Le convoi du chien.
De roman en roman, le style flamboyant, le verbe tantôt dur tantôt tendre pour ses personnages, Ahmed Tazi ne cesse de s’affirmer dans le monde de l’écriture et c’est tant mieux pour la bibliothèque marocaine.