Société
Micro-entrepreneurs : Questions à Mohammed El Mazouri, Directeur délégué de la FNAM
Notre mission est exclusivement sociale, à savoir la lutte contre la pauvreté, l’exclusion sociale et financière à travers le financement et l’accompagnement des porteurs d’activités génératrices de revenus (AGR).

La Vie éco : Pouvez-vous nous présenter la FNAM ?
La Fédération nationale des associations de microcrédit (FNAM) est une association qui regroupe l’ensemble des Associations de microcrédit (AMC) qui sont au nombre de 13. La FNAM a comme objectif de fédérer l’ensemble des membres autour de la vision du secteur et la défense de leurs intérêts. Elle est également un interlocuteur de la tutelle, le ministère des finances, du régulateur, Bank Al-Maghrib ainsi que des bailleurs de fonds nationaux et internationaux. Notre mission est exclusivement sociale, à savoir la lutte contre la pauvreté, l’exclusion sociale et financière à travers le financement et l’accompagnement des porteurs d’activités génératrices de revenus (AGR). Nous avons comme objectif d’arriver à l’horizon 2017 à 1,5 million de bénéficiaires avec un encours de 7,5 milliards de DH. Mais, s’il y a une évolution favorable de l’environnement juridique conformément aux attentes du secteur, on peut être encore plus ambitieux, pour une meilleure inclusion sociale et financière du secteur.
Quelle est la situation du microcrédit aujourd’hui ?
On est aujourd’hui à 900 000 bénéficiaires qui sont servis avec un encours crédit avoisinant les 6 milliards de DH. 55% de nos clients sont des femmes. Le secteur emploie 6 300 personnes dont la moitié sont des femmes. Nous pouvons attester d’une présence dans une proportion de 45% dans le monde rural et surtout dans les communes où le taux de pauvreté est le plus élevé : Marrakech, Al Gharb et Fès.
Ne pensez-vous pas que les taux d’intérêt pratiqués par les AMC sont élevés ?
Pour nous, il n’est nullement élevé. Si on compare le taux marocain aux taux pratiqués à l’échelle mondiale, on se situe dans la moyenne basse des taux. Maintenant, si on le compare à une banque ou une société de financement, c’est différent. D’ailleurs, dans la microfinance, on ne parle pas de taux d’intérêt, mais de coût d’inclusion financière. Le business modèle de la microfinance est différent du modèle d’une banque ou d’une société de financement. Nous n’avons pas la même structure de charges. Le microcrédit a besoin d’employer 6 300 personnes avec une masse salariale de 500 millions de DH. Quand on rapporte la masse salariale à l’encours, on est sur du 9%. Si on ajoute 3% pour le fonctionnement, 6% pour le coût de financement, le risque (3 à 3,5%), on se retrouve déjà avec des charges avoisinant les 20%… D’où les taux d’intérêt pratiqués dans le secteur.
Comment gérez-vous le risque dans le secteur ?
Quand on demande un crédit à une banque ou à une société de financement, on doit ramener des documents, type attestation de salaire, fiches de paie, relevés bancaires… Le crédit est accordé à l’aune de la capacité de remboursement du client, en fonction des revenus et des charges. Or chez nous, les bénéficiaires cibles sont souvent dans l’informel et n’ont aucun justificatif de revenus. D’où la nécessité d’avoir des agents de crédit qui vont sur le terrain pour apprécier la capacité de remboursement du postulant au microcrédit à travers une enquête et la reconstitution de la situation patrimoniale du client (comptabilité sous dictée)… Ce travail nécessite une grande proximité des agents. On débloque après le crédit principalement par le financement d’une activité génératrice de revenu (AGR). Un autre agent sortira pour vérifier l’affectation du crédit à l’objet énoncé dans la demande. Enfin, il y a toute la phase liée à la récupération des échéances, recouvrement…
Que faites-vous pour sortir les bénéficiaires du cadre de l’informel ?
Dans le microcrédit, il y a deux composantes essentielles : le financement et l’accompagnement. Dans le cadre des services non financiers, il y a des formations qui sont assurées par les Associations de microcrédit (AMC) elles-mêmes. L’objectif est de former et de sensibiliser les bénéficiaires aux aspects liés à l’éducation financière et à la nécessité de formaliser les activités pour un meilleur développement.
Le Centre Mohammed VI de soutien à la microfinance solidaire apporte également une aide précieuse au secteur à travers le support non financier : la formation, l’accompagnement, l’appui à la commercialisation…
