Société
Le coaching associatif pour lutter contre l’exclusion sociale
• Les coachs s’impliquent de plus en plus dans le coaching solidaire.
• Ils renforcent ainsi l’action d’accompagnement des associations caritatives et de soutien de communautés spécifiques.
Depuis 2010, aux côtés du coaching professionnel et du coaching de vie ou individuel, on parle de plus en plus du coaching associatif. Celui-ci met en avant, explique Bichara Tazi Saoud, de la Commission Coaching Solidaire, «la dimension humaniste, sociale et solidaire du coaching». Cette commission, fraîchement mise en place en janvier 2021, a, poursuit Mme Tazi, «pour rôle de développer et de structurer les actions de coaching Pro bono. Comment? En clarifiant l’étendue du coaching solidaire, en créant une base de données avec les actions menées par les coachs membres, en les qualifiant et en les évaluant, et le plus important, en concluant des conventions de partenariat avec différentes organisations et associations marocaines et avec des antennes nationales d’ONG internationales». Concrètement, en quoi consiste le coaching associatif ou solidaire ? Répondant à cette interrogation, les coachs partent tous de l’idée de solidarité et de partage qui est bien ancrée dans la culture et la société marocaines. Ainsi, selon Bichara Tazi, «le coaching associatif est une forme moderne de ce style de vie ancestral: accueillir, partager et soutenir l’autre. On peut le définir comme suit : C’est l’engagement professionnel et gratuit de coachs auprès d’associations et individus pour les aider selon leurs besoins. Il ne faut pas le confondre avec l’intervention rémunérée de coachs auprès d’associations dans le cadre de programmes de formation et /ou de renforcement de compétences». De son côté Mouhcine Ayouch, fondateur de BMH et coach PCC, précise qu’il s’agit «d’un coaching solidaire qui part de la rencontre ou d’un feeling entre le coach et une ou plusieurs associations. C’est-à-dire que la fibre solidaire est partagée entre les deux parties et le coach est lui-même sensible à la cause de l’association et il y croit».
C’est de cette fibre solidaire, confie Mouhcine Ayouch, qu’est venue l’idée d’accompagner, depuis 2012, la Fondation marocaine de l’étudiant (FME). Depuis neuf ans, en effet, le patron de BMH a été tuteur de cinq étudiants bénéficiaires du soutien de la FME. «Celle-ci assure le soutien financier et l’accompagnement logistique des étudiants brillantissimes qui sont en situation difficile afin de les aider et de leur offrir l’opportunité de terminer leurs études et de réaliser leurs projets de vie. Cependant, l’association n’a pas d’expérience dans le domaine de développement personnel et c’est là que le coach intervient», explique M. Ayouch.
Associations humanitaires, étudiants ou chômeurs, autant de cibles du coaching associatif
Pour Nezha Hamieddine, présidente de l’ICF Maroc, «le coaching est un métier d’aide par excellence. Les coachs sont tenus de dédier une partie de leur temps au coaching solidaire au profit des personnes en difficultés financières, les étudiants, les chômeurs, ainsi que les associations humanitaires. C’est pourquoi en 2012 j’ai décidé de travailler avec l’association l’Heure Joyeuse. J’ai voulu aider pour une insertion sociale de ces personnes». Organisant des teams coaching hebdomadaires avec les jeunes bénéficiaires de cette association, Mme Hamieddine explique avoir «pu explorer les zones du non-dit des jeunes, leurs représentations limitantes pour, in fine, les aider à changer de regard sur eux-mêmes, ainsi que sur les autres».
Et c’est avec la même fierté que Mouhcine Ayouch constate que «le succès des jeunes étudiants qui ont bénéficié des séances de coaching assurées par les lauréats de la Haute école marocaine de coaching que nous avons créée. Ces séances de coaching s’inscrivent dans le cursus de formation des lauréats qui, faut-il le préciser, sont encadrés par des coachs professionnels. Aujourd’hui, plusieurs étudiants de la fondation ont pu réussir professionnellement et socialement et certains sont même devenus tuteurs d’autres étudiants de la FME. Et certains d’entre eux évoluent dans des pays étrangers. Leur réussite est l’apport du coaching associatif qui a, en plus du soutien de la fondation, permis leur développement personnel».
Les séances de coaching solidaire, gratuites, se déroulent dans le même cadre que le coaching professionnel et le coaching individuel. Un partenariat est mis en place entre l’association et le coach déterminant, en fonction des besoins réels ou naissants, le nombre de séances et la durée de l’accompagnement.
Pour Bichara Tazi, «comme tout coaching, le coaching associatif doit répondre à une demande émanant d’un besoin. C’est un accompagnement professionnel dans les règles de l’art et il se déroule dans le respect du cadre éthique et déontologique tel que défini par ICF Monde».
Les attentes des bénéficiaires portent globalement sur l’estime de soi, la gestion du temps ou encore la prise de parole en public. Mais elles peuvent aussi porter sur des besoins précis comme la préparation des entretiens d’embauche ou l’élaboration d’un CV.
«Lors de mon expérience avec les jeunes de l’Heure Joyeuse, les séances de coaching solidaire ont permis deux choses, d’abord libérer les croyances limitantes et la défiance qu’ils ont par rapport à l’entreprise, par rapport aux autres et ensuite, cela les a aidés à élaborer leur feuille de route et à se projeter dans l’avenir», conclut Mme Hamieddine.
Il n’y a certes pas d’obligation légale ou réglementaire pour les coachs professionnels de faire du coaching solidaire, mais aujourd’hui, la quasi-totalité des coachs interviennent auprès des associations. Ce qui fait, reconnaît Mme Tazi, «que nous sommes sur un excellent trend. Le tissu associatif marocain est prolifique. Il se professionnalise. Les associations sont de plus en plus conscientes de l’apport du coaching pour leur développement et leur pérennité». Sans oublier que durant cette crise sanitaire, le coaching solidaire s’est «beaucoup développé et cela continue. On peut dire que les coachs et les associations ont pris le pli», souligne Mouhcine Ayouch.