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Société

«For Women In science» : la science est aussi une affaire de femmes !

Deux Marocaines, deux Tunisiennes et une Algérienne remportent la bourse de la Fondation de l’Oréal-Unesco 2019. Leurs travaux portent sur la médecine, l’environnement et les technologies de l’information et la communication.

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Women In Science

C’est le 9 janvier prochain que seront décernées les bourses L’Oréal-Unesco du programme «For Women in Science». Cinq jeunes femmes maghrébines recevront donc une bourse de 10 000 euros qui leur permettra de poursuivre leurs recherches scientifiques durant une période de deux ans. «Ces bourses ont pour objectif, au-delà de l’aspect financier, de distinguer ces jeunes femmes pour la qualité de leurs recherches, de les aider et de les encourager à poursuivre une carrière dans les sciences», explique Philippe Raffray, directeur général de l’Oréal Maroc.
Le programme «For Women in science» a été créé en 1998 avec l’ambition simple de faire en sorte que les femmes soient représentées à parité égale dans toutes les disciplines scientifiques. Aujourd’hui encore, on notera que seuls 30% des chercheurs sont des femmes. Et seuls 3% des prix Nobel sont des femmes. Une situation que le programme ambitionne d’améliorer car «la science a besoin des femmes et les femmes de science ont le pouvoir de changer le monde». Cette année, pour la vingtième édition du FWIS, seront récompensées pour leurs travaux cinq Maghrébines dont deux Marocaines, deux Tunisiennes et une Algérienne. Houda Taymouria de la Faculté des sciences de Rabat, Hasnaa Chaabi, de l’Université Abdelmalek Essaadi de Tétouan, Zohra Dhouafli, du Centre de biotechnologie de Borj Cédria de Tunisie, Olfa Ben Braiek de l’Université de Monastir et enfin Lilia Zaidi, de l’Université Houari Boumediène d’Algérie.

Les lauréates appellent les femmes à rester déterminées pour lever les préjugés…

Elles sont toutes passionnées et ont toutes un message à faire passer : «La science n’est pas uniquement une affaire d’hommes !». Preuve en est qu’en 20 ans, 102 lauréates et plus de 3 000 jeunes femmes scientifiques ont bénéficié de la reconnaissance et de la valorisation apportées par le programme “Pour les Femmes et la Science“. Et l’on retiendra que trois parmi les lauréates ont d’ailleurs reçu un Prix Nobel. Au Maroc, ce sont, aujourd’hui, cinquante-six boursières qui ont pu bénéficier du programme depuis son lancement il y a une douzaine d’années. Comme chaque année, les domaines de recherche sont diversifiés allant de la biologie à la médecine en passant par les technologies de l’information et de la communication et la biotechnologie. Ainsi, le projet de recherche de la Marocaine Houda s’inscrit dans le cadre du Plan Maroc Vert puisqu’il contribuera à l’élaboration de techniques et de base de données importantes pour la phytoremédiation des rejets miniers et industriels à l’échelle nationale et internationale. Il répond à la problématique environnementale nationale prioritaire qui est la réhabilitation des sites pollués. La lauréate explique que «la mise en place d’une approche de phytoremédiation limitera les risques que peut engendrer la contamination des sols sur la biodiversité de la faune et de la flore et par là même de la santé de l’homme». L’ambition de cette lauréate est de «pouvoir réellement réhabiliter des sites pollués et réussir à valoriser et valider le mécanisme du traitement magnétique». A court terme, le projet de Houda Taymouria permettra l’identification des plantes candidates pour la réhabilitation des sites miniers. Ces plantes feront l’objet d’études physiologiques et moléculaires en réponse aux métaux lourds.
Dans un tout autre domaine, celui des techniques de communication et d’information, Hasnaa Chaabi, la deuxième lauréate marocaine, a un rêve: «Que la science puisse réduire l’ignorance dans toutes ses formes et bannir la médiocratie dans nos systèmes décisionnaires». Son projet vise la création d’une plateforme numérique qui propose divers modules et unités d’enseignement basés sur une architecture collaborative de type Software AS A Service que nous nommons «Learning As A Service». Le travail de Hasnaa vise l’amélioration du système éducatif marocain par la conception d’un modèle spécifique à la société marocaine. Il permettra de faire un meilleur parcours secondaire en développant une culture numérique et l’apprentissage d’au moins une langue étrangère. Les trois autres projets portent sur des travaux de recherche médicale afin de développer des traitements nouveaux, d’une part, contre la maladie d’Alzheimer et le cancer, et, d’autre part, sur de nouveaux outils biologiques naturels pour lutter contre l’antibio résistance qui est devenu un réel problème de santé publique.
Ainsi, le projet de la Tunisienne, Zohra Dhouafli devrait aboutir à «l’extraction d’une molécule naturelle capable de soigner les maladies liées à un désordre protéique et spécifiquement la maladie d’Alzheimer. Ce qui permettra, à long terme, d’avoir un médicament pouvant soigner les causes de cette maladie et pas seulement les symptômes comme c’est le cas aujourd’hui». Et toujours dans un souci d’innovation médicale, Lilia Zaidi d’Algérie planche sur la conception «d’un dispositif pour une nouvelle modalité de radiothérapie nommé la Boron neutron thérapie dont l’objectif est de délivrer un faisceau de neutrons thérapeutique pour le traitement des cancers situés en profondeur et inopérables». Le dispositif est aujourd’hui en cours de fabrication, et, à court terme, l’objectif est d’installer ce dispositif dans une enceinte hospitalière. Enfin, Olfa Ben Braiek vise, par son projet, «la création de nouvelles formulations techno-biologiques, probiotiques et protectrices valorisant les produits naturels qui seront utilisés comme des alternatifs aux additifs chimiques et ils auront un effet thérapeutique potentiel leur permettant de remplacer les antibiotiques». La chercheuse ambitionne de créer une start-up pour la production et la commercialisation de ces nouvelles formulations. Car le rêve de Lilia est de diriger un laboratoire de recherche et être responsable de grands projets de recherche à l’international. Elle dit également vouloir «dépenser son énergie pour promouvoir la femme dans le domaine scientifique et défendre sa place à côté de l’homme».
S’inscrivant certes dans des domaines différents, les travaux de recherche des cinq lauréates du FWIS de 2019 ont la même ambition : permettre aux femmes de contribuer à la science et au développement de la société au même titre que les hommes. Elles recommandent aux femmes de ne pas «baisser les bras car les femmes de science ont des compétences diversifiées dans plusieurs domaines, et, grâce à leurs idées novatrices, elles rendront le quotidien de la société beaucoup plus facile et beaucoup plus sain». Elles partagent le même rêve estimant que «les femmes puissent laisser une trace dans ce monde et être utile à l’humanité. Et la filière scientifique est le meilleur moyen de réaliser ce rêve partout à travers le monde».