Société
Dans les coulisses du Rallye du Maroc
Six jours intenses dans un écosystème hors du commun. Les meilleurs pilotes de la discipline à l’échelle mondiale au rendez-vous. Près de 1 000 participants dont 340 concurrents dans la course toutes catégories confondues. Une organisation lourde avec de véritables retombées économiques sur le pays d’accueil.
Les grandes contrées sahariennes des provinces du Sud du Royaume sont désormais inscrites dans l’histoire du Rallye du Maroc. Les habitués de la course comme les nouveaux venus ont découvert, tout au long de la 22e édition qui s’est déroulée du 1er au 6 octobre, de nouvelles pistes entre océan, dunes et désert du Sahara marocain. Un véritable dépaysement et une belle opportunité d’évasion pour tous.
Tout a commencé le samedi 1er octobre après-midi par la spéciale de qualification sur des pistes escarpées au Sud d’Agadir. Une étape pour définir les premiers au classement de qualification qui choisiront leur ordre de départ. C’est aussi pour certains une course qui a permis de mettre le pied à l’étrier et d’effectuer une reprise après plusieurs mois d’abstinence à s’adonner à leur sport favori.
Sur les traces du Dakar
Le lendemain, la caravane du Rallye s’ébranle très tôt. La première étape de la course est d’une longueur de 300 km pour relier Agadir à Tan Tan. Une entrée en matière pas facile. «Les concurrents vont d’emblée se confronter à de très belles pistes qui montent et qui descendent à travers des collines, à une portion de plage à avaler à fond, à du sable et déjà à de la navigation», explique la veille de l’épreuve David Castéra, directeur du Rallye du Maroc. Pour lui, cette étape rappelle beaucoup de souvenirs. Ce parcours était une étape historique du Dakar à l’époque où il était dans la course. C’est ainsi revenir sur les traces de l’ultime édition africaine du Dakar à travers le circuit de cette 22e édition du Rallye du Maroc.
A l’arrivée à Tan Tan, le premier bivouac planté sur la place du marché au dromadaire de la ville, véritable repère de la culture nomade, attend les participants. «Lorsque je conçois une nouvelle édition, avec mes équipes, la priorité est le parcours. Ensuite, nous organisons la base de vie en fonction des possibilités et infrastructures existantes. Cette philosophie nous amène à opter pour le bivouac, un moyen de nous rapprocher de l’un des arts de vivre et des savoir-faire historiques de nos hôtes. C’est aussi une partie intégrante de la dimension aventure de notre sport qui a toujours consisté à sortir de nos routines», souligne David Castera. Le bivouac est aussi un lieu de cohésion. Si toutes les catégories dans la course ne se croisent pas sur la piste, le soir, lors des repas grâce à un espace dédié, le bivouac permet à tous de se retrouver et partager leurs impressions et aventures du jour. C’est aussi le moment où les participants goûtent à l’art culinaire marocain. Tout au long du Rallye, à chaque heure de repas, ce sont 1000 repas qui sont servis à travers de longs et riches buffets. L’espace nuit composé de tentes au confort cinq étoiles avec des salles de bains individuelles, des Khaymas, où rien ne manque, accueillent aussi les participants dans la culture et le décor local. C’est aussi une oasis pour se reposer en toute sérénité dans un cadre bien maîtrisé encadré par un dispositif de sécurité.
Mais dans la nuit calme, pas très loin, le vrombissement des véhicules que les équipes de maintenance réparent ou préparent pour la course du lendemain résonnent. Le lendemain, aux premières lueurs du jour, les buffets du petit-déjeuner sont déjà servis et les départs de courses commencent très vite pour de nouvelles aventures, découvertes et de nouvelles victoires. Après Tan Tan, cap sur Laâyoune et premiers décors dunaires. Après les étapes d’Agadir, de Tan Tan, c’est en effet une véritable plongée pendant deux jours dans le décor dunaire de Laâyoune. A l’arrivée dans cette ville, les participants ont été accueillis dans un bivouac sur un site sur les hauteurs, face à la ville, en surplomb de l’oued. Un site majestueux où se conjuguent eau, végétation et sable. Un décor magique surtout la nuit tombée.
Les hôtes de la ville et sa région, n’ont pas manqué de venir souhaiter la bienvenue à Laâyoune dès le premier soir aux participants du Rallye. Autorités locales et élus qui ont assisté au briefing de la journée ont bien illustré l’hospitalité locale en exprimant leur soutien et leur disponibilité aux participants. De fait, de sa préparation à sa tenue, d’Agadir à Laayoune, le Rallye a bénéficié de tout le soutien et l’encadrement nécessaire des autorités. Un accompagnement sans pareil dans lequel semblable manifestation ne peut se tenir. L’adhésion et l’engagement de grands sponsors marocains, tels Afriquia, l’OCP et Maroc Telecom, ont contribué indéniablement à la réussite de cette 22e édition du Rallye Maroc.
Quatre mois de préparation et un budget de plus de 2 millions d’euros
Pour les organisateurs c’est une grosse machine dont la préparation a nécessité quatre mois environ. «C’est une organisation très lourde qui a nécessité l’implication de plus de 200 personnes et un budget entre deux et trois millions d’Euros, sans compter l’organisation des concerts», indique l’organisateur. «Ce qui est intéressant c’est que l’on dépense tout ici. Contrairement à d’autres épreuves, on achète tout ou presque ici», avance David Castéra. Esther Zores, directrice de l’Agence Bo voyage qui a participé à l’organisation du Rallye sur l’étape d’Agadir confirme aussi de son côté que l’événement a eu d’importantes retombées économiques sur l’écosystème du tourisme. Bien avant la course plusieurs équipes ont séjourné dans les hôtels au Maroc pour faire des essais avec leurs véhicules. «Il y a aussi les locations de voitures pour la logistique, l’implication de prestataires locaux, sans compter l’achat de produits du terroir, l’imprimerie locale des autocollants pour les voitures, la location des quads pour la découverte de la région d’Agadir notamment, pour ne citer que cela», détaille la réceptive. Le Rallye a été aussi une belle opportunité de visibilité et de promotion pour le Royaume à travers une couverture médiatique internationale. C’était aussi l’occasion pour les habitants et les touristes de passage de côtoyer la grande caravane du Rallye-raid. De quoi susciter les vocations de demain. En la matière, le Marocain Amine Echiguer qui a été classé premier dans la catégorie Moto Rallye Trois est un bel exemple à applaudir et à suivre. La Marocaine Souad Mouktadiri a aussi bien illustré le Maroc en décrochant la troisième place de sa catégorie Open SSV-Car. Cette année, les sportifs marocains ont participé à travers 4 motos et deux voitures. Lors de la prochaine édition, ils pourraient être plus nombreux. Une académie a été créée pour faire découvrir la discipline aux jeunes passionnés de ce sport.
Un sport qui coûte cher
«La course du Rallye du Maroc est une opportunité que les pilotes amateurs comme les professionnels n’ont pas laissé passer. Le plateau attendu dépasse le record fraîchement établi l’an passé et toutes les stars sont au rendez-vous», a lancé David Castera. Au total ce sont 340 concurrents qui étaient dans la course lors de cette 22e édition. Dans ce nombre seuls 10% à 15% environ des participants sont des professionnels. Ils font partie d’écuries, sont pris en charge et sont payés pour concourir. Cela fait partie de la stratégie développement de l’industrie mécanique. Il s’agit ainsi de préparer à travers le sport la voiture de demain. Un ultimatum a été lancé aux équipes. Il faut qu’en 2030 être neutralisé carbone absolu. Aussi il y a du travail sur les nouvelles énergies à adopter et les nouveaux règlements à mettre en place. Audi est aujourd’hui un des premiers constructeurs à prendre le pas de ces changements dans l’écosystème du sport mécanique, souligne David Castéra.
Outre les coureurs professionnels, parmi les autres concurrents très peu ont des sponsors et il faut miser gros pour participer. Il faut en effet entre 4 000 à 7 000 euros à l’inscription selon les catégories, sans compter d’autres frais tels que l’hébergement et la restauration pendant le rallye. Mais il y a surtout l’entretien des véhicules dont le coût d’achat varie entre 120 000 euros et 800 000 euros. Ceux qui pratiquent en amateurs le sport mécanique choisissent ainsi de louer un véhicule le temps d’une course. Mais là aussi il y a un prix fort à payer et une garantie à déposer le temps de la course avant le retour du véhicule. Mais pour les amateurs qui veulent s’évader le temps d’une course et en faire l’expérience une ou même deux fois, la mise en vaut bien l’aventure que cela offre.
Du Paris-Agadir au Rallye du Maroc
L’histoire des Rallye Raid au Maroc a commencé en 1982 avec l’arrivée du Paris-Agadir, premier rallye raid couru au Maroc. C’est un rallye qui sera baptisé par la suite dès l’année suivante ‘’Rallye de l’Atlas’’. Il enregistrera la participation des meilleurs pilotes et équipes de la discipline et deviendra rallye phare du calendrier des rallyes raids. Après sa disparition fin des années 1990, il reverra le jour en 2000 sous le nom de Rallye du Maroc. Dès 2007, il deviendra une épreuve du Championnat du Monde FIM et de la Coupe du Monde FIA. Après 10 années à la tête de l’épreuve, la société ASO en confie les clés à la société ODC dirigée par David Castera. ‘’En mars 2019, David Castera, devient le Directeur du Dakar et le Rallye du Maroc aura de fortes synergies avec la Dakar et deviendra le grand test pré-Dakar!’’, indiquent les organisateurs du Rallye.