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Société

Améliorer la condition des femmes au Maroc : Questions à Abdelkarim Azenfar, Directeur de l’Office de développement de la coopération

«Le mouvement coopératif est très dynamique»

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La Vie éco : Les coopératives ont vu leur nombre augmenter durant ces dernières  années grâce à une dynamique locale importante. Comment expliquez-vous cela ?

Le mouvement coopératif enregistre en effet une dynamique importante grâce à la conjugaison d’un certain nombre d’ingrédients dont principalement le dynamisme et l’esprit d’initiative de la population locale ainsi que l’accompagnement de différents programmes de l’Etat. Les coopératives sont devenues des outils incontournables dans la mise en œuvre des politiques publiques relatives au développement humain à travers l’intégration de la population, organisée en coopératives, dans la valorisation des potentialités et des savoir-faire locaux. Actuellement, le Maroc compte plus de 16 000 coopératives, sachant que ce nombre ne dépassait pas les 5 000 il y a 10 ans.

Cette dynamique, enregistrée essentiellement pendant la dernière décennie, est expliquée par l’importance de l’impact des programmes étatiques. Le lancement de l’Initiative nationale de développement humain en 2005 a donné une impulsion considérable au mouvement coopératif via l’encouragement des activités génératrices de revenus, la valorisation des ressources locales et la contribution à l’organisation de l’informel, notamment au sein des populations défavorisées. En plus de cette initiative royale, d’autres programmes sectoriels se sont basés sur le secteur coopératif comme outil de leur concrétisation: Plan Maroc Vert de développement agricole (pilier dédié à l’agriculture solidaire), stratégie nationale de l’artisanat…

Concrètement, les coopératives ont-elle contribué à l’amélioration des conditions de vie des populations en situation de précarité ?

Grâce aux coopératives, la situation de certaines populations à revenus limités et vivant dans des environnements d’isolement géographique et de précarité socioéconomique a été améliorée. Il s’agit, entre autres, des femmes rurales ou vivant dans des quartiers urbains périphériques qui, grâce à la valorisation de leur savoir-faire (artisanat, techniques d’extraction d’huile d’argane…) et des ressources naturelles (safran, cactus, arganier, laine…), ont pu conquérir les marchés nationaux ou même internationaux avec des produits de terroir bio et authentiques. Les coopératives féminines contribuent positivement à l’amélioration de la situation
socioéconomique des femmes à travers leur autonomisation économique, le développement de l’esprit d’entreprenariat, la lutte contre l’analphabétisme, la préservation des ressources naturelles et enfin l’amélioration des conditions de vie de toute la famille et surtout de l’éducation des enfants.

Cependant, il y a encore des limites…

En effet, à ce niveau on peut citer le déficit de compétences des ressources humaines (gestion, esprit managérial…), les techniques de production et les moyens financiers limités, les difficultés liées à la commercialisation (accès aux marchés), à l’accès au financement qui limite les investissements, et enfin la dépendance vis-à-vis de l’administration en termes d’accompagnement et d’appui financier.

Combien de coopératives peut-on compter actuellement et dans quels secteurs agissent-elles ?

Le Maroc compte plus de 2 300 coopératives à 100% féminines, soit plus de 14% du nombre global des coopératives. Au sein de ces coopératives féminines, 43% travaillent dans l’artisanat, 33% dans l’agriculture, 12% dans l’argane en plus d’autres secteurs tels que les plantes aromatiques et médicinales.

Chacun de ces secteurs englobe une diversité de branches d’activités liées à la disponibilité de spécificités locales (produit de terroir et savoir-faire) : coopératives d’argane au sud-ouest marocain, celles de safran à Taliouine, de tissage à Bzou, de romarin à l’Oriental, d’élevage des dromadaires au Sud, de tapis de Taznakhte…

Et en ce qui concerne leur implantation géographique ?

En termes de répartition géographique, les coopératives féminines se sont développées dans toutes les régions avec des niveaux diversifiés en fonction de la dynamique locale et des potentialités naturelles. Sur l’ensemble des coopératives féminines au niveau national, on compte 17% à Laâyoune-Sakia El Hamra, 15% à Souss-Massa, 10% dans la région de Marrakech-Safi et de Fès-Meknès…

Quel est le statut juridique de ces coopératives?

Toutes les coopératives au Maroc sont régies par le même cadre juridique, à savoir la loi n° 112.12 relative aux coopératives, abstraction faite de l’activité et du genre de coopératives (sans aucune distinction concernant les coopératives féminines). Cette nouvelle loi va certainement booster la cadence de création et de développement des coopératives et ceci grâce aux nouvelles dispositions, notamment la simplification des procédures de constitution des coopératives avec l’instauration d’un système d’enregistrement au niveau du registre des coopératives (registres locaux au niveau des tribunaux de 1ère instance et registre central au niveau de l’Office du développement de la coopération), la réduction du nombre minimum de membres pour la création d’une coopérative de sept personnes à cinq et celui pour la structuration en unions de coopératives de quatre coopératives à trois, la possibilité de participation aux divers marchés publics dès l’inscription au registre des coopératives et la possibilité aux non-Marocains (résidents ou non) de constituer des coopératives. Par ailleurs, les coopératives doivent désormais être gérées par un ou plusieurs gestionnaires en vue d’en améliorer la gouvernance. La gestion par un conseil d’administration est, par ailleurs, obligatoire pour les coopératives enregistrant un chiffre d’affaires dépassant cinq millions de dirhams pour deux années successives ou ayant un nombre d’adhérents dépassant cinquante membres.