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Santé : L’Afrique face au séisme du retrait américain de l’OMS

À peine réinvesti, le président américain Donald Trump a signé un décret relançant le processus de retrait des États-Unis de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). La décision aura un impact certain sur les opérations de l’Organisation dans les pays africains.

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Lors de son premier mandat, le président Trump avait déjà critiqué la manière dont l’organisation internationale avait géré la «grippe» de Covid-19 et avait entamé le processus de retrait de l’institution basée à Genève au cours de la pandémie. Le président Joe Biden est ensuite revenu sur cette décision. Le nouveau décret signé, il y a quelques jours, justifie le retrait des États-Unis par une série de griefs à l’encontre de l’OMS. En ligne de mire, une gestion jugée défaillante de la pandémie du Covid, apparue à Wuhan, en Chine, mais aussi d’autres crises sanitaires mondiales. Il est également reproché à l’institution son incapacité à engager des réformes urgentes et à préserver son indépendance face à des influences politiques jugées inappropriées de certains États membres.

À cela s’ajoute un dernier argument : le poids des contributions financières américaines, qualifiées de «paiements injustement onéreux» à une organisation rattachée aux Nations unies. Lorsque Trump était encore en fonction la première fois, il avait critiqué l’organisation pour avoir été trop «centrée sur la Chine» dans sa lutte contre la pandémie.

Ce retrait n’est pas qu’un acte symbolique de défiance envers une organisation multilatérale. Il frappe directement les pays les plus vulnérables, notamment en Afrique. En effet, les systèmes de santé peinent à répondre aux besoins des populations fragilisées par des défis structurels, sanitaires et économiques. Aussi, le départ de la première puissance mondiale du pacte de l’OMS constitue un véritable coup de massue pour les pays vulnérables qui dépendent de cet organisme.

Avec près de 20% de son budget annuel financé par les États-Unis, l’OMS s’appuyait largement sur cette contribution pour ses opérations dans les régions à risque, particulièrement en Afrique. Privée de moyens financiers suffisants, l’Organisation risque d’être moins réactive face à l’émergence de nouvelles crises sanitaires.

Les fonds américains permettaient de financer des programmes essentiels, notamment les campagnes de vaccination contre la poliomyélite, le paludisme et la rougeole. Cela compromettra les avancées réalisées ces dernières décennies dans la réduction des taux de mortalité liés à ces maladies ainsi qu’à d’autres.

La décision des États-Unis pourrait avoir un impact sur la capacité de l’OMS à répondre à des situations d’urgence telles qu’une épidémie d’Ébola ou de MPOX, sans parler d’une autre pandémie de type Covid-19. Des experts en santé publique ont suggéré qu’il pourrait y avoir d’autres conséquences pour la santé des Américains si les progrès réalisés dans la lutte contre les maladies infectieuses, telles que le paludisme, la tuberculose, le VIH et le sida, étaient réduits à néant.

Une opportunité pour repenser l’autonomie sanitaire de l’Afrique ?

Au-delà des considérations financières, le retrait des États-Unis traduit une crise de confiance dans les institutions multilatérales. Pour les pays africains, cette situation souligne leur dépendance chronique à une aide internationale qui peut disparaître à tout moment. La leçon est amère : les nations africaines, dont les budgets de santé publique sont souvent insuffisants, se retrouvent une fois de plus exposées aux aléas des politiques étrangères de puissances extérieures.

Une telle réorientation pourrait ne pas s’aligner avec les besoins réels des populations africaines, soulignant une fois de plus la vulnérabilité des pays pauvres face aux rivalités géopolitiques. D’aucuns craignent également que le retrait des États-Unis n’ouvre la voie à une plus grande influence de la Chine sur l’organisation mondiale.

Les avantages de cette décision sont peu nombreux, mais certains estiment qu’elle pourrait entraîner de nouvelles réformes du mode de fonctionnement de l’OMS. Ce qui lui permettrait de mieux répondre aux besoins des populations du monde entier en matière de santé publique.

Le retrait américain met en lumière l’urgence de renforcer les capacités locales et régionales en matière de santé. Des initiatives telles que la création de centres africains de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique) pourraient jouer un rôle essentiel dans l’avenir, en réduisant la dépendance au financement étranger et en améliorant la coordination au niveau continental.

Cependant, ces efforts nécessitent du temps, des investissements massifs et une coopération accrue entre les nations africaines, ce qui demeure un défi dans un contexte économique mondial marqué par une incertitude grandissante.