Culture
«The Bardia» : Salve féminine de la Tbourida
Le film a été honoré par sa sélection dans le prestigieux National Geographic Short Film Showcase, témoignant ainsi l’importance de ce patrimoine culturel qui remonte au 13e siècle. Un héritage marocain consacré par l’UNESCO depuis 2021.

Ornée d’accessoires et vêtue d’une tenue traditionnelle composée du «Tchamir», sarouel «qandrissi», «selham», turban en soie et des bottes brodées. Au Moussem, la «Bardia» se hisse fièrement sur son cheval, armée de son fusil, elle galope et s’apprête à libérer des salves de tirs de «Baroud», illustrant ainsi sa bravoure et célébrant un héritage équestre marocain, inscrit depuis 2021 sur la liste représentative du patrimoine immatériel de l’UNESCO.
Autrefois dominée par les hommes, «Tbourida», une tradition culturelle qui remonte au 13e siècle, a maintenant tendance à se féminiser. Cette nouvelle transition est mise en lumière à travers le documentaire «The Bardia» porté par Gabriella Garcia-Pardo et produit par l’artiste et la cinéaste franco-marocaine Iftane Takarroumt. Un travail qui plonge dans le quotidien et l’histoire captivante d’«Amal Ahamri», cavalière et Mokadema d’une Sorba qui jongle entre les défis de la maternité et les exigences d’une activité à risques multiples.
Présentée en darija, cette réalisation cinématographique illustre l’évolution des traditions culturelles marocaines au fil des années, ainsi que le grand rôle de la femme dans le paysage culturel du pays. «The Bardia» a été honoré par sa sélection dans le prestigieux National Geographic Short Film Showcase, témoignant ainsi l’importance de ce patrimoine.
Métaphore à la lutte des femmes
«Mon objectif était de transmettre et de documenter les connaissances autour de Tbourida, à travers un récit poignant axé sur la vie d’une femme pratiquant ce sport dangereux, et qui sert également de métaphore aux luttes auxquelles peuvent faire face les femmes dans des domaines réservés aux hommes ainsi que leurs triomphes», nous révèle Iftane Takarroumt.
«The Bardia» illustre cette transformation remarquable, en se concentrant sur l’histoire d’une leader de Sorba. La réalisation d’un tel projet n’est clairement pas évidente. «Deux moments critiques se sont démarqués: Au début du tournage avec Amal, nous avons dû faire face aux contraintes liées à sa vie trépidante, entre travail et maternité, à savoir que trois ans se sont écoulés avant qu’elle ne puisse reprendre en main sa passion et former une nouvelle équipe en vue de participer à une compétition de Tbourida. Durant cette période, il était impératif de rester constamment à l’affût de la moindre opportunité pour retourner au Maroc. Dans un second temps, lors de la post-production en 2020, et en raison de la pandémie, il m’était impossible de me rendre à Washington D.C. afin de collaborer efficacement avec l’équipe de montage qui ne maîtrise pas la darija. Le défi résidait dans l’incapacité de comprendre les différentes scènes pour effectuer un montage précis et complet», précise Iftane.
«En collaboration avec ma coproductrice, nous avons entrepris la traduction intégrale des séquences filmées de la darija à l’anglais, ce qui représente environ 100 heures de film, permettant ainsi aux monteurs de comprendre les dialogues à l’écran», a-t-elle ajouté.
Dotées d’une grande audace, les femmes Bardia apportent de par leur présence une contribution significative à un domaine traditionnellement masculin.
Elles jouent un rôle crucial en dévoilant la diversité des compétences, de la force et de la résilience féminines au sein de cette pratique équestre ancienne et plus largement une contribution significative à l’évolution des rôles de genre au sein de la société marocaine.
«En percevant le rôle des femmes dans la Tbourida à travers le prisme de “The Bardia”, on reconnaît leur impact transformateur. Elles deviennent des agents du changement social, contribuant à redéfinir les normes culturelles et à inspirer d’autres femmes à s’engager dans des domaines historiquement réservés aux hommes. Ainsi, le rôle des femmes dans la Tbourida est une expression puissante de leur force, de leur résilience et de leur capacité à influencer positivement leur communauté et au-delà», conclut la productrice du film.
