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Culture

Rendez-vous «Un instant avant le monde», à Rabat

La tant attendue Biennale de Rabat se poursuit jusqu’au 18 décembre 2019. La capitale est prise dans une effervescence culturelle multidisciplinaire dont l’objet est la réflexion sur l’urgence de la création.

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RABAT : un instant avant le monde

L’art a de tout temps servi pour décrire, traduire et marquer l’Histoire. En exprimant les idées et émotions des artistes, des œuvres ont traversé les siècles en préservant de chaque époque l’essence de sa civilisation. Et du 24 septembre au 18 décembre à Rabat, ville écrin et joyau, la Biennale ouvre une réflexion sur l’urgence de la création, en examinant les raisons, les révoltes, les moments décisifs qui poussent les artistes à passer à l’action et à contribuer à l’histoire. Composée d’une exposition internationale et d’un triptyque de cartes blanches, toute la durée de la Biennale est jalonnée de performances, d’une programmation culturelle ainsi que de manifestations d’art urbain et de programmations en off. Le commissariat de cet événement majeur a été confié à Abdelkader Damani, historien d’art, philosophe, commissaire d’expositions et directeur du Frac Centre-Val de Loire (Orléans, France). Il a, entre-autres, assuré le co-commissariat de la Biennale de Dakar en 2014 et créé la Biennale d’Architecture d’Orléans en 2017. «J’ai souhaité profiter de la page blanche d’une première édition, pour penser la Biennale comme une proposition d’alternative. L’ambition formulée n’est pas celle de changer le monde, le transformer ou le pervertir mais de tenter d’en écrire un nouveau, depuis l’extrême ouest du continent africain, la fin des terres. C’est depuis cette frontière, depuis cette mélancolie, qu’un soir à Rabat le titre de cette première édition s’est imposé à moi : ‘‘Un instant avant le monde’’», précise poétiquement Abdelkader Damani.
La Biennale est en bonne voie pour s’inscrire parmi les grands rendez-vous internationaux, selon Mehdi Qotbi, président de la Fondation nationale des musées du Maroc, pour qui la manifestation participe activement «à la réécriture de l’histoire de l’art, à partir du Sud». Et c’est le tout Rabat qui est en fête à l’occasion, depuis les lieux officiels de la Biennale, à savoir le Musée Mohammed VI d’art moderne et contemporain, le Musée de l’histoire et des civilisations, le Musée des Oudayas, le Fort Rottembourg – Fort Hervé (Borj Lakbir), l’Espace expressions CDG, la Villa des Arts, la Galerie d’art du Crédit Agricole du Maroc, la Galerie d’art de la Banque Populaire, la Bibliothèque nationale du Royaume du Maroc, le Théâtre national MohammedV et le Parc Hassan II. Mais un programme on off anime également Kulte Gallery & Editions, Le Cube – Independent art room, Galerie Fan Dok, Abla Ababou Galerie et Galerie Fathiya Tahiri.

Des femmes au cœur d’art

Quelque 63 artistes et collectifs d’artistes (femmes), issues de 27 nationalités différentes et de nombreuses disciplines, sont présentées dans l’exposition internationale dédiée aux femmes. Parmi celles-ci, des plasticiennes et peintres (Mona Hatoum, Etel Adnan, Marcia Kure, Ghada Amer, Zoulikha Bouabdellah, Amina Benbouchta, Candice Breitz), des sculptrices (Sara Favriau, Ikram Kabbaj), des cinéastes et vidéastes (Tala Hadid, Habiba Djahnine…), des chorégraphes, metteuses en scène et performeuses (Bouchra Ouizguen, Séverine Chavrier…), des photographes (Deborah Benzaquen, Mouna Jemal Siala ) et des artistes digitales (Naziha Mestaoui), mais aussi des architectes (Black Square, Manthey Kula, Zaha Hadid, Maria Mallo…). Bel hommage de la Biennale: le concert mythique d’Oum Kalthoum à Rabat a été projeté en préambule à l’exposition en hommage à la cantatrice, première artiste sélectionnée par le commissaire.

Et pour approfondir les questions suscitées par la Biennale, trois cartes blanches ont été attribuées. L’une a été adressée à l’artiste Mohamed El Baz qui a convié les Saïd Afifi, M’barek Bouhchichi, Safaa Erruas, Maria Karim, Youssef Ouchra et Ilias Selfati à s’exprimer dans l’exposition collective A Forest / La Forêt / El Ghaba, au Musée Mohammed VI. La carte blanche cinéma a été donnée à la réalisatrice et directrice de la Cinémathèque, Narjis Nejjar, qui a conçu une programmation cinématographique, de master class, de discussions avec des réalisateurs, afin de comprendre les conditions d’un nouveau récit du monde. La carte littérature, quant à elle, a été accordée à Sanae Ghouati, professeure à l’Université Ibn Tofaïl et Faouzia Zouari, romancière tunisienne, qui vont conclure la Biennale par un parlement des écrivaines auquel sont conviées un cinquantaine d’écrivaines, romancières et poétesses.

L’art autrement

Si la Fondation nationale des musées a toujours accordé une place de choix à l’art urbain, son engagement se confirme à travers le focus de la Biennale sur l’art urbain. Au moment de l’ouverture, le street artiste Futura et de jeunes artistes marocains ont réalisé un ensemble d’œuvres visible au Parc Hassan II.
Mais la Biennale, c’est également un programme intellectuel concomitant qui met l’art au centre de l’intérêt des chercheurs, académiciens et scientifiques. Ainsi, un séminaire a été conduit le 27 septembre au sujet de la nécessité d’«Agir sur la définition de l’Art», sous la direction de Nadira Laggoune, directrice du MAMA à Alger. Un deuxième séminaire aura lieu le 17 décembre, portant sur «La Tendresse subversive», dirigé cette fois par le commissaire de la Biennale lui-même.

Tout au long de la Biennale, ne ratez pas les pièces de théâtre, les concerts de musique, les projections cinémas, les ateliers d’art et les rencontres intellectuelles (A suivre sur l’agenda de La Vie éco). Un programme très riche, voire étourdissant, vous y attend.