Culture
Musique hassanie : Le hawl, ses composantes et son évolution
La société au Sahara est bien connue pour ses nombreuses coutumes, traditions et festivités particulières, englobant tous les aspects de la vie.

Connaître ces coutumes et traditions est une condition sine qua non si l’on veut comprendre les dimensions et la portée culturelle de l’héritage populaire hassani. Et, côté art, la musique n’est pas en reste.
Dans un excellent livre intitulé «Azawan : La musique hassanie. Voyage au cœur du Maroc saharien», l’auteur Ahmed Aydoun explique qu’afin «de rendre compte de la musique hassanie dans son sens le plus large on utilise le terme “hawl”, dont l’étymologie est inconnue». On peut lire par la suite que Al hawl se compose aussi bien de la poésie déclamée (leghna) que de la musique des instruments (azawân), deux domaines à la fois distincts et complémentaires, mettant à contribution toutes les ressources de la créativité poético-musicale. «Autrefois, explique l’auteur, les séances du hawl brillaient autant par la qualité des poètes et des musiciens que par l’environnement général de la société nomade dont les confédérations tribales étaient gouvernés par des émirs mélomanes». Plus qu’un spectacle, le hawl était une marque de bienséance et de savoir-vivre, «son langage reliant le verbe, le son et le geste dans une configuration symbolique complexe que seuls les initiés savaient décoder», écrit M.Aydoun.
L’effet de l’urbanisation et de la sédentarité
Compte tenu donc de ce contexte originel, la musique hassanie ne pouvait se tourner vers le grand public qu’au prix de l’abandon progressif de son caractère élitiste. Par conséquent, pour atteindre une nouvelle et large audience, la musique hassanie a dû se cantonner dans ou bien celles accompagnant la danse, les pièces légères (guedra, tbal, chamra ou autres). Par ailleurs, le développement socioéconomique fulgurant des provinces du sud du Royaume a abouti à un changement substantiel du mode de vie des habitants sous l’effet de l’urbanisation et de la sédentarité.
La télévision, les stations radio et les festivals ont fait leur apparition à Laâyoune et Dakhla. Les différentes facettes de cette culture en général est dévoilée à un large public : la poésie, la musique et le chant, l’artisanat local, le dromadaire et la khayma, les contes… Pour M.Aydoun, ces festivals modernes se sont substitués aux veillées traditionnelles et ont pu donc offrir au public le plaisir d’ «écouter des poètes et d’apprécier les musiciens et chanteurs dans un registre plutôt populaire». Cependant, la civilisation moderne et la sédentarisation des tribus «ont, hélas, altéré la pureté du hawl. La société contemporaine s’est privée des conditions ayant servi à élaborer la norme», écrit l’auteur. Et de poursuivre que ces mutations sociétales expliquent en grande partie le changement opéré dans le langage des poètes et des musiciens. Il peut sembler quelque part paradoxal que le fait de passer de la vie des campements nomades à celle des villes modernes, ferait que la musique perdrait de son caractère savant et devient de plus en plus populaire. Pourtant, explique M.Aydoun, «la sédentarité installera les conditions du changement dans la fonction de la musique, penchant plus vers un caractère de légèreté et de divertissement». Sous les tentes nomades, la musique hassanie traditionnelle ressemblait à toutes les musiques de cour qui se développaient dans le raffinement, tant les musiciens et l’auditoire étaient exigeants envers la réalisation musicale.
