Culture
Lutens et Saint-Laurent à Dar El Bacha
Le Musée des Confluences, abrité par le sublime palais de Dar El Bacha de Marrakech, accueille l’exposition «Étoffe des sens, résonances, Serge Lutens, Yves Saint-Laurent». L’exposition temporaire rend hommage à ces deux créateurs inspirés par la tradition et l’identité de la ville ocre dans les années 1960.
Si Marrakech est actuellement considérée comme la Mecque des stars et des jet-setteurs de tout bord, il fut un temps où elle n’avait pour attrait que sa beauté sauvage, ses couleurs et ses senteurs brutes. C’est à cette époque-là, dans les années 1960, justement que les plus grands créateurs découvraient, au détour d’un séjour furtif, les mille et une sensations enivrantes qui allaient imprégner leurs œuvres.
L’exposition actuelle de Dar El Bacha rend hommage à deux des premiers créateurs qui se sont installés à Marrakech : le styliste éternel Yves Saint-Laurent et le photographe, cinéaste, architecte de la mode, Serge Lutens, que la ville ocre a transformé en parfumeur.
Pourquoi Marrakech ?
Arrivés à Marrakech, pour la première fois en 1966, Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé ne savaient pas encore que leur destin en serait chamboulé. «Lorsque je découvris le Maroc, je compris que mon propre chromatisme était celui des zelliges, des zouacs, des djellabas et des caftans. Les audaces qui sont depuis les miennes, je les dois à ce pays, à la violence des accords, à l’insolence des mélanges, à l’ardeur des inventions. Cette culture est devenue la mienne, mais je ne me suis pas contenté de l’importer, je l’ai annexée, transformée, adaptée», confiait Yves Saint-Laurent de son vivant. Il y achetait trois maisons, dont le célèbre jardin Majorelle qui se transformait en musée ouvert. Le Musée Saint-Laurent venait, en 2017, rendre hommage au grand couturier.
Serge Lutens, quant à lui, arriva à Marrakech en 1968. Il venait de signer un contrat avec Christian Dior et ne devait pas y rester plus de dix jours. Il resta trois mois. De retour au Maroc en 1972, il se décida à s’installer à Marrakech. Avant de connaître la ville ocre, le parfum ne l’intéressait pas. Mais happé par l’odeur du cèdre, lors de ses déambulations au souk, il finit par traduire ses émotions en senteurs : Féminité du bois, Cèdre, Ambre Sultan…
Une exposition confluente
Il ne pouvait y avoir meilleur écrin pour une telle exposition que le fabuleux palais Dar El Bacha. Décor luxueux, belles façades ouvragés, boiseries et plafonds en bois de cèdres, zelliges inspirés de l’architecture arabo-andalouse : n’est-ce pas ce que le couturier français aurait choisi pour exposer sa propre collection de caftans. Acquise par Yves Saint-Laurent et Pierre Bergé, tout au long de sa vie, ladite collection est le témoin de la noblesse du vêtement identitaire marocain, mais également une source majeure de l’inspiration du couturier.
En résonance, Serge Lutens expose une série de photographies, réalisée dans les années 80, sur les gestes et les ingrédients traditionnels de la beauté.
L’exposition «Étoffe des sens, résonances, Serge Lutens, Yves Saint-Laurent» est une plongée intime dans les secrets de la richesse du costume traditionnel et de l’élégance féminine au Maroc, vus à travers les yeux de deux grands créateurs.
Pour rappel, le public marocain a accès au Palais, pour la modique somme de 25 DH et gratuitement tous les vendredis. Les étudiants y ont également accès gratuit tous les mercredis.