SUIVEZ-NOUS

Culture

L’ennemi public n°1 à  Casablanca

Michael Mann signe un nouveau chef-d’Å“uvre.
Johnny Depp, un braqueur de banques au cœur tendre.

Publié le

rub 14385

Aller voir Public enemies revient à entrer dans l’univers des gangsters sur la pointe des pieds. Car dans ce monde où règnent la mitraillette et le 9mm en maîtres absolus,  on ne réfléchit pas longtemps avant d’appuyer sur la détente. Dans les salles de cinéma marocaines où l’on ne s’étonne plus d’entendre parler et discuter en plein film, cette fois-ci, rien. Le feu de l’action a cloué le bec aux spectateurs. Du début jusqu’à la fin de la séance, pas le souffle d’un mot. Les spectateurs se sont laissés emporté loin, très loin des salles obscures. Dès les premières images, on est situé ou plutôt perdu. Car jeté sans préambule dans l’action. Si l’immersion dans ce monde cruel s’est faite brutalement, on s’installe, par contre, confortablement dans l’histoire et on ne décroche plus. On est dans l’Amérique des années 30 à l’époque de la grande dépression. Et voilà que surgit dans ces moments difficiles un braqueur de banques au charme inégalé, John Dillinger (Johnny Depp), à l’heure où le FBI n’existait pas encore. Dès le début du film, le ton est donné. Les rafales résonnent, se succèdent, on est traqué, cerné par les truands. On s’enfonce presque dans son fauteuil. Les révolvers et les fusils automatiques ne se taisent plus.  Mais, peu à peu, l’angoisse cède la place à la sympathie. On rencontre un Dillinger très attachant. Un homme élégant, beau et même… honnête.
S’il fut braqueur de banques, Dillinger était aussi un Robin  des bois des temps modernes. Il volait l’Etat mais jamais ses concitoyens. A côté du truand, une belle femme, Marion Cotillard (après sa sublime interprétation de la Môme qui lui a valu un Oscar, la voilà à Hollywood, interprétant le rôle de la fiancée de Dillinger). Le film est adapté du roman éponyme de Bryan Burrough.
A Hollywood, le personnage fascine depuis toujours et voici donc une dixième tentative pour le cerner, signée Michael Mann. L’émotion est en suspens, tout au long du film. Elle ne retombe jamais. Le temps est chronométré à la seconde près, à l’image du braqueur de banques qui en fait son meilleur allié. (Une minute 40 secondes pour dévaliser une banque). L’utilisation de la caméra HD (image vidéo de haute définition) a atteint son expression la plus aboutie.
On a rarement vu au cinéma une image aussi nette. Les scènes de poursuites, filmées dans les bois, sont sidérantes de beauté et de précision. L’ombre révèle la lumière et, pour trouver la lumière, il faut la chercher dans les recoins de l’ombre. Si Mann n’a rien inventé et n’a rien rajouté dans cette histoire vraie, il lui a tout de même donné une nouvelle consistance. Le réalisateur s’est joué des effets d’image. Le choix de l’utilisation de la caméra à l’épaule a donné au film sa touche de réalisme et l’a installé dans le présent. Des évasions, des folles poursuites…, le caméraman restitue de près, de très près, le désordre des mouvements, l’inquiétude, la traque.
Empruntant ainsi aux techniques du reportage, les images sont piquées sur le vif ! La caméra à l’épaule est alternée par des effets plus conventionnels. Une réalisation bien tenue où les cadrages bien  serrés révèlent les angles de champ étroit. Un chef-d’œuvre cinématographique. A voir absolument et sans trop tarder.