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Culture

Bargach rend sa toque

Mercredi 5 décembre, Abderrahim Bargach éteignit définitivement ses fourneaux, plongeant l’univers médiatique dans le noir du deuil. Il en était une des figures emblématiques. Portrait d’un touche-à-tout de talent.

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Nous ne serons plus jamais invités à la table de Abderrahim Bargach. En retirant sa remarquable toque, il nous a laissés sur notre faim. Faim de ces petits plats sortis de derrière les fagots, mijotés avec amour et servis avec ce gentil sourire, qui ne quittait jamais ce personnage haut en couleur, au bon sens de l’expression. Sur le chapitre de la cuisine marocaine, il était incollable. Aucune recette ne lui échappait, il se plaisait même à y ajouter son sel, et le résultat était garanti savoureux. C’est pourquoi son émission «Walima», rebaptisée «Maïda», recueillait l’adhésion des télespectateurs.

Sa seconde belle-mère, Zoubida Sebti, fit son éducation culinaire
L’homme, tout en rondeurs, était boulimique. Curieux de tout, il promenait sa bonne bouille partout. Peu importait qu’il n’eût pas une dégaine de jeune premier, il avait enraciné son désir dans le grand écran, il s’y glissa. C’est ainsi qu’il fit quelques apparitions, plus ou moins remarquées dans Yarit de Hassan Benjelloun, A la recherche du mari de ma femme de Mohamed Abderrahmane Tazi et Où vas-tu Moshé ? de Hassan Benjelloun. Un film qu’il ne verra pas. Il y avait incarné un rabbin débonnaire. Rôle étrange imparti à un être plaisamment gouailleur, taquin et un tantinet coquin, ainsi qu’il le montra dans la comédie de situation Ana ou khouya ou mratou signée Saïd Naciri.
Abderrahim Bargach paraissait toujours bien dans sa peau. Pourtant, il traînait une profonde blessure, provoquée par la mort de sa mère, alors qu’il n’avait qu’un an et demi. Son père s’empressa de prendre femme. Elle se révéla une véritable marâtre envers l’enfant. A l’évocation de cette étape douloureuse de sa vie, le visage de Bargach s’assombrissait, pour s’éclairer ensuite au souvenir de sa seconde belle-mère. Autant la première le martyrisait, autant Mme Zoubida Sebti le couvait, le bichonnait, le bouchonnait. Tout en s’attachant à faire son éducation culinaire.
A son retour de l’école, Abderrahim avait droit à sa leçon de cuisine, en bonne et due en forme. Afin qu’il n’épouse pas un jour une servante, mais une femme, lui expliquait son mentor. Aux saveurs et aux odeurs, il finit par y prendre goût. Cependant, c’était de journalisme qu’il rêvait. Il y fit une longue et brillante carrière, avant que le dramaturge Tayeb Saddiki ne le persuadât de bifurquer vers la télévision. Il y entra sans conviction, confessait-il, puis se mit à se prendre au jeu, tant et si bien qu’il devint une des icônes télévisuelles. Une icône aujourd’hui brisée, par la faute de la mort.

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