Culture
«This is it» : chronique d’une mort annoncée
Le film documentaire sorti le 28 octobre met en lumière un artiste qui avait la rage de la perfection.
Le documentaire basé sur des séances de répétitions a été tourné en majorité au Staples Center de Los Angeles, en Californie.
Une armée de danseurs, venus des quatre coins de la planète pour accompagner le mouvement de l’artiste.
Lors de la projection du film au Mégarama, les fans du king l’applaudissaient, comme dans un concert.
On le disait fatigué, déprimé, amaigri, son corps usé. On l’a annoncé presque mort bien avant sa mort….C’est un tout autre Michael Jackson qu’on a vu lors de la projection du documentaire musical This is it au Mégarama de Casablanca, le 28 octobre en même temps que dans les autres salles de cinéma, de par le monde . Le film a montré un MJ en forme, beau, plein d’énergie, fidèle à lui-même, c’est-à-dire exigeant ! Un scénario qui donne une autre lecture, une nouvelle façon de voir la star. Le documentaire basé sur des séances de répétitions a été tourné en majorité au Staples Center de Los Angeles, en Californie. Des séquences de vie, de partage, de travail acharné. Michael préparait un grand spectacle pour ses fans, ses derniers concerts promettaient d’être grandioses. Le documentaire a su marier nostalgie et bonheur. Il a permis de jouir de très beaux morceaux de musique. On retrouve Michael Jackson comme on ne l’avait jamais vu auparavant. Un homme simple, très humble, encourageant les jeunes musiciens qui l’accompagnaient. «Lâche toi, c’est ton heure de gloire», lance-t-il à une guitariste.
Toute sa vie a été traversée par cette exigence, de se surpasser, par la volonté de tout donner. Il en a découlé une musique qui a su traverser les années. On dit que c’est ce qui l’a tué, mais n’est-ce pas de cette exigence qu’est né tout son art ? C’est d’ailleurs sa force créatrice et c’est ce qu’il a essayé de transmettre pendant les répétitions aux danseurs, chorégraphes, musiciens et collaborateurs qui l’ont accompagné dans ses dernières répétitions : «Donnez tout ce que vous avez, on est là pour offrir le rêve aux spectateurs». L’artiste s’impliquait dans les moindres détails de son show sans être directif, Michael corrigeait un mouvement, réglait la balance, augmentait la basse, revoyait les images…
This is it c’est l’épitaphe de Michael Jackson. On y retrouve ses œuvres majeures. «Celles que mes fans veulent entendre», avait-il déclaré lors de la conférence de presse qu’il a donnée en mars dernier pour annoncer ses derniers concerts. Une épitaphe écrite à sa façon, tout en musique. Mais Michael n’a jamais manqué d’originalité, il a abordé tous les rivages, il n’a jamais été un phénomène de mode. Il a, bien au contraire, démodé toutes les modes. Ce qu’il a prévu pour ses fans devait être un show d’une grande beauté.
Une armée de danseurs, venus des quatre coins de la planète pour accompagner le mouvement de l’artiste dans They don’t care about us. L’effet sur les grands écrans est saisissant. Michael a toujours su superposer le virtuel sur le réel. Pour offrir des frissons à ses fans, l’artiste avait tout revu. Pour Thriller -l’album le plus vendu dans toute l’histoire de la musique-, des monstres gigantesques devaient survoler le public, des projections de films en 3D et, pour finir, une araignée métallique géante dévorant l’artiste sur scène…. Un projet énorme avec beaucoup de moyens, comme seul Michael pouvait l’inventer, comme seul Michael pouvait le tenir et l’exiger. Sur scène Michael était heureux de chanter, volcanique, imprévisible.
The show must go on…
Pour faire rêver, on a mis le paquet. Des danseurs éjectés dans les airs, expulsés par une sorte de toaster, des effets pyrotechniques avec des courses de flammes, le spectacle prévu par MJ promettait d’être à la hauteur de la star, c’est-à-dire époustouflant ! Michael Jackson à 50 ans n’a rien perdu de sa forme, ni de sa passion. La musique pour lui a toujours été une sorte d’exutoire ou une thérapie larvée. Des mélodies dansantes aux rythmes endiablés. Un spectacle chargé d’incandescence sans exploser en vol. Son corps parfois devient fou… Ce sont ces images de Michael qu’on a bien voulu nous montrer. Car, faut-il le rappeler, le contrat que Sony a signé avec AEG Live (le promoteur de la tournée This is it), stipulait qu’aucune image de Michael Jackson fatigué ne pouvait être montrée dans le film. On a tenu à redorer l’image de Michael après qu’elle eût été ternie pendant des années. En somme, «offrir le rêve», comme disait l’artiste lui-même à ses collaborateurs pendant les répétitions.
De ces 50 concerts prévus du 13 juillet 2009 au 6 mars 2010, il restera ce documentaire comme un témoignage ou un cadeau à ses fans (et aussi pour payer les dettes de l’artiste). Pour le réalisateur du documentaire, «Michael Jackson est tellement présent dans le film qu’on en oublie qu’il est mort». Cela est d’autant plus vrai que lors de la projection du film au Mégarama, les fans du king l’applaudissaient, comme dans un concert. L’accueil du documentaire démontre à quel point la musique de Michael a su traverser les années. Tout le monde chantait dans la salle de projection. Les fans de Michael étaient bien là.
Pour eux, pour ses derniers concerts, MJ s’est aussi permis un grand saut du côté du cinéma. Michael s’incruste dans un film en noir et blanc avec Rita Hayworth, un rêve hollywoodien jamais achevé.
Une grande émotion a traversé le public du Mégarama lorsqu’on a entendu Man in the Mirror. Depuis la mort de la star, cette chanson a pris une toute autre signification. Car c’est sur cette musique que le cortège mortuaire de Michael a quitté Staples Center.
Pour une poignée de dollars…
Il reste que le film qui a rapporté beaucoup d’argent à Sony n’a pas manqué d’attiser les inimitiés. Le père de Michael avait dénoncé la présence de doublures dans ce documentaire. Accusation que s’est empressé de démentir le producteur du film. Mais, Yann Kervarek le président du fan club français de Michael Jackson a déclaré à la presse française avoir reconnu une image de synthèse de MJ, quand il descend des escaliers, sur le titre Smooth criminal. «Ce n’est pas lui et cela se voit mais c’est la seule fois. Il ne faut pas prêter crédit aux propos de Joe Jackson qui n’en est pas à sa première polémique, même s’il demeure son père. A part cela, il n’y a pas de doublures de Michael Jackson dans This is it». Une des séquences les plus émouvantes du film était celle du début, lorsque les danseurs arrivant des quatre coins de la planète sont venus se faire auditionner devant la star pour l’accompagner dans ses spectacles. Chacun a raconté son histoire…
On a aussi suivi avec bonheur la caméra qui montrait les coulisses, la complicité de MJ avec ses collaborateurs, les chansons de Michael qu’on redécouvre à chaque fois avec bonheur. Le public s’attendait à une compilation de répétitions. «C’est un véritable show», s’exclament les fans de Michael qui étaient présents au Mégarama, lors de la projection.
Michael envoûte même après sa mort. Artiste aux amours contrariés, mort le 25 juin dernier, son single This is it sonne désormais comme un adieu, une oraison funèbre. «Adieu Michael», disaient les fans à la sortie de la salle de projection.
La descente aux enfers
Que retiendra-t-on au final de cet artiste qui avait commencé sa carrière à l’âge de cinq ans avec les Jackson Five et qui a illuminé la scène musicale pendant 45 ans? Sans doute le meilleur… en oubliant, le moins bon. Il y a exactement six ans, en novembre 2003, le bureau du shérif de Santa Barbara (Californie, USA) a enregistré à l’encontre de Michael Jackson une des plaintes pour actes pédophiles. La carrière de l’artiste a évolué ces dernières années entre «bad» et «dangerous».
Les procès intentés à Michael pour pédophilie l’ont complètement anéanti, la star s’est retirée de la scène, mais voilà qu’une heureuse nouvelle fut lancée : 50 méga concerts devant clôturer la carrière de cet éternel enfant et néanmoins génie étaient prévus à Londres à partir de juillet 2009. Le monde était en effervescence. C’est aussi cela l’effet Michael Jackson. Malheureusement, il ne reste de la star que ces reliques, où chacun selon sa sensibilité essaie de lire et d’interpréter la moindre parole, chacun de ses gestes.