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Billetterie : omerta sur le marché noir dans le football !
Une procédure de contrôle du processus de vente des billets existe mais elle est rarement activée. Toutes les recettes des matchs vont aux clubs, hormis au stade Mohammed V où 15% sont versés à la ville.

C’est une activité très opaque du sport-business. Depuis des décennies, la vente des billets de football, surtout lors des grands matchs, se passe toujours dans des conditions très difficiles. Marché noir, renchérissement illégal des prix, pénurie de certaines catégories de billets, etc. Tout y est. Ce fléau, qui s’est amplifié avec le lancement de la Ligue nationale, gangrène l’activité sportive au Maroc. Pour le comprendre, il faut suivre une chaîne qui commence de la fixation du nombre de places à vendre à l’acte d’achat du spectateur. Imprime-t-on plus de billets qu’il n’en faut, pour revendre le reliquat sur le marché noir par le biais de petits trafiquants ? Crée-t-on artificiellement une pénurie en fournissant des lots à des personnes déterminées ? Y a-t-il des réseaux clandestins d’impression de billets ? Difficile de répondre à ces questions. Toutes les personnes contactées refusent de se prononcer sur l’origine des dysfonctionnements. Une source a juste accepté de nous indiquer que toutes les recettes des guichets reviennent aux clubs, hormis à Casablanca où 15% doit être versé à la ville.
La plupart des clubs sont peu outillés pour gérer la billetterie
Cet omerta signifie que le sujet est très sensible dans les milieux du football. On est cependant certain que le système perdure faute de contrôle de la FRMF (voir encadré). Selon un ex-membre du bureau d’un grand club de football marocain, s’étant exprimé sous couvert d’anonymat, «la vente des billets des matchs de football est une problématique économique, avec une problématique fiscale sous-jacente qui n’est jamais soulevée».
En dehors de cela, les clubs sont confrontés à des contraintes logistiques. Hormis le Raja et le WAC qui jouent au stade MohammedV de Casablanca dont la billetterie est gérée depuis un peu plus d’une année par Casa Events, tous les clubs s’occupent eux-mêmes de ce volet en sous-traitant souvent la sécurité ou même la vente. D’où des risques de dérapages organisés ou incontrôlables car rares sont les prestataires privés capables de prendre en charge cette activité de production et de vente de billets.
Casablanca, un cas particulier
«Les infrastructures et les moyens déployés ne sont pas les mêmes chez tous les clubs. Ceux qui attirent le plus de spectateurs nécessitent une logistique plus développée mais, parallèlement, le marché y est plus conséquent. Les magouilles qu’on trouve autour de ces clubs profitent plus au marché noir», commente Ahmed Mernissi, président du MAS. «On ne peut pas éradiquer complètement le marché noir, mais, au Maroc, il est omniprésent et peut parfois dépasser le circuit légal en termes de volume de billets vendus», ajoute un autre interlocuteur.
A Casablanca, Casa Events se veut rassurante. Selon une source bien placée au sein de cette SDL, des avancées importantes ont été réalisées dans la lutte contre le marché noir. «A l’occasion de la dernière rencontre WAC- ES Sétif qui a eu lieu le 21 septembre, la presse a fait état de 5 000 billets vendus sur le marché noir. Tenant compte du fait que le nombre total des billets vendus a dépassé 40 000, cela est très positif, comparé au passé», a-t-elle déclaré. Comment cela a été réalisé ? «Nous avons essayé d’étaler la vente des billets sur trois jours. Cela a permis de faire essouffler le marché noir. Ce marché est généralement très actif durant le premier jour, ce qui crée une grande confusion dans ce processus», a répondu notre source.
Une partie de la solution réside dans l’Internet. C’est peut être pour cela que la SDL envisage de développer des solutions en partenariat avec des opérateurs technologiques. «Ces solutions de vente en ligne concerneront surtout des catégories de billets à prix élevé. Les moins chers ne peuvent pas couvrir les charges», nous dit-on auprès de Casa Events.
Les cartes d’abonnés constituent une autre parade au problème du marché noir. A Casablanca, les deux grandes équipes de la ville développent leurs offres, bien que le nombre des abonnés reste limité comparé aux grandes équipes africaines. Selon nos informations, le club du Raja compte environ 5 000 abonnés. En plus de ces solutions, les portails électroniques, les places numérotées, les tourniquets d’accès et, surtout, les audits des procédures de vente permettront d’endiguer le phénomène.
“Un système de contrôle aux oubliettes”]Le système de contrôle de la vente des billets par les clubs est constitué d’un certain nombre de règles que la FRMF doit faire respecter. Il s’agit entre autres de l’établissement de procès-verbaux, de la gestion du cash ou de la procédure de vente aux guichets. Ce système de contrôle, qui date des années 70, est généralement suivi par des cabinets d’audit privés. Inconvénient : il ne prévoit par l’obligation de dépôt des procès-verbaux dans vingt-quatre heures.
