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Idées

Un amour aveugle aux rides

Il n’y a que les Anglais pour vous concocter
un tel scénario. Une «vieille» qui détrône une «jeune», un homme, prince de surcroît, qui conserve la même passion pour une femme pendant trente-cinq ans, sous quels autres cieux peut-on imaginer une telle histoire ? Ce qui est sûr, c’est que ce n’est pas sous les nôtres !

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La mèche balayée par le vent n’est pas blonde. Elle est blanche. Et elle est celle du marié. Blanche par contre n’est pas la robe de la mariée. Elle est crème. A 57 ans, on ne se marie plus en blanc. Mais là est la seule concession faite à l’âge mûr des fiancés. Avec ses rides à elle, ses tempes grisonnantes à lui, ils se sont juré amour et fidélité pour la vie avec, dans l’expression, la même émotion que n’importe lesquels des amoureux. Car l’amour, le vrai, n’a cure des injures du temps. Sous le regard de Dieu, pour reprendre la formule consacrée, Charles et Camilla sont enfin devenus mari et femme. Au préalable, il leur aura fallu faire pénitence et demander pardon pour leurs fautes. Car fautes il y eut : pendant trente-cinq ans, malgré tous les interdits dont celui d’être liés à des conjoints respectifs, ils se sont aimés.
Des obstacles à surmonter, il y en eut jusqu’au bout. Alors que les derniers détails étaient réglés et la date de la cérémonie arrêtée, la mort du pape est venue contrarier une ultime fois leur union. Mais ce fut là le dernier grain de sable.
Le 9 avril au lieu du 8, la plus mal aimée des Anglaises est devenue la seconde femme, la plus importante du royaume après la reine.
Quand, pour la première fois, Charles d’Angleterre croise Camilla, une cavalière émérite qui aime à prendre le mors par les dents, il est d’emblée subjugué. Non que la demoiselle, alors âgée de 22 ans, soit une reine de beauté – elle n’est d’ailleurs même pas particulièrement jolie – mais sa malice et sa désinvolture sont comme un bouquet d’air frais dans l’univers compassé de la cour. L’héritier de la Couronne britannique est alors un jeune prince gauche et introverti de 21 ans, plus à l’aise dans la compagnie des chevaux que dans celle du beau sexe. Camilla, dont l’arrière grand-mère, Mrs Alice Keppel, fut, en son temps, la maîtresse d’un autre prince de Galles, le futur Edward VII, se charge de le faire sortir de sa coquille. Comme son aïeul, Charles cède au charme de la belle. Mais voilà, l’espièglerie de cette roturière ne peut être du goût de sa Gracieuse Majesté. Cette petite fille de concubine, sa bru ? Impensable. La future reine d’Angleterre se doit d’être une pure colombe. Qu’à cela ne vaille. Camilla ne nourrit aucune ambition royale. La tiare, elle veut bien la laisser à une autre. En fait, elle règne déjà. Sur le cœur du prince qu’elle a définitivement dérobé.
Le monde entier connaît l’histoire. Elle commence par un mariage de conte de fées. Charles, prince de Galles, épouse sous les ors et dans un foisonnement de tulle, Diana. La blondeur enfantine de la jeune fille et ce fard qu’elle pique, chaque fois qu’on l’aborde, lui gagne d’emblée l’affection du bon peuple d’Angleterre. Mais voilà. Dans l’ombre, dit-on, veille une méchante sorcière. La belle princesse s’en va puis meurt. Et, aujourd’hui, c’est sa rivale, cette «fée Carabosse» des temps modernes, qui lui succède. La morale de l’histoire ? Eh bien, malgré les apparences, elle est superbe. Et totalement inédite : l’amour a vaincu la beauté et la jeunesse.
Il n’y a que les Anglais pour vous concocter un tel scénario. Une «vieille» qui détrône une «jeune» dans le cœur d’un homme, où a-t-on jamais vu chose aussi incroyable ! Un homme, prince de surcroît, qui conserve la même passion pour une femme pendant trente-cinq ans et qui, n’ayant cure de ses rides, la mène à l’autel alors qu’elle a 57 ans et lui, «juste» 56 ans, sous quels autres cieux peut-on imaginer une telle histoire ? Ce qui est sûr, c’est que ce n’est certainement pas sous les nôtres !
A toutes les romantiques qui rêvent d’un prince charmant capable de les aimer pour ce qu’elles sont et non juste pour cette enveloppe corporelle que le temps finit toujours par flétrir, l’exemple du prince de Galles offre une raison d’espérer. Des hommes sensibles et profonds pour qui une femme libre, intelligente et non conformiste n’est pas un tue-l’amour, cela peut donc exister. Ce cher Charles, pour faire plaisir à son auguste mère et honorer son rang, a eu pour épouse une femme dont tous les magazines vantaient la beauté et le charme. Mais voilà, lui aimait ailleurs. Moins jolie, plus vieille et autrement moins «pure» était l’élue de son cœur. Aujourd’hui, cet amour interdit a fini par gagner droit de cité. Happy wedding, votre Altesse !