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Idées

L’Europe en quête de son futur

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La conférence intergouvernementale destinée à adopter la future constitution de l’Union européenne vient d’être lancée. Les Vingt-cinq restent divisés sur le sort à réserver au projet de la Convention. Nombre de «petits Etats» veulent revoir la plupart des dispositifs institutionnels. Qu’il s’agisse de la composition de la commission, des modalités de vote dans le conseil des ministres en passant par le nombre de voix qui leur sont attribuées et par l’intégration, dans la configuration institutionnelle de l’Europe, d’un président de l’Union, la fronde des mécontents est profonde. Dix ans après le référendum de Maastricht, le projet de constitution européenne divise les Etats et les partis. Sur fond de scepticisme grandissant de l’opinion, de difficultés économiques et sociales, la construction européenne apparaît de moins en moins lisible aux Européens. Elle l’est encore moins pour les pays partenaires du Sud et de l’Est de la Méditerranée. C’est en cela que les enjeux de la conférence nous concernent aussi.
La déclaration de Barcelone avait défini des objectifs pertinents qui tardent à se concrétiser. L’ambition de départ visait à «établir un dialogue politique renforcé» afin de garantir en Méditerranée un espace de paix, de stabilité et de sécurité. Force est de reconnaître que les principes énoncés dans la déclaration en sont restés au stade du virtuel. La charte pour la paix et la stabilité en Méditerranée est toujours à l’état de projet. L’objectif de Barcelone était aussi la «promotion d’une meilleure compréhension entre les cultures» et le développement des échanges entre les sociétés civiles, ce qui constituait incontestablement l’aspect le plus novateur du processus. Là encore, les acquis ne sont pas à la hauteur des ambitions affichées. Le blocage est essentiellement d’ordre politique. La zone Est et Sud de la Méditerranée reste marquée par des conflits inter ou intra-étatiques, qui hypothèquent le processus.
La volonté politique est insuffisamment forte, de part et d’autre, pour établir un dialogue Nord-Sud approfondi permettant de dégager les contours d’un avenir commun. Cela se traduit par plusieurs interrogations. Adhésion ou association à l’union de pays amis ? Quelles sont les frontières de l’Union européenne au Sud? Les relations avec les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée doivent-elles être considérées principalement sous l’angle sécuritaire ou s’intégrer dans une vision plus large et généreuse, celle d’un vaste ensemble géopolitique partageant un destin commun, sous une forme institutionnelle à définir? Comment faire partager une vision commune à des pays hétérogènes? Comment concilier, pour les pays arabes, leur solidarité avec l’Europe, et leur appartenance à la «Nation arabe», même si celle-ci est plus affective qu’enracinée dans le concret ? Quel rôle d’interface avec les pays d’Afrique sub-saharienne pourraient jouer les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée? Comment concilier l’influence des Etats-Unis qui est politiquement et militairement prédominante dans l’Est et le Sud de la Méditerranée, et la volonté européenne d’une PESC (politique européenne de sécurité commune) autonome, et comment y associer les partenaires méditerranéens non européens ? Comment enfin favoriser la transition démocratique, qui doit nécessairement aller de pair avec l’ouverture sur l’économie mondiale?
Il n’est pas du tout certain que, sur les réponses à apporter à ces questions fondamentales, les vingt-cinq Etats aient des positions convergentes. Il ne fait cependant pas de doute qu’un dialogue approfondi sur ces questions constitue un apport majeur à la reconstruction d’un partenariat plus étroit entre l’Union européenne et les pays du Sud et de l’Est de la Méditerranée. On ne construit l’avenir que sur une vision partagée, un projet commun. C’est là l’ambition de la politique de «nouveau voisinage» ou le projet de «statut avancé». L’Europe du futur? L’Euro-Méditerranée de demain? Ils sont à la recherche d’un nouvel ordre alors que s’est ouverte une ère d’incertitudes. Une recherche qui s’accompagnera d’ajustements longs et difficiles. Le défi consiste à adopter des politiques nuancées, adaptées aux spécificités de chacun des sous ensembles régionaux.