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Idées

Le foncier, un handicap pour l’habitat social

On peut augmenter l’offre de terrains immédiatement mobilisables en apurant les situations foncières
et en incitant à  l’immatriculation. On peut accélérer la mise sur le marché de terrains non bà¢tis en les taxant
un peu plus lourdement. C’est à  croire que le lobby
des propriétaires de terrains mobilisables est plus puissant que les décideurs politiques, sinon,
comment expliquer la forte rétention du foncier ?

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Alors que le logement constitue la deuxième préoccupation des Marocains après l’emploi, les mesures mises en place par le gouvernement se révèlent encore en décalage avec les attentes et les besoins de la population. Il y a pourtant urgence à  agir en la matière. La flambée des loyers, l’explosion des prix de l’immobilier, la toujours insuffisante construction de logements sociaux, le renforcement des inégalités dans l’accès au logement renforcent chaque jour un peu plus cette crise du logement social. C’est quotidiennement que les responsables politiques sont interpellés sur cette thématique, comme est venu nous le rappeler tragiquement le récent effondrement d’immeuble en construction à  Kénitra.

L’état des lieux est sans appel : insuffisance de la construction de logements à  portée des populations pauvres et des classes moyennes, décrochage des incitations à  l’accès à  la propriété par rapport à  l’évolution du coût de la vie. Les Marocains consacrent une part croissante de leurs revenus à  leur habitation, ce qui diminue un peu plus chaque jour leur pouvoir d’achat. Nombre de ménages sont logés dans des conditions indignes d’un pays comme le nôtre. Cet état risque de perdurer. Deux facteurs agissent sur l’ampleur de la demande en logements : l’accroissement démographique et la tendance du mouvement d’urbanisation. Ils ne manquent pas d’exercer une pression sur l’offre de terrains. Or, le système actuel d’offre dans ce secteur ne semble pas en mesure de répondre à  cette évolution. Il constitue une contrainte au développement de l’habitat urbain. Un «système» de causes et problèmes interdépendants explique les difficultés rencontrées par le secteur de l’habitat social.
Tout d’abord, la pénurie de terrains pour l’habitat social : les terrains qui remplissent les conditions requises pour la construction ne constituent qu’une petite partie des terrains identifiés par les documents d’urbanisme. Entre l’offre théorique totale et l’offre réelle, il faut tenir compte d’une série d’abattements tels que la non-immatriculation, les contraintes de forme ou d’étendue, le manque d’infrastructure primaire, l’application de grilles d’équipement.

Ensuite, les dysfonctionnements dans l’application des règles d’urbanisme : le dispositif législatif et réglementaire est caractérisé par un grand nombre de contrôles «ex ante» et un très grand laxisme dans le contrôle «ex post». Les lois sont relativement peu ou mal appliquées et les exigences urbanistiques rendent les opérations trop coûteuses.

Enfin, la lenteur des procédures : les procédures d’immatriculation sont longues, assez complexes et sont conduites individuellement ; la procédure d’autorisation de lotissement est lente ; la mise en Å“uvre de programmes demande trop de temps. Cette durée anormale provoque un ralentissement de l’offre et un gel effectif des terrains. Des délais extraordinaires qui impliquent, de surcroà®t, un fort renchérissement des opérations.

Ne peut-on pas prendre des dispositions pour réduire ces attentes et ramener les exigences urbanistiques vers la demande solvable ? On peut augmenter l’offre de terrains immédiatement mobilisables en apurant les situations foncières et en incitant à  l’immatriculation. On peut simplifier les procédures d’élaboration et d’homologation des plans d’aménagement surtout dans les communes soumises à  une forte pression de la demande. On peut accélérer la mise sur le marché des terrains non bâtis en les taxant un peu plus lourdement. On peut réviser la grille d’équipement pour corriger les effets pervers de l’occupation des sols. Le plus délicat est de mettre en place de nouvelles formes de financement des hors-sites. On doit surtout rechercher une plus grande transparence du marché et créer des structures permettant de généraliser des informations sur les besoins, les transactions, les prix et les réalisations dans les principales agglomérations du pays. A voir l’énumération de ces dispositions, vous allez considérer que je fais partie des adeptes du «il n’y a qu’à …». Rassurez-vous, de grands cabinets d’experts ont statué sur la faisabilité de cette série de mesures. C’est à  croire que le lobby des propriétaires de terrains mobilisables est plus puissant que les décideurs politiques. Autrement, comment peut-on expliquer cette forte rétention du foncier disponible.