Idées
La HACA : qui y croit ?
La Haute autorité de la communication
et de l’audiovisuel (HACA) a besoin d’acquérir sa légitimité dans la pratique, par une défense sans faille
de ses prérogatives. Au fil des ans elle arrivera à imposer, dans les faits, son indépendance. L’expérience du CCDH est, à ce niveau, édifiante. En 13 ans, il a pris consistance, acquis une grande légitimité et la stature
d’une institution fort respectable.
A l’annonce de la liste des sages et du directeur général de la Haute autorité de la communication et de l’audiovisuel (HACA), j’avais trouvé puérils les commentaires d’une grande partie de la presse. Ceux-ci mettaient en cause les individus désignés en doutant de leurs compétences. A mon sens, et je maintiens ma position, le problème n’est pas là et il est impossible de trouver neuf personnes qui fassent l’unanimité, dans un pays où l’organisation de la profession n’est ni faite ni à faire.
Par contre, aujourd’hui je ressens un malaise et il concerne le recrutement. La HACA a «débauché» plusieurs confrères et parmi les plus compétents. Encore une fois, ce ne sont pas leurs capacités, en tant que journalistes, qui sont en doute, ni leur choix personnel qui est mis en cause. Ce qui me met mal à l’aise, c’est leur nombre, quand on sait le genre de travail qu’ils devront assumer. La HACA a besoin de juristes, de financiers, de techniciens et de quelques spécialistes de l’audiovisuel, pas nécessairement journalistes par ailleurs.
Pour tout vous dire, cela me confirme dans un soupçon insupportable : les gens de la HACA n’y croient pas. Ce n’est pour le moment qu’une présomption, mais j’ai l’impression, la nette impression, qu’ils sont convaincus que des décisions se prennent ailleurs et qu’ils ne sont là que pour le décor. Ce qui justifierait alors que l’«on fasse profiter les copains». Réflexe peu valorisant pour les confrères qui ont choisi d’y aller et surtout qui confirme qu’ils ne se croient pas réellement investis d’une mission.
Cette impression se fonde aussi sur des éléments plus objectifs. Ainsi, Médi-Sat et Sawa n’ont pas attendu la mise en place de la loi ou l’avis des sages. Selon toute vraisemblance, on sait qui héritera des chaînes amazighophones. Reste quelques possibilités techniques, qui intéresseront peut-être quelques groupes locaux ou étrangers. Le champ sera très réduit, le cadenas aura bien fonctionné et les suspicieux auront eu raison. Ceci est l’hypothèse pessimiste. Parce que la HACA peut très bien se rebiffer et imposer ses vues. Les textes, en tout cas, le permettent. Personne n’est dupe, nous savons tous dans quel contexte nous sommes. Il est clair que la HACA n’est pas le CSA français, même si nous reproduisions les mêmes textes.
Cette institution a besoin d’acquérir sa légitimité dans la pratique, par une défense sans faille de ses prérogatives. Au fil des ans elle arrivera à imposer, dans les faits, son indépendance. L’expérience du Conseil consultatif des droits de l’homme (CCDH) est, à ce niveau, édifiante. En 13 ans, il a pris consistance, acquis une grande légitimité et la stature d’une institution fort respectable. Cela est possible !
La HACA n’en prendra le chemin que si les sages et l’Administration y croient réellement. Sinon, et cela serait dramatique, ils feront passer leur nomination pour une prime rentière et le budget alloué pour une manne généreuse. Le rôle du président en devient central. Pour le moment, il n’est pas pugnace. Remarque qui n’a rien à voir : le fait que des journalistes de la presse écrite choisissent de pantoufler à la HACA me paraît «normal», le métier n’assure que rarement stabilité et confiance. Par contre, que le promoteur d’une émission télé à grand succès, jeune et talentueux, choisisse de le faire nous renseigne sur la profondeur du malaise à 2M. Petite perfidie sans importance ; on pensait que la HACA aiderait au renforcement de l’audio-visuel, elle commence par puiser dans les rares compétences existantes en vue d’un pantouflage à l’utilité incertaine.
P.S. Même toi Naïm !
Naïm Kamal a choisi d’ «affronter» Ziane sur les plateaux d’Al Horra. Mon point de vue est connu : cette chaîne de propagande, financée par le département d’Etat et coachée par la CIA, doit être boycotée. Naïm a été de tous temps précautionneux quand il s’agit des Américains. Je ne comprends pas qu’il accourt pour y croiser le fer avec un ministricule ridicule au sujet d’un cadavre politique putride que l’acharnement thérapeutique (médiatique) ne réanimera pas. Quelle est l’utilité de l’exercice ? Je n’en vois aucune. A moins que l’appel des sunlights soit irrésistible même pour une personnalité telle que mon ami Naïm, qui n’a aucun mal à s’exprimer là où il veut. Souvent pour rappeler son opposition à l’impérialisme américano-sioniste d’ailleurs. Ce qui ajoute à ma perplexité ! Qu’a-t-il à raconter sur la chaîne de la CIA qu’il ne puisse défendre ailleurs, avec une audience plus large et une crédibilité moins entachée ?