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Idées

CIMR : comment certains cotisants sont lésés par la réforme

Depuis la réforme de la CIMR visant à  corriger sa «trop grande générosité» et à  préserver l’équilibre du système, le prix de vente des points augmente de 4 % chaque année, alors que la valeur du point de liquidation stagne à  11,64 DH depuis 2002. Si le souci d’équilibre de la CIMR est légitime, dans les faits, le sacrifice ainsi demandé aux affiliés est supporté par les seuls salariés dont les rémunérations n’augmentent pas.

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La Caisse interprofessionnelle marocaine de retraites (CIMR), dans le cadre des règles de transparence qu’elle a mises en place, offre cet avantage à ses affiliés qu’ils peuvent à tout moment connaître leur situation individuelle : le nombre de points acquis chaque année, la valeur du salaire de référence, la pension estimative acquise, la pension estimative projetée, etc.

Si la CIMR met ces informations à la disposition de ses affiliés, c’est bien pour que cela serve à quelque chose. Comme, par exemple, constater que, d’année en année, l’on acquiert de moins en moins de points, tout en assurant pourtant un même niveau de cotisation. Bien sûr, le pourquoi du comment, on le connaît, et cela date au moins de la réforme de la caisse de 2003.

En effet, alors que la valeur du point de liquidation stagne à 11,64 DH depuis 2002, et ce jusqu’en 2010, la valeur du salaire de référence (ou la valeur du point d’acquisition), elle, augmente chaque année de 4% : elle était de 10,40 DH en 1995 (à titre d’exemple), elle est de 17,22 DH en 2007. Cela fait une augmentation de 65,6% en 12 ans, soit 5,04% par an. Il s’ensuit que si votre rémunération n’augmente pas chaque année, vous perdez automatiquement, tous les ans, 4% du nombre de points acquis l’année précédente.

Cette réforme, rappelons-le, la CIMR l’a mise en œuvre pour préserver l’équilibre du système, menacé par la «trop grande générosité» qui le caractérisait par le passé. C’est donc un sacrifice qui est demandé aux affiliés, mais ce sacrifice, en réalité, n’est véritablement supporté que par les salariés dont les rémunérations ne progressent pas. D’ailleurs, l’augmentation de la valeur du point d’acquisition de 4% par an n’est rien d’autre que l’évolution moyenne des rémunérations, constatée par la CIMR chez ses affiliés. C’est bien la preuve que les salaires augmentent. Mais augmentent-ils pour tous ? Evidemment non, puisque le taux de 4% n’est qu’une moyenne.

Cela pose au moins deux questions. La première est que, au moins chez les entreprises adhérentes (au nombre de 4 071 à fin 2006, ce qui n’est pas mal, d’autant qu’il s’agit pour la plupart de «grosses boîtes»), les salaires ne cessent d’augmenter pour certains et sans doute à des rythmes plus élevés que 4% (qui n’est qu’une moyenne, une fois de plus), soit bien plus que le niveau de l’inflation. Celui-ci n’a pas dépassé en effet une moyenne de 2% sur ces dernières années.
La question est de savoir pourquoi certains pâtissent de cette réforme et pas d’autres ! Et cette question, en fait, interpelle moins la CIMR – qui doit en effet prendre en compte les intérêts des futurs retraités – que les entreprises adhérentes qui, elles, doivent aussi se soucier du pouvoir d’achat de leurs salariés ; et en l’occurrence du pouvoir d’achat des points pour leur retraite.

Ce sont toujours les mêmes qui payent pour la maîtrise de l’inflation ou l’augmentationde la productivité !
La deuxième question, très étroitement liée à la première, est la suivante : pourquoi, dans cette relation contractuelle entre la caisse et ses affiliés, une partie estime, à bon droit, devoir tenir compte de la hausse moyenne des salaires pour fixer le «prix de vente de ses points», et pas toutes les autres ? Plus généralement, pourquoi tout le monde (sauf dans le cas des prix réglementés) peut, s’il le juge nécessaire, augmenter les prix de ses produits et/ou services, alors que c’est rarement le cas pour les salaires, sauf pour une certaine catégorie de salariés ?

Pourquoi la question de l’indexation des salaires sur l’inflation, chaque fois qu’elle est évoquée, soulève-t-elle un tollé général ? Souvent, l’argument avancé pour repousser une telle proposition, c’est que celle-ci, si elle devait être appliquée, précipiterait le pays dans un cycle inflationniste ravageur ! Pourtant, des hausses de salaires, il y en a bien chaque année, et la preuve est que la CIMR s’aligne sur le niveau moyen de ces hausses pour augmenter le prix de vente de ses points ! La seule explication à cela doit résider dans le fait que ces hausses concernent certains et pas tous.

Autrement dit, ce sont toujours les mêmes qui payent pour la maîtrise de l’inflation ou l’augmentation de la productivité ! De grosses bagarres (sociales) éclatent quand il s’agit de donner quelques dirhams supplémentaires aux salariés de base, au motif que cela rognerait la compétitivité, mais dès que l’on franchit un certain seuil dans la hiérarchie des entreprises, les notions de compétitivité, d’inflation s’évanouissent…

C’est connu, les sacrifices, c’est toujours aux autres qu’on les demande, et c’est toujours les autres qui doivent les supporter. Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais…