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Bravo et merci !

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rub 4427

Bravo Majesté ! Bravo Si M’hammed Boucetta ! Bravo Mesdames et Messieurs de la Commission consultative chargée de la réforme de la Moudouwana ! Bravo et merci ! Nous étions nombreuses (et nombreux) à avoir cessé d’y croire. A force de désillusions répétées, le regard avait fini par se faire défaitiste. Pas, bien entendu, chez les militantes des associations féminines qui, à aucun moment, n’ont baissé les bras, revenant avec une persévérance remarquable à la charge mais chez nous, citoyennes – et citoyens – de base échaudés par tant de promesses non tenues et de beaux discours sans lendemain. Autant vous l’avouer avec sincérité : nous ne nous attendions pas à ce que vous fassiez preuve de ce courage politique. Or vous l’avez fait. Et vous nous avez surpris. Vous avez osé cette révolution juridique – et mentale ! – qui consiste à enfin introduire la notion d’égalité entre les sexes au sein de la famille. La femme marocaine cesse d’être cette mineure à vie qui ne quitte la tutelle de son père que pour passer sous celle de son mari. Responsable, elle le devient au même titre que l’homme de cette cellule familiale qu’ils construisent à deux. Certes cette égalité reste foncièrement formelle, elle appartient à l’univers des concepts théoriques et le chemin sera sans aucun doute long avant qu’elle ne se traduise avec une force significative dans la réalité des faits. Mais cela ne réduit pas l’importance et la dimension révolutionnaire de l’acte posé. Car en la matière, c’est vraiment de révolution qu’il s’agit. Une révolution attendue depuis si longtemps, une révolution à la fois fondamentale et basique. Fondamentale car sans cette sortie de la femme de son statut d’éternelle mineure, l’accès à la citoyenneté pleine et entière de la moitié de la population demeurait un vœu pieux. Basique cependant car elle n’est que ce premier pas qui ouvre le chemin et rend possible l’avancée. La complexité des mutations en cours dans notre société est telle que le balancier s’affole, basculant sans cesse d’un extrême à l’autre. Les résistances au changement s’expriment avec autant de force que la volonté moderniste de rompre avec des traditions qui enferment et figent.
Mais il est une donnée que nul ne peut nier tant son évidence est grande: l’entrée en force des femmes dans l’espace public et leur affirmation en tant qu’acteur économique présent à tous les échelons de la hiérarchie sociale. Au sein de la famille, le partage des responsabilités n’a pas attendu le droit pour s’imposer dans la réalité des faits. Plus encore, voilà déjà bien longtemps que les statistiques nationales mettent en exergue l’importance du pourcentage de femmes assumant le statut de chef de famille, en raison soit de l’absence de l’homme soit de son incapacité financière. Sur le plan économique donc, avec une population active à 35% féminine, il y a belle lurette que les lois devenaient en complet décalage avec l’évolution sociale. Reste le plus lourd, le plus dur à faire bouger : le poids de la mentalité traditionnelle. L’instruction et l’accès au travail ont certes permis aux femmes de disposer d’une certaine indépendance économique. Ils ne les ont pas pour autant protégées des comportements machistes tant au sein de la famille que dans l’environnement social en général. La crise économique aidant, les hommes vivent avec beaucoup de difficulté la remise en question de leur position de détenteurs de pouvoir. Le résultat, c’est cette exacerbation des tensions au sein du couple, avec pour conséquence l’éclatement de la famille et la propagation d’une idéologie rétrograde visant le maintien des femmes en position de soumission et de dépendance.
Avoir tranché – ENFIN ! ! ! – dans le sens d’une modernisation et d’une désacralisation du code du statut personnel, voilà le meilleur cadeau que l’on pouvait faire à l’ensemble de la société marocaine. Pas à la femme uniquement mais à l’homme aussi car les chaînes qui emprisonnent sa compagne l’emprisonnent aussi sous une autre forme. Alors, encore une fois, BRAVO à tout le monde mais avec une pensée particulière pour les militantes féministes qui n’ont jamais baissé les bras. A Nezha Skalli, Amina Lamrini, Latifa Jbabdi, Leila Rhiwi et à toutes leurs camarades, magnifiques et admirables autant les unes que les autres. Et pour un homme, aussi, dont on ne peut oublier l’engagement sans