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Au Royaume

Poussière sous le tapis

On a maladroitement
tenté de se débarrasser
d’un problème devenu
trop visible. Il est certain que des erreurs ont été commises, mais s’est-il trouvé un responsable pour parler de cela ?

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Les images d’immigrés clandestins livrés à eux-mêmes aux portes du désert, de ceux morts lors d’affrontements avec les forces de l’ordre marocaines ou espagnoles ont vite fait le tour du monde. Le temps d’un week-end, le Maroc est apparu comme un pays de barbares inhumains : l’ère du prêt à consommer en information ne s’embarrasse pas de contextes.
Quinze jours après le début des assauts sur Sebta et Mellilia, on peut faire un premier constat : non seulement le gouvernement n’a pas su gérer la crise mais, de plus, il n’a rien fait pour en atténuer l’impact médiatique, ni informer ces boîtes de résonance que sont les Ong.
Disons-le tout crûment, on a tenté précipitamment de se débarrasser d’un problème devenu trop visible. Il est certain que des erreurs ont été commises, mais s’est-il trouvé un responsable pour parler de cela ? A-t-on pris la peine d’expliquer les décès survenus ? Si ce sont des forces marocaines qui on tiré, étaient-elles en état de légitime défense ? Au lieu de fournir des réponses, la communication officielle se borne à rapporter les rencontres «fructueuses» des responsables gouvernementaux et des rapatriements brandis comme des trophées. Succès ? Enregistrez. Echec ? Circulez il n’y a rien à voir… Sauf que les médias étrangers ont vu et il ne s’est pas trouvé un responsable pour expliquer que si ces clandestins ont pu vivre au Maroc durant de longues années, c’est bien parce que la population et les ong leur fournissaient de l’aide. On peut être barbare par erreur mais on est certainement «humain» par nature.
Ce n’est pas le seul reproche que l’on pourrait faire à notre gouvernement. Il y a également le fait que
– justement – ces clandestins sont là depuis plusieurs années et qu’on a laissé faire, tentant mollement de réguler une population comme l’on cacherait la poussière sous le tapis pour que le parquet soit bien nickel. Comble, une chaîne publique s’est même payé le luxe, il y a un an et demi, de réaliser un excellent documentaire sur la question. S’il a ému le peuple, il n’a pas fait frémir l’autorité. Bel Younech et gourougou ne sont pas nés hier et des ong ont prévenu, il y a déjà quelques mois, de l’imminence des assauts contre Sebta et Mellilia.
Aujourd’hui, on est brutalement passé de la poussière sous le tapis à une situation dangereuse, explosive.
Ces clandestins sont des milliers, leur nombre et la précarité de leurs conditions en font une menace réelle pour le pays, comme on l’a vu dans d’autres régions d’Afrique. La situation exige aussi la fermeté. Sans brutalité.