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Au Royaume

Cher chômage…

Les statistiques sont têtues. Qu’elles plaisent ou pas, elles viennent nous rappeler la réalité telle qu’elle est sur le terrain en dépit des discours, des déclarations d’intention, des efforts fournis et même des réalisations.

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Edito Saad Benmansour

Les chiffres de l’emploi et du chômage sont l’illustration parfaite de ce décalage frustrant. Car en dépit de ce qui a été fait, ce qui se fait actuellement et de ce qui est annoncé, l’économie marocaine n’arrive toujours pas à trouver le bon rythme pour créer suffisamment d’emplois. En atteste la dernière livraison du Haut commissariat au plan (HCP) qui indique qu’en l’espace d’un an, de septembre 2016 à septembre 2017, ce sont 42 000 nouveaux chômeurs qui sont venus grossir les rangs des demandeurs d’emploi, ce qui a fait passer le taux de chômage national de 10,4 à 10,6%. Le problème n’est pas tant dans le nombre lui-même de chômeurs mais dans leur profil.

Aujourd’hui, sur les 1 236 000 chômeurs, presque un million sont en fait des diplômés et des jeunes. C’est cela qui doit inquiéter le plus et interpeller les décideurs, qu’ils soient dans le public ou dans le privé.

Ces diplômés ont d’abord coûté à l’Etat, au contribuable marocain entre 160 000 et 200 000 DH chacun selon les estimations officielles. Donc un million de chômeurs représentent au bas mot une dépense publique de l’ordre de 160 à 200 milliards de DH qui ont déjà été déboursés et qui ont lourdement pesé sur les finances publiques. A cela il faut ajouter un manque à gagner pour l’économie. Car si ce million de diplômés étaient actifs, ils paieraient aujourd’hui, au moins, un impôt sur les revenus (IR) à raison d’une moyenne, estimée par la DGI, de 9 000 DH chacun. Avec un million de diplômés chômeurs, l’Etat se trouve en fait privé d’une recette fiscale d’au moins 9 milliards de DH par an.

Et pour rester dans le giron des finances publiques, l’Etat accepte chaque année de renoncer à l’équivalent de 33 milliards de DH d’impôts, sous forme d’exonérations, au profit des entreprises qui, en toute logique économique, devraient, en contrepartie, investir pour créer de la richesse et des emplois. C’est loin d’être le cas aujourd’hui. Sans oublier, enfin, le manque à gagner pour toute l’économie qui est privée des milliards de DH qui auraient été injectés par ces diplômés s’ils étaient actifs, en termes de dépenses de consommation, d’acquisition de logements et de voitures, de ressources et de crédits pour les banques… Le chômage, particulièrement celui des jeunes diplômés, coûte en fait trop cher au Maroc, à son économie, au contribuable. Si les chiffres n’interpellent pas sérieusement les décideurs, cela veut dire que l’on admet que le Maroc a les moyens de se permettre le luxe de jeter 200 milliards de DH par les fenêtres et de snober chaque année l’équivalent de 9 milliards de DH de recettes pour les caisses de l’Etat. Et au moment où l’on parle d’efficacité et d’efficience des politiques publiques en termes de rendement, le Maroc continue à dépenser des milliards de DH au titre de l’enseignement et de l’éducation sans se soucier du résultat final…