Au Royaume
Autonomie
L’orientation affirmée que semblent prendre les pouvoirs publics en faveur de l’encouragement du produit national n’est pas à présenter seulement sous son angle purement comptable en la considérant comme un moyen de faire économiser au pays des sorties en devises.

Des analyses vont plus loin encore en donnant à cette option une portée économique stratégique. Encourager le produit « made in Morocco » devrait mécaniquement se traduire par des opportunités d’investissement pour les opérateurs et les industriels marocains et donc de la création d’emplois au Maroc. Ce sont là des bénéfices économiques et sociaux certains en plus du gain en termes de dépenses en devises.
Et bien au-delà de ces effets directs, développer la production nationale, en plus évidemment d’accélérer l’industrialisation peut être un facteur de transformation majeur pour les années à venir.
Dans une récente expérience tentée dans la région du Souss, un exploitant agricole, qui avait l’habitude d’importer d’Allemagne des machines truffées d’électronique pour le tri de sa production, a eu l’idée de demander à une PME marocaine d’ingénierie de lui en fabriquer une. Le résultat a été sans appel. Non seulement, les ingénieurs marocains ont fabriqué une machine avec les mêmes standards et les mêmes performances mais, en plus, à un coût qui est du tiers seulement, soit une économie de 66% sur l’investissement. La machine marocaine a coûté 20 millions de DH contre 60 MDH pour celle importée d’Allemagne.
C’est connu, la compétitivité des entreprises de textile turques est due en grande partie au fait que la quasi-totalité de leurs machines et outils de production est produite en Turquie. Le secteur textile sur lequel le Maroc est positionné, mais fortement concurrencé, pourrait voir sa compétitivité nettement boostée à travers des équipements fabriqués localement, mais tout aussi performants. Et il faut croire que le Maroc a toutes les compétences en ingénierie pour le faire.
Une crise sanitaire mondiale, telle que celle que traverse le monde depuis mars a montré, s’il en était encore besoin, combien il est dangereux pour un pays de se retrouver subitement impuissant parce que dépendant totalement ou presque des autres dans des domaines tels que l’alimentation, la santé, le médicament. Heureusement, cela n’a pas été le cas pour le Maroc. Demain, il n’est pas impossible que le monde se retrouve face à d’autres crises majeures de nature différente, climatique, financière, politique ou autres. Et comme pour le Covid-19, la résilience sera différente d’un pays à l’autre, selon son degré d’adaptabilité, ses capacités à mobiliser et exploiter ses propres ressources, son niveau de dépendance ou d’indépendance… Encourager le produit national ne devrait pas être synonyme d’un renfermement sur soi. Le vrai défi c’est de trouver le bon dosage entre l’ouverture irréversible du Maroc sur le monde et la nécessité de préserver une autonomie d’action suffisante pour se protéger.
