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Affaires

Ramadan : le chiffre d’affaires des pharmacies chute de 25%

Le repli est normal pour une telle période, mais l’ampleur en est plus importante que les années passées Le médicament a été sacrifié au profit de l’alimentaire et de la rentrée scolaire.

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C’est un Ramadan pas comme les autres pour les pharmacies. Même s’ils sont habitués à un repli de leur activité durant ce mois de jeûne, les professionnels ont constaté que la baisse était plus prononcée cette année. La chute du chiffre d’affaires varie entre 20 à 25% par rapport à une période normale, alors qu’au cours des années précédentes, la baisse n’était que de 10 à 15%.

Les officines des quartiers populaires sont les plus touchées. Selon un pharmacien de Ain Sebâa, c’est carrément catastrophique puisqu’il affirme que son chiffre d’affaires est passé de 5 000 DH à 800 DH par jour. A l’en croire, la situation est aggravée par le fait que même les médicaments pour l’appareil digestif, qui constituent généralement l’essentiel des ventes durant cette période, sont très peu demandés cette année.

Les officines des quartiers populaires sont les plus touchées
Le syndicat des pharmaciens de Casablanca confirme le phénomène et souligne que son ampleur est accentuée par la coïncidence du Ramadan avec la rentrée scolaire, tous deux facteurs de fortes dépenses. Il tient toutefois à préciser que «les pharmacies peuvent se rattraper partiellement le soir dans la mesure où elles ouvrent de 20 h 30 à 22 heures».

Mais cette possibilité d’ouvrir après le f’tour n’est offerte qu’aux officines de Casablanca, après accord avec la wilaya qui en fixe les horaires d’ouverture et de fermeture. L’exemple sera probablement suivi à Rabat dans l’avenir, indique-t-on toutefois.

Cette baisse vient aggraver une situation de crise qui a sévi dans le secteur ces dix dernières années. En effet, les 10 000 officines du pays (4 000 il y a 7 ans) ne sont pas toutes en bonne santé et, selon la Fédération des syndicats des pharmaciens, 40% d’entre elles sont en difficulté.

D’ailleurs, plusieurs fermetures par voie judiciaire ont été enregistrées. Le pharmacien en général criblé de dettes auprès des fournisseurs n’a d’autre choix que de cesser son activité ou de se déplacer dans une autre ville. Car, faut-il préciser, plus de la moitié des officines sont concentrées sur l’axe Kénitra-El Jadida.

La crise de ce secteur est essentiellement due, selon le syndicat des pharmaciens de Casablanca, à plusieurs facteurs, dont la multiplication des ouvertures. Les dernières années, on comptait environ 1 000 nouvelles installations par an et les règles du chaînage (distance minimale entre deux pharmacies, fixée à 300 m à vol d’oiseau) ne seraient pas respectées. Aujourd’hui, indiquent certains médecins, et suite à la publication du décret d’application relatif au chaînage, le rythme des ouvertures baissera de 80%, d’après les prévisions du syndicat.

Et les nouvelles installations, affirme-t-on, se feront exclusivement dans les quartiers nouveaux.
Autre cause de la baisse du chiffre d’affaires : la commercialisation des génériques. Elle a «tiré les prix des médicaments vers le bas sans pour autant augmenter le volume des ventes.

Certains médicaments vendus 200 DH par le passé le sont désormais à 50 DH seulement !», se plaint un pharmacien qui reconnaît quand même l’intérêt social de la commercialisation des génériques. L’espoir est que l’actuelle campagne, qui a coûté 4 MDH à l’Agence de l’assurance maladie obligatoire (Anam), stimulera la demande et, in fine, permettra de compenser la baisse des prix.

Enfin, les pharmaciens estiment que l’Amo n’a pas produit l’effet attendu. «La couverture médicale portant essentiellement sur les pathologies chroniques, nous sommes fortement concurrencés sur ce créneau par les associations ainsi que les cliniques», explique un pharmacien qui tient à préciser que plusieurs produits, comme l’insuline ou certains vaccins, ont aujourd’hui totalement disparu des étalages des officines.

Ils dénoncent cette concurrence déloyale et invitent les pouvoirs publics à agir… Reste qu’une intervention publique directe dans ce dossier est très difficile à envisager car le but de ces associations est, justement, de faciliter l’accès aux soins à des populations à faible pouvoir d’achat.