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Affaires

Les banques participatives maintiennent le cap malgré la pandémie

• Elles ont tourné le dos à la crise mais continuent de souffrir de contraintes exogènes.
• La loi sur l’assurance Takaful, toujours coincée chez la DTFE.
• Le coût de financement se renchérit.
• Les banquiers restent optimistes pour l’année qui commence.

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Banques participatives

S’il y a un secteur qui s’est bien porté, même pendant cette crise sanitaire, c’est celui des banques participatives. A fin octobre, l’activité commerciale est bien orientée avec des encours de financement et de dépôts en progression. L’encours des dépôts a donc augmenté de 20% par rapport au début de l’année, pour atteindre 3,5 milliards de DH, contre un encours de financement en croissance de 35% à 12,3 milliards de DH. «Les réalisations restent en dessous de nos ambitions par ce contexte particulier, mais nous pouvons déjà nous targuer d’avoir affiché des performances en croissance», assure un banquier.
Cela dit, elles restent toujours confrontées aux difficultés de refinancement. Face à l’incomplétude de l’écosystème en terme de produits de financement, à l’inexistence d’un marché interbancaire participatif et à l’impossibilité de se refinancer auprès de BAM, les banques se rabattent sur la wakala bil istithmar et dans une moindre mesure sur les dépôts d’investissement. D’ailleurs, les premières ont atteint 4,1 milliards de DH, en hausse de 28%, au moment où les secondes se situent à 693 MDH, soit plus du double de leur niveau en début d’année. «Ces moyens de refinancement restent suffisants pour certaines banques dont l’assise bilancielle est solide. D’autres, par contre, peinent à trouver un juste équilibre entre le refinancement qui est généralement de court terme et le financement qui, lui, est de long terme», explique un professionnel du secteur. Un autre souligne que «le refinancement des banques s’en trouve ainsi nettement plus cher, comparativement aux banques conventionnelles. Alors que ces dernières se refinancent auprès de BAM à 1,5%, les banques participatives le font entre 2% et 3% à travers les wakalat bil istithmar, où les dépôts d’investissement (coût de la rémunération du refinancement auprès de la banque mère, ou des clients dépositaires)».
Le gros du financement mourabaha est concentré sur l’immobilier avec une part de 85%, à plus de 10 milliards de DH, en hausse de 33% depuis début 2020. L’encours du financement à la consommation, lui, s’affiche à peine à 941 MDH (+33%) et celui à l’équipement à 774 MDH (+76%). En fait, «ce n’est pas une situation propre au Maroc. Dans tous les pays où la finance participative est implantée, le financement mourabaha immobilier accapare un poids important du financement global», fait remarquer Youssef Baghdadi, président du directoire de Bank Assafa. Il ajoute que les banques participatives ne sont toujours pas considérées comme des banques à part entière. Elles sont plus assimilées à des établissements de financement. Ce qui représente l’une des contraintes du développement du concept banque participative au Maroc.
Il faut dire aussi que l’absence de plus en plus pesante de l’assurance Takaful représente un frein d’accès à la banque participative. Les textes de loi ne sont toujours pas sortis des tiroirs. En face, certaines compagnies d’assurance se disent prêtes à lancer cette assurance. Quatre compagnies d’assurance et une autre de réassurance ont déposé leur dossier d’agrément auprès de l’ACAPS. De son côté, la circulaire sur Takaful est finalisée et sera bientôt de sortie. En revanche, la loi sur Takaful coince toujours auprès de la DTFE, qui n’a pas répondu à nos questions, malgré nos nombreuses sollicitations.
En tout cas, cette année est passée sans grand relief, dans le sens où rien n’a vraiment changé dans l’offre globale des banques, mis à part le lancement du produit Salam. Et même si ces établissements bancaires ont également bénéficié de la garantie CCG pour les financements, aussi bien au profit des particuliers que des entreprises, il n’y a pas eu un fort engouement, quoique quelques dossiers aient été remis à la CCG et sont en attente d’approbation.
L’année 2021, optimisme oblige, les banquiers l’appréhendent avec sérénité. En effet, l’offre devrait être plus complète avec les produits Moucharaka et Moudaraba, mais aussi avec l’assurance Takaful. En bref, l’année prochaine sera décisive. «Avec une offre générale de financement touchant la clientèle corporate et celle des particuliers, plus d’excuse valable pour continuer à reprocher aux banques l’incomplétude de leur écosystème», conclut M.Baghdadi.

Said