Grandes manÅ“uvres pour le contrôle du terminal Est du port de Casablanca
Les dockers acceptent l’unicité de la manutention mais craignent une situation de monopole de la Sodep.
La mise en œuvre de la réforme portuaire a commencé avant même le début de la discussion du projet au Parlement. Des négociations sont en cours, conduites simultanément avec l’ensemble des partenaires. Une solution a même été trouvée pour l’organisation de l’activité au niveau du port de Casablanca, qui peut représenter le principal blocage à cette réforme.
Pour passer de l’actuel système, qui tourne autour d’un centre d’embauche des dockers intervenant à bord des navires, au futur système qui prévoit l’unicité de la manutention des navires aussi bien à bord qu’à terre, les négociations entre le ministère de l’Equipement et les stevedores (sociétés qui emploient les dockers) ont abouti à l’idée d’une fusion de toutes ces sociétés en une seule, qui absorberait le centre d’embauche.
800 emplois de dockersà sauvegarder
Le centre d’embauche est en effet l’unique entrave à l’unicité de manutention. L’explication est qu’il affecte les dockers non pas en fonction de leurs employeurs mais plutôt par rapport à la charge de travail au port. A cet égard, il faut noter que les dockers sont des employés des stevedores qui leur donnent une rémunération de base mensuelle variant entre 8 000 et 9 000 DH/mois, en plus des primes de tonnage et de gratification, variant entre 2 000 et 3 500 DH/ mois, servies par le centre d’embauche. Celui-ci n’est d’ailleurs que l’émanation de l’Assamat, l’association regroupant les stevedores.
De prime abord, cette solution ne contredit pas les doléances des dockers, regroupés autour du Syndicat des dockers professionnels et assimilés, affilié à l’UMT (Union marocaine du travail). Selon son secrétaire général, Saïd Elhairech, sa corporation est «favorable à la réforme portuaire». Il explique que la seule condition posée est que les intérêts des dockers soient pris en compte. Il faut lire entre les lignes que le syndicat des dockers attend des propositions du ministère imaginant un nouveau système où les dockers seraient gagnants.
Meilleure délimitation
des responsabilités et moindres coûts avec l’unicité de la manutention
Par rapport à la création d’une seule société regroupant la totalité des stevedores de Casablanca, M. Elhairech répond positivement, mais à la condition, dit-il, que «la Sodep [ndlr : Société d’exploitation des ports] ne prenne pas le monopole du port de Casablanca». Il veut s’assurer que l’activité que générera la nouvelle société émanant de la fusion des stevedores garantit l’emploi des 800 dockers de Casablanca. En fait, l’enjeu porte sur la concession du terminal à conteneurs Est. Les stevedores désirent s’assurer une partie de l’activité du port à conteneurs alors que les cadres de l’Odep (Office d’exploitation des ports) voudraient qu’il soit du seul ressort de la Sodep qui viendra remplacer l’office.
Selon les premiers, si la Sodep prend la concession de tout le terminal à conteneurs Est, il y aura situation de monopole, car les porte-conteneurs d’une certaine importance ne peuvent accoster que dans ce dernier.
Pour les cadres de l’Odep, la concession d’une partie du quai en question aux stevedores entraînerait sa faillite. La raison invoquée est que les stevedores, filiales de compagnies maritimes, sont bien positionnées pour attirer la majeure partie du trafic.
Tout de même, l’ensemble des intervenants est convaincu que la solution à moyen terme est que la Sodep investisse dans le transport maritime. Mais, en attendant, il faudra trancher. Selon ses cadres, l’Odep aurait déjà consenti beaucoup de concessions en acceptant de céder, au port de Casablanca, les quais à conteneurs Tarik et celui des Roro.
Au ministère, il est indiqué qu’il reste à convaincre, chiffres à l’appui, les stevedores que le volume d’activité de ces quais, en particulier Tarik, est intéressant. D’ailleurs, c’est ce point de discorde qui a retardé la signature de la convention sur les amendements du syndicat de l’Odep entre le ministère de l’Equipement et du Transport et ledit interlocuteur.
Toutefois, quasiment tous les intervenants se sont ralliés aux points jugés positifs de la réforme, en particulier pour ce qui est du volet de l’unicité de la manutention à bord et à quais. L’avantage attendu étant la réduction des coûts et une meilleure délimitation des responsabilités.
Le ministère de l’Equipement et du Transport n’attend donc plus que la signature de la convention pour engager les discussions à la Première Chambre d’ici à deux semaines au maximum, selon des sources proches du dossier.
Le texte devrait entrer en vigueur une année après sa publication au Bulletin Officiel. Mais les syndicats représentant le personnel de l’Odep, par leur volonté de définir de prime abord les quais qui seront concédés à la future Sodep, qui prendra en charge l’activité commerciale de l’office, ont accéléré la définition de la stratégie de la mise en œuvre de cette réforme.