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Crédit-bail : un premier trimestre sans relief

La production est inférieure à 4 milliards de DH, selon certaines estimations. Les financements concernent principalement le matériel roulant et les machines et outillage. La Banque centrale exhorte les sociétés de crédit-bail à s’intéresser à l’agriculture et aux énergies propres.

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Assurance credit

Le crédit-bail peine toujours à s’imposer en tant que mode alternatif de financement auprès des PME et des TPE. D’après quelques opérateurs du secteur, le premier trimestre a été plat. Contactée par nos soins, la section leasing de l’Association professionnelle des sociétés de financement (APSF) informe que les chiffres agrégés de 2018 ne sont pas encore disponibles. Il n’empêche que, comme le rapportent les acteurs sondés, les transactions se situent légèrement en baisse par rapport à la même période de 2017. D’après des estimations, la production est en dessous de 4 milliards de DH à fin mars. «Les quelques dossiers financés chez les sociétés de leasing correspondent à du matériel roulant en premier lieu, suivi des machines et outillage», confie un directeur engagement chez un grand opérateur.

De son côté, le crédit-bail immobilier est toujours en panne. La conjoncture économique toujours morose, et caractérisée par la rareté de grands projets structurants et le tassement des budgets consacrés à l’investissement, continue de pénaliser le recours au leasing. Les professionnels s’attendent néanmoins à la reprise des demandes sur les mois à venir. «En général, les premiers mois de l’année connaissent une baisse de régime, étant donné que les entreprises sont occupées par les travaux de clôture des comptes et des dépôts des états financiers», justifie une source du secteur.
En attendant, Bank Al-Maghrib affirme que ce moyen de financement représente à peine 27% des crédits d’investissement accordés aux entreprises par l’ensemble des établissements de crédit. Pourtant, les sociétés de leasing (6 actuellement, toutes filiales de banques) allouent déjà plus de la moitié de leur portefeuille de financements aux TPME, selon les estimations de l’institution. En analysant la structure des ressources financières des entreprises, ce mode de financement se positionne cependant au dernier rang bien après l’autofinancement, les dettes fournisseurs et les dettes bancaires. Comparé aux marchés matures, le leasing représente actuellement 15% de la formation brute de capital fixe correspondant à l’effort d’investissement au niveau national, contre 25 à 40%.

L’activité avait progressé de 10% en 2017

Pourtant, en 2017, la production a marqué une hausse exceptionnelle d’environ 10%. Les financements de cette année se sont établis à 15,2 milliards de DH, portant l’encours à 47 milliards, en hausse de 4,5%. Sachant que l’activité était en berne depuis 2008. En 2017, «il y a eu une nette reprise dans la mesure où la production de l’année a permis largement de remplacer les remboursements et de gagner quelques points», commente Abdesslam Bouirig, DG de BMCI Leasing et président de la section Crédit-bail à l’APSF.
Un bémol toutefois, les acteurs du leasing ne financent pas réellement l’investissement ! «La croissance n’est pas alimentée par des dossiers de financement de matériel roulant, de biens d’équipement ou de locaux industriels. Il s’agit d’opérations de restructuration pour mobiliser du cash, notamment via des montages de lease-back ou cession-bail», ajoute-t-il. Ces derniers sont, pour rappel, des montages financiers à travers lesquels une entité vend un actif et le récupère en location pour une longue durée. Il s’agit de transactions de dizaines de millions de DH portant sur des équipements industriels, du matériel roulant, des engins, des locaux et terrains.

Face à ce constat, la profession s’active pour dynamiser le marché. Début février, l’APSF a tenu une réunion pour discuter de la possibilité de présenter des données plus détaillées (aujourd’hui non disponibles). Ceci pour aider les membres à comprendre exactement la dynamique du marché et à s’adapter à la concurrence du crédit simple et des autres modes. Selon le président de la section leasing, il est question de présenter dorénavant les chiffres du secteur par nature d’opération : celles qui se rapportent à l’investissement pur et dur et celles qui concernent de simples montages pour mobiliser le cash à travers les actifs détenus. De plus, il semble que la concurrence des banques pousse les leaseurs à plus de flexiblité et de souplesse, tout en étant moins exigeants sur les garanties qu’auparavant. «Ce qui va leur permettre de prendre davantage de dossiers, notamment dans le mobilier», commente un banquier. Etant donné que le leasing est un métier de financement d’actifs, plus le bien a de la valeur à la revente, plus les garanties seront moindres. Les difficultés observées chez des clients et la sinistralité dans plusieurs secteurs n’encouragent plus les sociétés de crédit-bail à prendre plus de risques. «Nous voulons bien financer et accompagner les entreprises, mais nous devons être couverts», se défend le patron de BMCI leasing. A ce titre, l’APSF vient de réactiver les conventions signées avec Dar Damane pour permettre aux TPME d’avoir une contre-garantie qui aide les sociétés de crédit-bail à surseoir au reste des garanties conventionnelles (caution solidaire, nantissement…).

Manque de créativité

A ces actions de fond s’ajoute le lancement de l’activité participative. En effet, la création des banques participatives a ouvert un nouveau business pour les sociétés de crédit-bail, en l’occurrence la variante du leasing conforme à la Charia dite «Ijara mountahia bitamlik». Les professionnels s’attendent à ce que ce produit, toujours en discussion chez la profession, contribue significativement à la croissance sur les prochaines années.
De surcroît, les leaseurs commencent à élargir progressivement leur périmètre d’activité à de nouveaux secteurs. Ils sont en train de répondre à une grande recommandation de Banque Al-Maghrib formulée en juin 2017 lors des Assises du leasing. Les responsables de la Banque centrale estiment, en effet, que le secteur est quelque part peu créatif et ne prend pas beaucoup de risques. Deux secteurs sont recommandés aux sociétés de leasing par la banque centrale : l’agriculture, surtout pour les filiales de crédit-bail dont les financements au secteur agricole restent faibles et les projets d’investissements basés sur les énergies propres.