Affaires
Accidents du travail : la réforme arrive
Un projet de loi a été soumis aux syndicats le 29 mai.
Au lieu du passage automatique devant la justice, la procédure transactionnelle sera favorisée.Objectif : raccourcir les délais.
Le Smig comme base de calcul d’indemnité pour les petits salaires et les travailleurs occasionnels.
Les rentes versées aux veuves et aux ayants droit handicapés seront revalorisées.

Du nouveau dans les accidents du travail. Mardi 29 mai, le ministère de l’emploi a présenté aux syndicats, lors d’une réunion à Rabat, le projet de loi devant amender le dahir de 1963 relatif à l’accident du travail (AT). Les centrales syndicales auront jusqu’au mois d’août prochain pour examiner et discuter ce projet, et faire part de leurs remarques. Par la suite, le texte entrera, en principe, dans le circuit de l’adoption : discussion en conseil de gouvernement et en conseil des ministres avant d’être soumis au Parlement. Si tout se passe bien, le texte pourra même entrer en vigueur en janvier 2008, selon le ministère de l’emploi.
L’objectif de la réforme, selon une source proche du département de l’emploi, est de simplifier et de rendre plus transparente la procédure d’indemnisation des accidents du travail. Les concepteurs de ce projet tiennent à souligner, d’entrée de jeu, que cette réforme «n’entraà®nera pas d’aggravation des charges pour l’entreprise et ne portera pas de modification au taux de cotisation en vigueur depuis 2002».
50% des notifications aux assurances concernent l’AT
En revanche, les mécanismes actuels d’indemnisation des accidents du travail comportent plusieurs dysfonctionnements que le projet ambitionne aujourd’hui de corriger. Pour cela, il est prévu une adaptation de la législation de l’AT à plusieurs textes en vigueur, notamment la Procédure civile, le Code du Travail ou encore au Code des assurances. Quelles sont donc les principales modifications qu’apportera la réforme ? Premièrement, le projet introduira, et c’est là son principal apport, la procédure transactionnelle.
La réforme de 2003 a institué l’obligation de l’assurance AT et en a modifié la prime, sans cependant réaménager les procédures marquées par une grande lourdeur administrative qui retarde souvent le traitement des dossiers et donc la liquidation des indemnisations. L’objectif du projet est d’ériger la conciliation amiable en tant que règle afin que le recours à la justice devienne l’exception. Cela permettra, entre autres, le désengorgement des tribunaux.
Selon les statistiques de la CNSS, quelque 65 000 accidents du travail sont déclarés annuellement. Ce qui revient à dire que l’on a, sur la base des 165 000 entreprises déclarées à la CNSS, environ 40 accidents du travail pour 1 000 salariés. Par ailleurs, selon les assureurs, 50% des notifications que reçoivent les compagnies d’assurance sont faites au titre des accidents du travail. Des données chiffrées qui renseignent sur l’engorgement au niveau des tribunaux. Résultat : le règlement d’un dossier AT peut durer jusqu’à 8 ans.
Et c’est pour remédier à tout cela que le projet introduit la conciliation amiable qui se fera entre l’assuré et la compagnie d’assurance. Les détails de la procédure seront précisés dans les textes d’application, mais l’on retiendra, selon le ministère de l’emploi, que la transaction se fera dans un délai qui sera fixé par la loi et que le ministère de l’emploi souhaite court. La transaction se fera aussi sur la base du certificat médical, du taux d’indemnité fixé à la fois par le médecin traitant et le médecin- conseil de l’assureur.
Deuxième mesure prévue par le projet, une uniformisation de la rente servie aux veuves des victimes d’AT. Dans la législation actuelle, le taux de remboursement varie selon l’âge de la veuve. Si celle-ci est âgée de plus de 60 ans, on lui verse 50% de la rente due. En revanche, si elle a moins de 60 ans, le taux de remboursement n’est que de 30%. «C’est une anomalie que le projet doit corriger. Nous proposons un taux d’indemnisation uniforme de l’ordre de 50% pour toutes les veuves quel que soit leur âge», indique-t-on au ministère de l’emploi. Par ailleurs, le projet prévoit une revalorisation de l’indemnisation pour les ayants droit handicapés.
Comme troisième mesure importante, le projet de texte prévoit la révision de la base de calcul de l’indemnisation qui est aujourd’hui le salaire moyen déclaré à la CNSS. Le projet, dans un souci d’équité, compte prendre en considération le Smig annuel quand le salaire se situe en deçà de ce seuil. «C’est une mesure qui avantagera les employés de plusieurs secteurs, notamment l’agriculture, le textile ou encore le bâtiment, qui sont le plus souvent des temporaires et ne travaillent parfois que cinq ou six jours par mois !», explique une source proche du dossier. Enfin, le projet de réforme élaboré par le ministère de l’emploi propose une redéfinition de l’accident du travail qui fera, dit-on au niveau de ce département, «la distinction entre les accidents qui surviennent sur le lieu du travail et ceux qui surviennent sur le trajet du ou vers le lieu du travail.
Cette définition est primordiale pour faire la distinction entre accident du travail et accident de la circulation ». Les syndicats ne se sont pas encore prononcés sur le projet de réforme car «il faut se donner le temps de l’étudier au niveau des commissions spécialisées».Mais la première réaction est venue du côté des avocats qui disent ignorer le contenu de la réforme et qui rejettent, d’ores et déjà , la suppression de la procédure judiciaire. Mais, rétorque-t-on au niveau du ministère de l’emploi, «il n’y aura pas de suppression de la procédure judiciaire. Celle-ci continuera à exister en guise de dernier recours pour résoudre les cas de désaccords majeurs »
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Favorables à la réforme proposée de l’accident du travail (AT), notamment à l’introduction de la conciliation amiable, les assureurs estiment que la nouvelle procédure permettra d’alléger les mécanismes d’indemnisation et, surtout, de mettre fin aux abus qui existent actuellement. Leurs propositions sont de trois ordres. En premier lieu, ils suggèrent que la déclaration se fasse auprès de l’entreprise et non pas auprès des autorités locale ou municipale. Deuxièmement, ils suggèrent de confier la fixation de l’incapacité permanente ou partielle (IPP) à un collège de médecins composé du médecin traitant de la victime, du médecin-conseil de la compagnie d’assurance et enfin d’un médecin désigné par le conseil de l’ordre des médecins du lieu o๠s’est produit l’AT o๠de celui dont relève le siège social de l’employeur. En troisième lieu, les assureurs préconisent un réaménagement de la sortie en capital pour les IPP (incapacité partielle ou permanente) inférieures ou égales à 10%, qui constituent environ 80% des dossiers des AT. Pour éviter les abus, les compagnies d’assurance suggèrent une forfaitisation de l’indemnisation en capital. Ainsi pourrait être instaurée une franchise pour les IPP inférieures ou égales à 5%. Pour les IPP se situant entre 5 et 15% serait servi un forfait égal à trois fois la rente annuelle. Pour les IPP supérieures à 15%, la sortie en capital sera fixée sur la base des expertises médicales menées par le collège des médecins. |
