Affaires
44 000 cartes de paiement en devises distribuées par les banques
Les formules commerciales diffèrent mais le principe est le même : elles sont alimentées par les dotations en devises.
Des sociétés de financement proposent des cartes adossées en fait à des crédits : le client dépense à l’étranger et rembourse par la suite.

Décidément, les banquiers veulent s’attaquer à toutes les niches possibles et imaginables. Classes sociales défavorisées (low incom banking), agriculteurs (plan Maroc vert), produits destinés aux jeunes actifs…, tout y passe. Mais en cette période estivale, une nouvelle cible fait l’objet de toutes les convoitises : les vacanciers.
Qu’elle s’appelle Al Moussafir (CIH), ou Odyssée (BMCI), Rihla (Attijariwafa bank), Voyage (BMCE) ou encore CDMPass (Crédit du Maroc), plusieurs banques disposent de cartes internationales dédiées aux dépenses en devises pendant les voyages à l’étranger. Combien de clients en profitent aujourd’hui ? L’information est difficile à obtenir auprès des banques elles-mêmes qui gardent leurs chiffres secrets pour des raisons de concurrence. Toutefois, un indicateur est disponible auprès du Centre monétique interbancaire (CMI), passage obligé pour toutes les opérations monétiques. Selon le CMI, à fin mars 2009, 43 670 cartes de ce type étaient en circulation, soit une progression de 7% par rapport à la même période en 2008. Si la répartition par banque n’est pas disponible, on sait en revanche que presque la moitié de ces cartes sont détenues, en fait, par des entreprises surtout celles opérant à l’export.
Au-delà des différentes appellations commerciales, elles fonctionnent presque toutes selon le même principe : ce sont des cartes Visa à autorisation systématique avec un plafond fixé à hauteur de la dotation annuelle de voyage. Elles permettent non seulement le paiement des achats et le retrait à l’international, mais également le paiement par internet.
Signalons que les personnes physiques marocaines et étrangères résidentes au Maroc bénéficient d’une dotation annuelle de 20 000 DH pour couvrir leurs voyages touristiques. «Cette dotation est délivrée par année civile et peut être utilisée en un seul ou plusieurs voyages dans la limite du plafond cité», explique-t-on auprès de l’Office des changes. La réglementation va plus loin et permet aux parents dont les enfants mineurs figurent sur le passeport de bénéficier d’une rallonge de 7 500 DH par enfant, à condition naturellement que ce dernier soit du voyage. Le client qui part en voyage avec ses deux enfants en bas âge peut donc disposer de 35 000 DH sur sa carte de dotation.
Le prix d’une carte varie entre 150 et 300 DH
Pour que l’émission de ces cartes soit possible, il a fallu assouplir la circulaire n°1700 de l’Office des changes qui stipule que «la carte de crédit internationale peut être émise en faveur des personnes physiques résidentes ou non résidentes, titulaires de compte en devises ou en dirhams convertibles». Or les Marocains n’ont pas le droit d’ouvrir un compte en devises ni en dirhams convertibles. «Ayant pris conscience des opportunités qu’offre cette niche, les banques ont insisté auprès des autorités financières pour ouvrir cette réglementation et faire bénéficier ce produit à davantage de clients», confie une source à Bank Al Maghrib. Selon elle, cette carte doit être utilisée exclusivement pour couvrir les frais de voyage. «Il est donc interdit aux clients détenteurs de cette carte de faire un dépôt à l’étranger avec leurs dotations qui sont exclusivement destinées au tourisme», ajoute la même source.
Si elles refusent de divulguer le nombre des cartes en circulation pour des raisons commerciales, les banques se montrent en revanche très prolixes lorsqu’il s’agit des avantages concurrentiels de leurs produits respectifs. «Il suffit d’avoir un compte bancaire chez nous pour avoir droit à la carte», claironnent les chargés de clientèle auprès des établissements qui proposent ce type de produit. Certains essaient en effet de se différencier en émettant des cartes hybrides adossées à la dotation touristique et donnant droit à un crédit revolving.
«La carte de crédit dotée d’une recharge en devises est gérée sous forme de compte revolving par la société de financement et remboursée à partir du compte chèque. Elle diffère de la carte dite de dotation puisque celle-ci n’est pas adossée à un crédit», souligne, pour sa part, Aziz Cherkaoui, DGA de Salafin, société de crédit à la consommation qui en propose une. Il est entendu que la réserve en devises ne peut en aucun cas dépasser le plafond autorisé. L’avantage est que tout client est en mesure d’en disposer – s’il satisfait aux critères fixés par l’émetteur – quelle que soit la banque dans laquelle il dispose d’un compte chèque.
Reste que pour disposer de toutes ces variétés de cartes, il faudra en payer le prix. Elles sont facturées entre 90 et 200 DH par an, sans compter que presque toutes les banques calculent les paiements en devises sur la base du taux de change devise/DH le plus élevé. Pas très pratique pour le client.
