Culture
Les Etats Généraux de la culture : pour une politique culturelle juste et adaptée
Deux ans après la restitution des Etats Généraux de la culture, l’association Racines en présente la deuxième phase, du 10 au 12 novembre, à la friche culturelle des Anciens abattoirs de Casablanca.

Avant de changer un état de fait, il convient tout d’abord d’en avoir une idée claire. C’est là, certes, une lapalissade, mais qui semble itérativement ignorée dans l’établissement des stratégies politiques. En culture, les Etats Généraux de la culture (EGC) ont pallié l’absence de recensement du fait artistique et de statistiques sur les habitudes culturelles, grâce à un travail réalisé sur deux années et restitué lors de la première rencontre, en novembre 2014.
Une deuxième phase s’est penchée sur les pratiques culturelles du citoyen marocain dans les différentes régions du Royaume. «A l’issue de la première phase, nous pouvions faire un état des lieux des actions culturelles, selon les disciplines culturelles et artistiques et les infrastructures existantes. Aujourd’hui, il s’agit d’en savoir plus sur les pratiques culturelles des Marocains selon les régions du Royaume. Nous ne savions pas par exemple combien de livres lit un Marocain, combien de pièces de théâtre il voit, etc.», explique Aadel Saadani de l’association Racines, instigatrice de l’initiative.
Le but de l’action est de faire émaner une politique culturelle à partir des besoins et revendications du public. La décentralisation, adoptée comme nouveau modèle de gouvernance politique au Maroc, est ainsi revendiquée comme outil clé de l’action culturelle. Car il règne «une position de principe qui consiste à ne pas tenir compte de ce que disent les gens, ne pas les écouter, ne pas mettre en place des dispositifs de recueil de leurs points de vue, de leurs opinions, de leurs doléances», explique Raymond Benhaim, président de Racines. Cette seconde édition rendra compte des perceptions et des attentes de la jeunesse, avant de proposer des recommandations, ou de renforcer celles qui avaient déjà émané de la première phase des Etats Généraux de la culture.
Place à l’action
La restitution de cette longue phase d’écoute permettrait, lors de la seconde édition des Etats Généraux de la culture, d’ajuster les propositions de politique culturelle en fonction des pratiques et des besoins des différents groupes sociaux, puisque l’enquête sur les pratiques culturelles a été faite à partir d’un échantillon représentatif de la population, en termes de genre et d’âge, de répartition géographique (rurale et urbaine), de catégories socioprofessionnelles. L’ensemble de ces données a été cartographié sur le site (www.artmap.ma). Il permettra aux décideurs politiques d’éviter un aménagement culturel à l’aveuglette, ou sur la base de données non spécifiques à la région ciblée.
En outre, la première phase des Etats Généraux de la culture avait proposé une répartition du travail de la politique culturelle, de manière transversale, entre différents départements ministériels. «Nous sommes loin de demander l’élimination du ministère de la culture, comme c’est le cas de pays comme le Royaume-Uni ou l’Australie. Nous proposons plutôt une collaboration avec d’autres ministères qui disposent de moyens et de proximité avec les jeunes, dans laquelle le ministère de la culture tiendra un rôle clé, comme former les professeurs d’éducation artistique pour l’Education nationale, chapeauter la Formation professionnelle dans les métiers de l’art, soutenir le ministère de la jeunesse et du sport dans l’éducation populaire, via l’animation de ses maisons des jeunes», étaye Aadel Saadani. Un suivi de ces recommandations sera également au menu de cette deuxième phase des EGC.
Un Observatoire des politiques et des pratiques culturelles devra également être amorcé, pour fournir les données et les statistiques pour la recherche, l’évaluation et la mise à jour régulière des politiques culturelles.
Au programme
L’organisation de la seconde édition des EGC à Casablanca n’est pas un choix anodin. Racines veut, par là, s’inscrire dans la démarche globale de développement que connaît la grande métropole et dans laquelle la culture est une valeur motrice. Sans oublier que Casablanca concentre un grand nombre de structures, d’infrastructures et d’événements culturels et artistiques, ainsi que de nombreux artistes et opérateurs, publics et privés. Un lieu idéal, donc, pour recevoir les différents protagonistes de l’action culturelle ainsi que les représentants d’organisations culturelles régionales et internationales invitées, telles que l’UNESCO, l’Organisation internationale de la francophonie(OIF), la Fédération internationale des coalitions pour la diversité culturelle (FICDC), SAMRO Foundation (Afrique du Sud), Shams (Liban) et d’autres.
Au programme, des ateliers pratiques matinaux permettront de mener «une action pilote pour l’Afrique et le Moyen-Orient» ou encore pour prôner la «liberté de création et d’expression artistique pour l’élaboration d’un plaidoyer efficace». Les rencontres des après-midis permettront d’évoluer les politiques culturelles au Maroc et de conclure les recommandations de cette deuxième édition. Au cœur de l’événement, les Anciens abattoirs de Casablanca accueilleront un souk associatif, des expositions, des spectacles de théâtre de plusieurs compagnies et des concerts de jazz (Janis Perruzi), de Rai (Reda Taliani) ou d’éléctro (DJ Guedra Guedra et DJ MAOU). Autant de genres et de disciplines pour satisfaire le plus grand nombre.
