Réunion professionnelle : Entretien avec Imad Mouhib, Directeur pôle stratétégie cabinet Officium Maroc

«Les managers ne considèrent pas encore la gestion d’une réunion comme une compétence à développer»
Pour Imad Mouhib, consultant expert et directeur du Pôle Stratégie & Marketing au sein du cabinet Officium Maroc, il existe plusieurs types de réunions selon la situation, les destinataires et les objectifs assignés. Un certain nombre d’éléments sont à prévoir avant la réunion afin de s’assurer d’un maximum d’efficacité en un minimum d’investissement temps. Explications.
Toute entreprise ne peut se passer des réunions. Les séminaires sur la conduite de réunions ont-ils un succès auprès des managers ?
Une bonne partie du «Capital temps» d’un manager est investie dans des réunions, aussi bien en interne qu’en externe. Raison pour laquelle il est crucial d’y accorder de l’importance pour que cette activité récurrente soit créatrice de valeur sans devenir chronophage. Des réunions bien tenues sont une opportunité pour le manager et tout le reste de l’équipe, ses collègues comme ses collaborateurs, de discuter les orientations stratégiques de l’entreprise, avancer sur les objectifs de l’entreprise ou tout simplement identifier et résoudre des problèmes.
Aujourd’hui, les séminaires de conduite de réunions émergent à peine, vu que la plupart des managers ne considèrent pas cette activité en tant que «compétence» amenée à être développée. Pourtant, programmer une réunion, la conduire, assurer son suivi est tout sauf une tâche facile, et même si certains y excellent plus que d’autres, il y a toujours moyen de rendre cet évènement incontournable, beaucoup plus productif.
On voit que beaucoup organisent des réunions, parfois sans valeur ajoutée. Quels sont les objectifs auxquels doit répondre une réunion ?
Cela dépend du type de réunion ! Dans le cas des réunions récurrentes, les objectifs sont bien plus évidents car il s’agit le plus souvent de réunions de suivi ou «status update». Il s’agit, dans ce premier cas, d’aligner l’ensemble des parties prenantes souvent pluridisciplinaires et de vérifier l’état d’avancement des engagements et des projets en cours. Or, il existe aussi un risque majeur induit par ce type de réunions, c’est lorsqu’avec la fréquence on s’écarte des objectifs initiaux et que les participants commencent à y voir un événement redondant voire ennuyeux, banale ou inutile plutôt qu’une occasion de créer de la valeur.
Les autres types de réunions ad hoc ont bien souvent un objectif précis qui justifie justement leur tenue, nous citerons notamment les réunions de prise de décision où il s’agit de «trancher» pour une option claire et précise. Il y a aussi les réunions de «Partage d’information» où il s’agit pour celui qui provoque la réunion de tenir au courant le reste des participants de l’avancée de son projet et de les informer des événements majeurs sans que cela ne nécessite une prise de décision quelconque.
Il existe aussi un autre type de réunion à la valeur certaine que l’on appelle réunions de résolution de problème ou «Problem Solving Meeting». Y participeront, le plus souvent, des équipes pluridisciplinaires en vue de trouver des solutions à un problème ou de générer des idées, pistes et stratégies à considérer de la part de l’entreprise.
Y a t-il des préalables à respecter pour s’assurer de la bonne conduite ?
Il y a un certain nombre d’éléments à prévoir avant la réunion afin de s’assurer d’un maximum d’efficacité en un minimum d’investissement temps. Tout d’abord, une réunion doit avoir un objectif circonscrit et un «outcome», ou résultat, attendu bien identifié au préalable. Cet objectif doit être clair non seulement pour l’organisateur de la réunion, mais aussi pour tous les participants. Cela permettrait d’assurer le 2e préalable qui est «la préparation», étape très importante parce qu’elle permet d’avoir une efficacité accrue pour des raisons évidentes.
Pourtant, les «voleurs de temps» ne manquent pas. Comment justement les éviter?
Les réunions peuvent vite devenir très chronophages dans le cas justement où les préalables ne sont pas respectés. Ainsi, une réunion sans objectif précis et déclaré aura forcément tendance à s’allonger au gré des participants. Il en est de même avec des participants non préparés ou désintéressés qui auront forcément besoin de plus de temps afin d’appréhender la situation, de l’assimiler, voire d’y apporter des réponses et solutions. L’attitude avec laquelle on aborde une réunion est aussi déterminante dans la capacité à aller droit au but et à réaliser les objectifs pour lesquels la réunion a été prévue.
Pendant la réunion, quelle est la meilleure attitude à adopter ?
Que ce soit pour l’organisateur ou pour les participants, l’attitude est fondamentale car elle permet le plus souvent d’assurer la fluidité voire le succès ou non de la réunion, mais aussi la pertinence des décisions actées. La ponctualité par exemple est un élément très basique mais aussi très révélateur dans la tenue d’une réunion. Respecter l’horaire de démarrage et de fin d’une réunion est primordial. La présence ne doit pas être que physique, un maximum d’attention, mais aussi d’implication dans la discussion et dans la contribution à l’atteinte des objectifs de la réunion, est requis. A titre anecdotique, il n’y a rien de plus désagréable qu’un participant toujours scotché à son smartphone ou à son ordinateur. Il faut aussi faire attention au respect des autres participants, de leurs points de vue, de leurs idées, les écouter et ne pas les interrompre. En cas de divergence d’opinion, il faut accepter en faisant preuve d’ouverture d’esprit et s’attaquer aux problèmes soulevés et surtout pas aux individus. Ainsi, tous les commentaires doivent être formulés d’une manière objective avec une argumentation factuelle. Une discussion honnête et franche est la clé de l’atteinte des résultats escomptés d’une réunion, alors qu’une culture de blâme et de jugement de valeur ne fait que vous en éloigner.
Enfin, comment la rendre efficace ?
Il faut cerner l’avant-réunion, en faisant circuler l’ordre du jour, le timing exact de début et de fin de la réunion en faisant attention à s’y tenir, et faire circuler tout matériel utile à la réunion pour que les participants puissent en prendre connaissance en amont et éviter sa découverte séance tenante.
Le jour de la réunion, commencer à temps, rappeler les objectifs, faire preuve d’ouverture d’esprit tout en restant dans le «scope» et ne pas hésiter à recadrer si nécessaire. Faire preuve d’objectivité et challenger les avis et non pas les personnes. Mener une réunion c’est aussi modérer et gérer les discussions critiques et difficiles, en facilitant notamment l’alignement des points de vue. Autre élément clé, ne pas sortir de la réunion sans prise de décisions et sans plan d’action avec délais et responsabilités bien définis. Enfin, faire systématiquement des PV ou des comptes-rendus de réunions et les faire circuler, avec notamment les engagements établis, ainsi que les actions et tâches de suivi assignées à chacun des participants.