Quelques pistes pour réussir son plan de formation

Déterminer avec précision les besoins, choisir le bon organisme, suivre et évaluer le programme sont des facteurs qui figurent parmi les conditions de réussite. L’achat de la formation doit être soumis aux mêmes exigences que n’importe quel autre achat ou investissement stratégique.

De plus en plus d’entreprises, en particulier les grandes, investissent dans la formation. Selon certaines estimations, le budget annuel est de 3 à 5 MDH. Ce qui montre qu’elle est devenue un facteur clé dans le développement des carrières. «Chaque année, c’est le même rituel : collecte des besoins en formation, définition des objectifs et des indicateurs de mesure, choix des modalités de formation, établissement du plan de formation, suivi budgétaire… On déballe la grande artillerie pour ce marathon destiné à renforcer les compétences de nos collaborateurs. Et pourtant, ces enjeux sont souvent mal appréhendés par les salariés. Souvent, la formation répond à des envies et non pas à des besoins, alors que c’est le contraire qui doit être la règle», explique une responsable de formation dans un grand groupe de la place.
Aujourd’hui, on fait de plus en plus de formation sur le développement des compé́tences gé́né́riques telles que savoir-être, communication et travail d’équipe, dans le but d’outiller les employé́s.
Bref, une bonne collaboration et une évaluation juste des besoins de formation vont développer chez les employés les compétences permettant aÌ€ l’entreprise de demeurer compétitive. Ceci dit, Jamal Amrani, ancien DRH dans de grands groupes et DG actuel du cabinet Jadh, tempère. «La formation ne fait partie de la culture d’entreprise que quand cette dernière la conçoit comme un véritable investissement au profit de son capital humain. Ce qui est certain, c’est que l’employé marocain est très demandeur de formation. Il perçoit très souvent cette dernière comme un véritable avantage et un acte de reconnaissance de la part de son employeur», affirme-t-il.
On peut déduire des explications des experts que les objectifs ne sont pas toujours bien compris par les bénéficiaires, si ce ne sont pas les employeurs qui se trompent de choix, faute de ne pas bien cerner les besoins. Il arrive parfois que des formations soient programmées, rien que pour boucler le budget y afférent. Dans ce cas, ce sont souvent les collaborateurs indésirables qui sont désignés. Une grave erreur, sachant que cela ne fait qu’attiser les tensions.

L’organisation d’actions de formation devient de plus en plus ardue

Autre manquement observé : lors des entretiens annuels d’évaluation, certains responsables hiérarchiques ne se réfèrent pas aux fiches de poste, aux exigences de l’emploi tenu (référentiel métier/compétences) et aux objectifs de leurs structures organisationnelles émanant de la stratégie de l’entreprise, pour choisir les actions de formation avec leurs collaborateurs. «Il faut éviter de refaire une formation qui ne répondait pas exactement au besoin exprimé par les participants, ceci par manque de communication avec le formateur ou à cause d’un besoin mal identifié», prévient Abdelkrim Sekkak, DRH du groupe Shell du Maroc.
L’erreur peut aussi provenir du mauvais choix des cabinets formateurs. Malgré toutes les précautions prises (cahiers des charges précis des besoins, procédure d’appels d’offres transparente, commissions de validation des propositions des prestataires suivant une grille de critères), il peut y avoir un grand décalage entre la qualité du programme et la qualité de l’animateur. «C’est pourquoi il faut réaliser une évaluation annuelle des prestataires de service afin d’en garder les meilleurs», note le DG de Jadh.
D’autres échecs peuvent survenir au niveau des évaluations des actions de formation. Le système d’évaluation épouse généralement les valeurs dominantes de la société qui consistent à ne pas critiquer lorsque l’animateur gagne l’affectif des stagiaires. On peut critiquer les conditions matérielles (confort de la salle, qualité du menu, etc.), mais pas l’animateur car ils le trouvent sympathique.
En ce qui concerne les formations diplômantes, il est important d’exiger des responsables hiérarchiques de proposer des schémas d’évolution de carrières à valider par le comité des carrières, avant d’autoriser ce type de formation. Ceci dit, un bon plan de formation réside dans plusieurs points essentiels. Il revient par exemple aux responsables formation de faire en sorte de fédérer les managers en les informant, suffisamment à l’avance, des calendriers établis, et en les impliquant au maximum dans le processus afin que chaque formation soit non seulement prévisible mais préparée et attendue !
Il ne faut pas oublier que les responsables formation ont aussi un important rôle à jouer dans la collecte d’informations, l’identification des prestataires, l’organisation de la logistique, le suivi de toutes les actions… car l’organisation d’actions de formation devient de plus en plus ardue.

Savoir ce que l’on veut évaluer

L’achat de formation n’est pas en reste. Il ne faut surtout pas faire un choix risqué. En d’autres termes, l’erreur à éviter est de recourir systématiquement aux catalogues de formation proposés par les opérateurs. C’est peut être facile et pratique de faire ainsi son marché de formation mais l’entreprise risque de consommer de la formation sans se préoccuper sérieusement de l’adéquation des programmes offerts avec ses propres besoins et spécificités. «Dans certaines entreprises, l’achat de la formation est soumis aux mêmes exigences que n’importe quel autre achat ou investissement stratégique : supervision de l’acte d’achat par la direction des achats, appel au référencement des fournisseurs, conditions de paiement et de garanties…», souligne Jamal Amrani. Et qui dit formation, dit aussi retour sur investissement. La question de l’évaluation s’impose donc. Encore faut-il, dès le déclenchement du processus d’ingénierie, savoir ce que nous voulons évaluer. S’agit-il d’évaluer la satisfaction des participants, évaluer le contenu de la formation, les compétences du formateur, les acquis ou l’impact et les retombées de la formation… ?
Dans tous les cas, il convient de partir de la situation préalable à la formation et de les comparer aux objectifs de formation précis. Encore faut-il qu’ils soient mesurables ou observables.
Autrement dit, la formation sera d’autant plus difficilement évaluable que les objectifs opérationnels de départ seront flous. Comment alors mesurer l’écart en fin de course ? Existe-t-il une méthode particulière pour une estimation juste et logique ? Selon M. Sekkak, l’évaluation doit se faire en deux étapes : «A chaud, pour mesurer les effets immédiats et le niveau de satisfaction des bénéficiaires, mais aussi à froid, par la hiérarchie, une fois le bénéficiaire en poste (observation des changements de comportement, évolution des compétences…)».
Certes, pour évoluer et s’adapter à un monde du travail toujours en mouvement, les entreprises investissent plus de temps et d’argent dans la formation de leurs effectifs. Les stratégies d’entreprises doivent en effet inclure une vision du développement des compétences des employés et organiser un plan global de formation afin de faire face aux nouvelles réalités du marché du travail. Cependant, il faut comprendre qu’aussi indispensable soit-elle, la formation ne sera jamais la réponse à tous les dysfonctionnements de l’entreprise.